28 - AARON

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  La sonnerie de mon téléphone me réveille et je peine à me rappeler que je ne suis plus à Chicago. J'attrape mon téléphone sans regarder qui m'appelle encore endormi.

- Je peux savoir pourquoi toi et la nouvelle vous êtes portés disparus ?

Je reconnais la voix d'Alex et me frotte les yeux.

- On est chez ma mère, Stan ne te l'a pas dit ?

- Je n'ai pas encore croisé Stan. Je pensais que t'avais kidnappé la nouvelle, depuis que tu es venu la chercher jeudi soir elle n'est pas revenue.

- Elle a mieux à faire sûrement.

- Attends, tu as dit chez ta mère ? Je croyais que tu ne supportais pas ta mère ?

Je me lève et entre dans ma salle de bain, j'allume l'eau de la douche en expliquant à Alex que quand Hope veut quelque chose, elle se débrouille toujours pour l'avoir.

- Dit plutôt que la nouvelle t'adoucit. Je suis sur que si t'es chez ta mère c'est parce que tu ne te passes plus d'elle. Vous couchez ensemble ?

- Non. Je fais juste plaisir à Hope, je m'en fous que Alyssa soit là ou pas.

Sa question est drôle quand on sait à quel point je fais des efforts pour ne pas brusquer l'emmerdeuse. Ce n'est pas l'envie qui me manque de coucher avec elle mais elle est tellement flippée que j'ai bien compris qu'il valait mieux attendre et lui montrer qu'elle vaut mieux que ça. Encore hier elle pensait que je la considérais de la même façon que les autres et que tout ce que je voulais c'était la mettre dans mon lit. Mais, aussi bizarre que cela puisse paraitre, elle se trompe. Je ne veux pas que ça avec elle, je veux plus. Je grimace en me rendant compte à quel point ça ne me ressemble pas. Alex a peut-être raison, cette fille « m'adoucit ». Il y a encore quelques semaines j'aurais pris ce que je voulais sans me soucier de ce qu'elle pensait, je me serais juste amusé avec elle, j'aurais surement utilisé notre dérapage pour la faire chier. Elle aurait quitté l'appartement ne me supportant plus et j'aurais été content. Mais tout ne s'est pas passé comme prévu, j'ai été incapable d'utiliser le fait qu'on ait couché ensemble contre elle. J'ai même était incapable d'être un affreux connard ensuite, comme si cette emmerdeuse avait réussi à m'affaiblir.

- Vous rentrez quand ? Je ne peux plus sécher comme tu n'es plus là et les cours c'est vraiment nul. Finit par me demander Alex.

- Jeudi on sera de retour à l'université normalement.

- Super, je te laisse Stan arrive. Il a l'air tout triste sans ta soeur.

- Va te faire voir.

Il rit et raccroche. Je pose mon téléphone en souriant et entre dans la douche.

Il a raison, cette foutue emmerdeuse m'a fait quelque chose au point que je le dise ouvertement devant ma mère et ma soeur. Le sourire satisfait de Hope m'a fait chier, ça m'énerve d'être aussi faible. Ma mère et Hope sont contentes surement mais je ne le suis pas, je fais une erreur et je n'arrive pas à lutter contre. J'essaye de garder la face quand je suis avec Alyssa, redorer le peu de fierté qu'il me reste, mais encore hier soir il a fallu que je lutte comme un fou pour sortir de sa chambre. Je ne dois pas lui montrer trop d'affection, je ne sais pas être affectif et elle ne doit pas espérer que je le devienne. Mais ce dont elle peut être sûre c'est que je ne joue pas avec elle.

  Dans la journée je ne croise ni Alyssa ni ma soeur qui sont toutes les deux parties faire je ne sais quoi. Ma mère, elle, travaille et ne rentrera qu'en fin d'après-midi. J'arpente donc la maison en regardant ce que ma mère en a fait. L'argent que mon père a dû lui verser suite au procès l'a beaucoup aidé, elle a acheté une maison croyant pouvoir reconstruire une famille dans un nid douillet. Mais, nous n'étions plus des enfants, j'avais déjà dix-sept ans et Hope vingt ans. Aucun de nous deux n'avait envie de rester dans cette ville de malheur à faire semblant que tout allait bien même après un an. Après avoir vécu chez la mère d'Alyssa, Lilly, et dans un appartement miteux avec ma soeur et ma mère, j'ai tout simplement fait en sorte d'acheter un appartement dans une autre ville, en l'occurrence Chicago. Afin de m'éloigner de tout ça et surtout de ma mère qui ne passait pas une journée sans s'apitoyer sur notre sort. Elle a pleuré tellement souvent après la nuit où nous sommes partis que j'en suis venu à me demander si ce n'était pas dangereux pour la santé. Le reste de l'histoire on l'a connait, Hope qui s'est révélée être la plus courageuse des trois a pris sa vie en main, elle à trouver un travail, un copain et a fait comme si de rien n'était. Je pense que c'est s'occuper l'esprit avec le travail et tout le reste qui lui a permis d'éviter de trop penser. Ma mère qui n'arrivait plus à nous regarder sans se mettre à chialer à continuer son taff d'aide-soignante, elle a trouvé des psys et suivie des thérapies à la con. Et moi, j'ai rien fait pour aller mieux, j'ai rencontré Stan dès mon arrivée à Chicago et je ne sais pas pourquoi il a voulu être ami avec moi. A ce moment-là on était plus jeune et comme je n'avais rien à perdre je faisais un nombre de conneries assez hallucinant. C'est sûrement ce qui a plu à Stan. Faire des conneries, boire, fumer ça ne m'a suffit qu'un temps. Quand je me suis rendu compte que j'étais toujours aussi mal même après une année, c'est là que j'ai sérieusement commencé à dérailler. J'ai rejeté tout le monde, fait du mal à ceux qui m'aimaient. Enchaîné les conquêtes, les bagarres et les mauvaises idées.

HATE MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant