Partie 3 - 18

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Vagabond


Vagabond fit le tour de la propriété. Un petit jardin, une maison à étage, collé à aucun autre bâtiment – un véritable luxe en ville – aucun garde, même pas un chien qui attendait. Une personne fortunée qui se croyait inatteignable. Une proie des plus faciles ! Le jeune homme connaissait le nom des propriétaires mais ignorait leur rôle dans la société. Comment s'étaient-ils fait connaître ? D'où venait leur fortune ? En réalité, il n'en avait que faire. Il n'était pas là pour ces informations. Il était là pour le travail.

Sans grande difficulté, il trouva une fenêtre facile à ouvrir, au rez-de-chaussée. Il se faufila agilement, sans bruit, à l'intérieur, Louve sur ses talons. Depuis qu'il l'avait recueilli, l'animal était toujours resté proche de lui. Elle était encore plus depuis le départ de la Vieille. Il n'avait plus qu'elle et elle n'avait que lui. Elle ne le lâchait pas, jouant un certain rôle de mère ou de sœur attentionnée. Il était donc tout naturel qu'elle le suive, même dans son travail, à l'intérieur de cette demeure.

Humain et bête, se déplaçaient dans un silence de mort. Le moindre bruit pouvait les trahir. Autant pour la réputation que pour l'argent que Vagabond allait en tirer, ils n'avaient pas le droit à l'erreur. Avec une certaine curiosité maladive, le brun prit le temps de visiter chaque pièce, détaillant tout ce qu'il voyait. Lui, vivant soit dans l'un des repères poussiéreux de la Vieille qu'il s'était approprié, soit en pleine forêt, il n'était pas habitué à tant de confort. Ces fauteuils, ces coussins, ces tapis isolants du froid, ces nombreuses décorations : il ne voyait cela qu'en venant dans ce genre d'endroit. Il ne l'expérimentait jamais. Un choix qu'il avait fait : il devait rester discret, se fondre dans la masse. L'envie de tester chaque lit vide et confortable qu'il croisait ne lui manquait tout de même pas. Goûter à un certain confort, l'espace d'un court instant. Il ne le pouvait pas, il ne devait laisser aucune trace. Il n'était qu'un fantôme venant visiter un lieu. Un fantôme effectuant un travail.

Oui, on lui avait demandé d'être dans cette demeure, comme on lui avait demandé d'être dans la précédente et dans celle encore avant. La Vieille lui en aurait voulu d'être devenu ainsi. Elle n'avait jamais aimé le savoir en train de voler. Pourtant, au cours des dernières années, c'était le talent qu'il avait le plus développé. Pour vivre, survivre, il n'avait pas pu se contenter de seulement ce que Louve lui rapportait. Il avait besoin de plus. Cette richesse... Tout ce luxe dans lequel il n'était pas né, socialement il en était interdit. Cela ne l'empêchait pas, au fil du temps d'en être de plus en plus attiré. Pour, ne serait-ce que la toucher du bout du doigt, il volait. Un collier, un vase, une statuette, il n'avait plus de limite. Son butin ? Il n'en faisait rien. Il était simplement satisfait de l'avoir. Petit à petit, il avait pris goût à s'introduire dans les endroits qui lui étaient interdits, frôlant le danger, risquant parfois d'être repéré, attrapé, arrêté, éliminé. Ce risque, ce danger, il faisait partie de sa vie et il l'aimait. Il était loin des petits courts de soins grâce aux plantes que le précédant Fantôme de la ville lui avait enseignés. Il ne l'avait pas oublié, aucune de ses leçons. Il avait simplement suivi un chemin bien différent.

Petit à petit, à force de roder, de voler, des rumeurs étaient nées. Personnes ne connaissaient son visage, ni même son « véritable nom ». Ils savaient juste qu'il y avait un voleur en ville. Un excellent voleur, impossible à arrêter. Juste une ombre, un fantôme. Même accompagné d'un loup, personne ne l'avait encore repéré. Il excellait dans son art. Les gardes l'avaient cherché, à de nombreuses reprises. Sans succès. Existait-il vraiment ?

La réponse était évidente. Il était bien là. Il jouissait d'une telle réputation que, à présent, on faisait appel à ses services. Un marchant lui demander de découvrir les secrets de la réussite d'un autre. Un noble lui demander de dérober un bijou chez un autre plus fortuné. On le payait pour cela. Pas autant que valait l'objet volé. Il ne s'en préoccupait pas. Les pièces enfermées dans une bourse de cuir n'étaient pas ce qu'il recherchait le plus. Il cherchait le frisson du vol !

Lys et VagabondOù les histoires vivent. Découvrez maintenant