1. L'inscription

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Charlie Tiwaia frappa de la paume sa lampe-torche dont la lumière commençait à vaciller. Elle n'avait aucune envie de se retrouver dans le noir à plusieurs mètres sous terre. Quoiqu'avec l'eau opaque qui noyait le boyau, elle n'y voyait de toute façon pas à cinquante centimètre.

Elle se retourna machinalement pour jeter un œil aux deux autres qui suivaient, oubliant le poids de sa bombonne qui lui demanda trois fois plus d'effort que d'ordinaire pour constater qu'ils étaient toujours bien là, un peu à la traîne.

Elle avait suivi Camille, ethnologue et surtout ami de longue date, à plusieurs reprises et, accompagnés de sa collègue Rebecca, ils s'étaient mis plus d'une fois dans d'étranges situations, mais elle ne cessait d'être étonnée de voir où ces histoires les menaient à chaque fois. Cette fois-ci, cela dit, ils avaient plutôt intérêt à ce que l'instinct de Camille ait vu juste et de ramener quelque-chose de convaincant, sinon ils ne reverraient plus l'institut national d'anthropologie ou l'université de Tegucigalpa de sitôt.

Quelques heures plus tôt, ils avaient profité de la nuit pour sauter dans le bateau de l'expédition à laquelle Charlie et Rebecca participaient initialement. Charlie, qui préparait déjà le bateau, avait pu voir, courants à petits pas, Rebecca en tête qui mitraillait Camille de « Bouge ! Bouge ! Bouge ! Bouge ! ».

Ils avaient longé la côté nord du Honduras jusqu'au matin quand Camille leur avait enfin annoncé qu'ils étaient arrivés à l'endroit qu'il pensait désigné par les histoires que se racontent les populations locales. Plusieurs d'entre elles parlent d'un peuple venu de l'autre bout du monde qui serait resté longtemps sur les bords de la jungle et aurait même vécu plusieurs années avec les autochtones. Les récits diffèrent mais parlent souvent de sorcières ou d'étranges chamanes. De telles similarités entre les contes des différents villages étaient rares et Camille était persuadé qu'elles tiraient leur origine dans un événement historique. Mais ces légendes semblaient très vieilles et il prenait le pari risqué que les complexes sous-marins qu'on lui avait indiqué contenaient d'autres secrets que ceux des poissons.

Charlie continua de s'enfoncer entre les filaments de pierre, perdant à plusieurs reprises son orientation. Difficile de distinguer le haut du bas, et seul le sens dans lequel arrivaient ses deux amis lui indiquait la direction.

Une bonne vingtaine de minutes après qu'ils s'étaient enfoncés dans les galeries serpentant sous la Mer des Caraïbes, ils se retrouvèrent dans une large cavité, toujours inondée, qui semblait être un cul-de-sac. Alors qu'ils allaient prendre la décision de rebrousser chemin, Rebecca pointa du doigt au-dessus de leurs têtes. Ils virent trois plongeurs les regarder à la verticale, qui leur ressemblait étrangement. Ils comprirent que Rebecca avait vu juste et se dirigèrent vers le grand miroir. Ils transpercèrent sa surface et émergèrent dans une poche encore plus grande que celle de laquelle ils venaient.

Charlie retira son masque et prit une petite inspiration. L'air était respirable. Rebecca l'imita en poussant un soupir bruyant et se retourna vers Camille qui se débattait pour enlever ses lunettes sans faire tomber sa lampe. Les deux se hissèrent sur les rebords du trou qui menait sous l'eau tandis que Charlie avait déjà disparu plus loin.

-   Eh, attends-nous ! lui lança Rebecca.

Ils contournèrent l'eau pour rejoindre la faible lueur qui émanait des mains de Charlie. Quand ils arrivèrent à son niveau, elle était figée devant une paroi, les yeux écarquillés et les lèvres entre le sourire et les tremblements.

-   Ça va ?

Pour toute réponse, elle leva un peu le faisceau de sa lampe sur la paroi et les deux autres rejoignirent son silence.

Devant les trois explorateurs, dans une grotte à plusieurs mètres sous la mer chaude des Caraïbes, non loin des jungles de la Mosquitia, étaient gravés des signes verticaux et anguleux, des signes que chacun connaissaient bien.

-   Vous croyez que c'est quelqu'un d'ici qui est venu faire ça ? demanda Camille.

-   Qui pourrait descendre jusqu'ici ? Tu as vu comme c'était bouché, on est les premiers à passer depuis un bout de temps, répondit Rebecca.

-   Elles sont remplies de mousse. C'est vraiment vieux je crois, ajouta Charlie.

Elle passa ses doigts pour les dégager un peu mais il n'y avait pas de doute permis. La roche était gravée de runes nordiques.

-   Vous lisez la même chose que moi ? hésita Camille

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-   Vous lisez la même chose que moi ? hésita Camille.

Charlie chuchota :

-   Litilviss maðr. Je ne suis pas sûre...

Camille traduisit :

L'Homme sait peu de choses.




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Pour la petite histoire...

Ces runes existent bel et bien. Enfin, elles ne se situent pas au fond de la Mer des Caraïbes, mais ont été retrouvé gravées sur un morceau de bois du Bateau d'Oseberg, découvert sous un large monticule funéraire en Norvège.

De nos jours, on ne sait toujours pas comment interpréter ces runes ni qui les a gravé. Deux squelettes étaient disposés dans le bateau. Celui d'une veille femme d'environ 80 ans et celui d'une autre, plus jeune, d'environ 50 ans.

Certains pensent que la plus âgée aurait été une reine, la reine Åsa du clan Ynglingar, mais cette hypothèse est généralement rejetée et il est dit qu'elle pourrait être une völva, ce que l'on pourrait grossièrement désigner comme des chamanes ou des sorcières des mythologies nordiques et germaniques.


Le chant du colibriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant