Partie 3

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Emily est dans sa nouvelle chambre d'hôpital avec sa voisine depuis deux jours. Le courant passe bien entre la jeune fille aux cheveux dorés et la jeune fille aux cheveux de feux. Aileen est tout ce qu'Emily aimerait être : grande, mince, mais avec un minimum de forme, douce, bienveillante, ouverte d'esprit, sociable, cultivée et pleins d'autres qualités. De plus, l'adolescente s'accepte totalement ce qui lui donne un certain charme et laisse Emily admirative. Aileen est ici, car elle s'est fracturé le coude en faisant une mauvaise chute lors d'un cours de danse.

— Et c'est comme ça que j'ai atterri ici, je t'avoue que sur le coup, je n'ai pas réalisé que je m'étais blessée et j'étais prête à reprendre ma chorégraphie lorsque la professeure m'a fait remarquer que quelque chose clochait en observant mon bras d'un air inquiet, termine-t-elle en rigolant.

— Ouah ! Et tu n'as même pas eu mal ? demande Emily admirative.

— Non pas tout de suite du moins c'est arrivé quand j'en ai pris conscience et que j'ai tenté de bouger mon bras.

— Ah d'accord, et du coup, tu as été emmené par les pompiers ? Ça devait être trop stylé d'être dans le camion !

— Oui, c'est vrai, ça a un côté un peu impressionnant. Et toi alors, comment tu es arrivée ici ? Tu ne m'as encore rien dit petite cachottière, la taquines Aileen.

— Hum, c'est un peu compliqué, mais je te promets qu'un jour, je t'expliquerai tout.

— Pas de soucis alors, j'attendrais le temps qu'il faudra, répond-elle en souriant.

Emily lui rend son sourire même si l'évocation de ce sujet lui rappelle de mauvais souvenir.

— Tu es vraiment conne, tu aurais pu faire attention quand même ! Ce n'est pas si compliqué que ça de tenir un verre correctement sans le faire tomber ! s'énerve son père.

— Je... Désolé papa, je n'ai pas fait exprès, j'ai eu peur de quelque chose et j'ai lâché le verre, murmure la fillette.

— Oui, bah, la prochaine fois, tu éviteras de sursauter pour rien et comme ça, tu feras plus attention à nos affaires ! Tu as vraiment peur de tout, tu es une fille ou bien une mauviette ? se moque-t-il.

La porte claque, le père détourne le regard, laissant à sa fille, le temps de s'enfuir dans sa chambre en courant. « Je le déteste, je le déteste de tout mon cœur » chuchote-t-elle blessée qu'il soit devenu ainsi. Emily referme la porte à clef derrière elle pour que plus personne ne vienne la gronder, lui lancer des injures. Elle n'entend plus rien. La maison semble avoir retrouvé son calme. Elle enfonce alors sa tête sous l'oreiller pour que personne ne l'entende sangloter. 

Dehors, le ciel gronde, la pluie ne va pas tarder. L'enfant se lève pour refermer la fenêtre, mais avant qu'elle ne puisse effectuer son geste, un petit miaulement se fait entendre. Emily sourit, c'est le petit chat noir qui vient souvent lui tenir compagnie le soir. Elle ne sait pas d'où vient ce petit être à quatre pattes, mais elle l'aime beaucoup. Elle s'assoit sur son lit, le chat la suit pour s'installer sur ses genoux. Il ronronne et frotte sa tête contre ses mains pour réclamer des caresses. Ils restent ainsi ensemble une bonne partie de la nuit. Lui apaise son cœur, ses peurs et la comble de bonheur, elle lui donne toute l'attention, les caresses, les câlins qu'il demande. C'est un partage d'amour.

— Allô la terre, ici les Martiens ! lance Aileen pour la troisième fois. Tu es toujours avec moi Emily ?

— Oh, oui, pardon, j'étais dans la lune, répond-elle confuse.

— Oui, je vois ça à quoi tu pensais dis donc ? Tu n'avais pas l'air bien.

— À rien, ne t'inquiète pas. Tout va bien.

Emily baisse la tête et un léger blanc s'installe entre les deux filles. Heureusement, la plus vielle décide de faire une proposition à Emily pour essayer de lui changer les idées.

— Ça te dit d'aller faire un tour à la cafétéria après boire un petit chocolat chaud ou ce qui pourrait te faire plaisir ? Comme on est mineur, on ne peut pas quitter l'établissement donc c'est la meilleure chose qu'il nous reste à faire.

— J'aimerai beaucoup, mais je n'ai pas d'argent sur moi...

— Ce n'est pas grave, je peux te le payer, tu sais !

— Oh, euh, ne te gêne pas pour moi, tu n'as pas besoin de dépenser, s'exclame-t-elle gênée.

— Je ne te le demanderais pas si ça me dérangeait. Allez, viens, ça pourrait être sympa qu'on puisse voir autre chose que les quatre murs blancs de cette chambre.

— Bon d'accord, c'est bien parce que c'est toi, affirme la fille aux cheveux dorés en lui souriant.

— Parfait, je vais quand même prévenir une infirmière juste avant que personne ne nous cherche !

Aileen descend de son lit tout en faisant attention à son bras. Elle en a pour plusieurs mois donc elle fait de son mieux pour que sa convalescence se déroule bien avant de pouvoir entamer des séances de kinésithérapie. Pendant son départ, Emily décide d'enfiler un jogging et une petite veste. Elle ne se regarde pas cette fois dans le miroir, elle en a encore peur.

 L'adolescente sait qu'elle a repris un peu de gras et de muscles depuis son arrivée, mais cela fait encore trop peu de temps pour que de réels changements puissent apparaître. Elle se dit que lorsqu'elle pourra sortir et avoir une vraie famille, elle aimerait faire un peu de sports pour se muscler, peut-être la natation ? L'équitation ? La danse ? Elle verra bien comment se dérouleront les choses.

Son amie revient avec un grand sourire, elles sont autorisées à descendre. Les filles prennent l'ascenseur pour rejoindre le rez-de-chaussée, c'est plus simple pour Aileen qui doit de se promener avec son pied à perfusion et les médicaments reliés qui lui permettent de ne pas trop souffrir. La blonde commande les boissons chaudes avec les pièces de la rousse puis la rejoint à une table.

— Et voilà, mademoiselle est servie, annonce Emily en posant les chocolats chauds gracieusement. Je vous remercie pour cette délicate attention.

— Merci à vous chère servante, vous êtes bien aimables, répond Aileen en pouffant de rire. Franchement, malgré tout ce que tu peux dire sur toi, je trouve que tu es une personne simple, drôle et gentille. Tu devrais être plus tolérante avec toi-même, accepter que tu puisses faire des erreurs et que c'est tout à fait normal. Tu imagines la pression que tu dois te mettre en te dénigrant si souvent ? questionne la rousse d'un ton plus sérieux.

— Je ne sais pas trop quoi te dire. Je crois que j'ai grandi dans cette ambiance-là, qu'à travers toutes les réflexions que m'ont dit les autres, j'ai fini par croire que c'était vrai, que je n'étais pas assez bien pour les autres que ce soit physiquement ou mentalement. J'aimerai tant pouvoir être différente parce que ça me bouffe vraiment de l'intérieur.

— Et bien, je vais te dire quelque chose. Quoi que tu fasses, tu seras toujours critiquée alors autant faire ce qui te plaît non ? Puis en t'assumant, tu trouveras des personnes qui t'apprécieront pour toi, ce que tu es. C'est mieux que de jouer un rôle.

— Oui, tu as raison, je vais y penser, déclare-t-elle sincèrement.

À l'Aube d'un Nouvel EspoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant