Lys et Vagabond

Partie 4 - 25

Lys

La pluie tombait à grosses gouttes, en un bruit assourdissant. Lys avait déjà vu la pluie tomber. Il lui était arrivé, plus d'une fois même, de s'asseoir à sa fenêtre et de regarder les gouttes d'eau tomber du ciel. Ce genre de temps le rendait toujours pensif. Ne pas pouvoir sortir, rester là, bien couvert sous les toits de son palais, simplement attendre que le temps passe.

Cette fois, il n'était pas dans sa chambre. Il n'y avait aucun confort, aucune haute tour, aucun toit. Il n'était pas au palais.

Le Voleur avait trouvé un creux assez large dans un rocher pour les abriter. Il ne reconnaissait rien de ce qui l'entourait. Aucune maison habituelle, aucune rue, même pas un pot de fleur qu'il voyait chaque jour. À la place, il n'y avait que des arbres, des buissons et cette pluie incessante. Elle les empêchait même de voir à plus de un mètre. Lui, héritier d'un trône qu'il n'avait jamais vraiment voulu, se retrouver bloqué par la pluie, abrité sous un rocher humide. Il avait froid, il était mouillé et même la faim commençait à se faire sentir.

Lui qui avait toujours été habitué au confort, à la chaleur d'un habitat confortable, à la sécurité, lui qui avait toujours cherché à s'éloigner de sa prison... Il se retrouvait à présent perdu dans un monde qui lui restait encore bien trop étranger. Il avait toujours eu soif d'aventure, de découverte. Cette fois il avait la sensation d'y avoir été projeté contre son gré. La violence, la haine et la douleur : il ne l'avait jamais demandé. Dans son rêve de jeune Prince, il n'avait jamais souhaité le malheur des autres. Toujours à se plaindre de ce qu'il avait – et n'avait pas – aujourd'hui qu'il avait tout perdu, il réalisait à quel point il avait été chanceux.

- Vous ne devriez pas rester de votre côté. Avec l'humidité, vous aller tomber malade.

Lys tourna lentement le regard vers celui qui l'avait aidé à fuir il y a déjà trois jours de cela.

Malade ? Il l'avait déjà été quelque fois au cours de son enfance.

- Qu'est-ce que cela peut bien faire à présent que je tombe malade ?

- Je n'ai pas risqué ma vie, ainsi que celle de Louve, pour vous sortir de cette ville, pour finalement vous voir mourir dans cette forêt à cause d'une maladie que je ne saurais soigner !

- Soigner ? Êtes-vous médecin en plus de voleur ? Drôle de combinaison, ne put s'empêcher de ricaner le Prince.

Il avait du mal à croire qu'un simple voleur des rues, aussi doué soit-il, puisse connaître quelque chose à l'art complexe de la médecine. Mais ce ricanement, au-delà de la moquerie, n'était qu'une manière pour lui de se défendre, d'oublier où il était et pourquoi il était là. Il ne connaissait pas grand-chose – pour ne pas dire rien – au monde extérieur et il se sentait accablé par cette faiblesse. Si accablé qu'il cherchait à l'oublier en s'attaquant aux autres.

- Quand on grandit dans les rues humides et répugnantes, qu'on n'a pas chaque nuit un toit pour nous couvrir ou une couverture pour nous réchauffer, on apprend à survivre comme on peut. Savoir soigner une douleur, un mal semblant provenir de nulle part et partout à la fois, ce n'est qu'un atout pour rester en vie plus longtemps. J'ai appris à me battre avec les armes que j'avais...

Lys perdit son air moqueur. Plus intrigué qu'auparavant par ce jeune homme, ce voleur, il s'approcha un peu de lui et reprit.

- Qui vous a appris l'art de la guérison ? Ce n'est pas quelque chose que l'on peut deviner seul sans risque !

Le Prince avait suivi de nombreuses leçons et avait lu nombre de livres pour devenir le parfait héritier. Jamais quelqu'un ne lui avait enseigné la médecine. Les maths, l'histoire, l'art de la guerre, le combat... Oui. Soigner quelqu'un ? Jamais. Cet art-là était réservé à d'autre et non à un Roi. Qu'un simple garçon des rues y ait eu accès l'intriguait au plus ai point.