CHAPITRE 22

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- Je veux pas y aller !

El' baissa les yeux vers Ryu qui s'accrochait désespérément à sa jambe droite, tel un koala. Elle le fusilla du regard, sa patience s'amenuisant drastiquement au fil des minutes.

- Qu'est-ce que tu me fais là ? T'aimes l'école habituellement.
- Oui mais pas aujourd'hui !

De loin, la directrice les observait d'un oeil critique. El' grimaça et passa une main dans les cheveux de son frère espérant le calmer. L'effet fut inverse.

- Mais qu'est-ce qui te prends, bon sang ?
- Je veux être avec toi...

Sa voix se cassa et El' crut entendre un sanglot. Ne lui dites pas qu'il était en train de pleurer ? Paniquée, elle s'accroupit, lui faisant lâcher la jambe et se mit à son niveau. Tout de suite, il enroula ses bras autour de son cou et cacha son visage dans son cou.

- Ryu, dis moi ce qui va pas. Pourquoi tu pleures ? On t'embête à l'école ? - Son coeur se serra à cette pensée - Si c'est le cas, je peux aller en toucher deux mots à la maîtresse et...
- Non, c'est tous mes amis, personne m'embête.
- Mais alors, c'est quoi le problème ?

Il serra ses bras un peu plus fort autour d'elle. Sa respiration lourde soulevait son petit corps. El' lui caressa doucement le dos de haut en bas, espérant le calmer assez pour obtenir des explications. Elle ne laisserait personne rendre son petit-frère malheureux. Si elle devait aller intimider avec les gars toute la cour des bac à sable, elle le ferait.

- Un problème ? crissa une voix désagréable.

El' leva les yeux et fit face à la directrice qui les toisait d'un air sévère. C'était une vieille dame ridée qui, au contraire de madame Arai la gentille voisine, était passée du côté obscure de la force. Elle était aigrie, amère et aimait fourrer son nez partout. El' s'était déjà prise la tête plusieurs fois avec elle dans le passé, quand elle exigeait que ce soit son père qui vienne chercher Ryu le soir. Elle se doutait de quelque chose mais n'avait pas de preuve pour alarmer les services sociaux pour l'instant.

- Aucun, répondit El'. Ryu est seulement un peu fatigué. Vous savez, les enfants...
- Si je comprends bien, il n'est pas couché à une heure convenable ?

Dans ses bras, Ryu marmonna :

- Vous comprenez mal, vieille chnoque.

El' écarquilla les yeux, partagé entre l'hilarité et la réprimande. Heureusement, il avait parlé assez bas pour que la directrice ne l'entende pas.

- Il est couché de bonne heure tous les jours, commença-t-elle. Mais on ne peut s'attendre à ce que tous les enfants s'endorment tout de suite.
- Ça, c'est ce que vous pensez. Mais si votre père s'occupait autant de vous que vous le prétendez, vous sauriez que si l'heure à laquelle se couchait un enfant était fixe, il s'endormirait toujours par habitude à cette heure-là. Néanmoins, si vous le couchez comme bon vous semble, il ne s'endormira pas facilement.
- Et si vous vous occupiez de vos affaires, vous auriez moins de rides, railla El'.

Elle regretta tout de suite les mots qui sortirent de sa bouche mais c'était trop tard pour les reprendre. Tant pis, cette vieille femme lui avait toujours tapée sur le système.

La directrice écarquilla les yeux au point de ressembler de manière surprenante à une autruche. Elle marmonna ensuite une phrase et tourna les talons, l'air passablement énervé. Dans ses bras, Ryu rit :

- Bien fait pour elle, t'es la meilleure.

Elle n'en doutait pas mais il allait vraiment falloir qu'il aille en classe.

Don't Save MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant