Chapitre 99

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Samedi 13 juin 1942

Aujourd'hui c'est mon jour de repos. Il est à peine 6h et j'entends du bruit dans la chambre d'Emmrich. J'enfile une robe de chambre et je me faufile pour aller jeter un œil. La porte est entrouverte et je vois Lucie en train de retourner l'appartement. J'entre rapidement et je referme derrière moi. Au claquement de la porte, l'indiscrète sursaute.

- Mais ça va pas! Tu m'as fichu une de ces trouille! Me rabroue t'elle.

- Et toi qu'es tu en train de faire ? Je suis sûr qu'on t'entend depuis le salon! Rouspété-je.

- Je nettoie la chambre! Persifle t'elle.

- Vraiment? En retournant toutes ses affaires?

- Ecoute Alice, sois tu m'aides, sois tu t'en vas!

Je reste un instant muette, continuant de la regarder en train de mettre un bazar indescriptible dans la chambre d'Emmrich. Puis je lève les yeux au ciel et je commence à l'aider. Je range ce qu'elle dérange... et je commence à fouiller moi aussi. J'ai envie de savoir si ce qu'elle dit est vrai et si Emmrich fait toujours parti du SD.
Je vais jusqu'à son bureau, que Lucie a déjà bien chamboulé. Je commence à ranger les nombreux dossiers ouverts maladroitement, quand soudain, l'un d'eux attire mon regard. Il est coincé dans un autre et je ne vois qu'une partie de la photo, mais je la reconnais de suite... Je l'ouvre et je reste sans voix quand je tombe sur ma photo. Tout est écrit en Allemand. Mais je comprend le principal... Alice Berger, terrorist. Je reste circonspecte et je n'arrive plus à détacher mon regard des papiers que je tiens dans mes mains.,,

- Tu as trouvé quelque chose? Me demande alors Lucie en me voyant immobile depuis quelques minutes.

- Non non, rien d'intéressant. Nié-je en refermant le dossier et en le rangeant en dessous des autres.

Il ne faut surtout pas que Lucie le voit car même si elle est au courant de mon implication dans la résistance en 1940 et 1941, elle ne sait pas qu'Emmrich et moi nous nous connaissons. Et je ne veux pas qu'elle soupçonne quelque chose.

Lucie repart de l'appartement d'Emmrich sans aucune informations. Moi je n'ai pas eu de preuves formelles qu'il est toujours dans les renseignements, mais j'ai vu ce dossier... pourquoi le garde t'il? Je ne peux pas lui en parler car il saurait que j'ai fouiller son appartement...

Il est 17h. Je me suis promenée un peu dans Paris. C'est tellement grand que j'ai peur de me perdre. Quand je rejoins mon appartement, Emmrich m'y attend.

- Je ne m'attendais pas à te voir si tôt! Lui dis en déposant mon chapeau sur le porte manteau. Tu n'as pas peur que quelqu'un nous voit?

Il semble contrarié et ne répond pas.

- Est ce que ça va? Demandé-je en m'approchant de lui.

Il m'attrape par le bras et me fait basculer sur ses genoux.

- Il faut que je te demande quelque chose Alice et il faut que tu me répondes honnêtement. Me dit il alors d'un air grave.

J'ai soudain un coup de sang et j'ai peur de ce qu'il va me demander.

- Oui, dis moi.

- Quelqu'un a visité mon appartement aujourd'hui. Je soupçonne ton amie Lucie. Comme je la soupçonne aussi d'avoir participé au vol de l'arme de notre officier. Dis moi ce que tu sais.

Je suis prise de sueurs et mon cœur bat la chamade, comme à chaque interrogatoire que j'ai pu subir... Je réfléchie rapidement.

- C'est juste Lucie qui à nettoyer ton appartement ce matin.

- Je le sais, mais ce n'était pas pour le nettoyer. Des papiers ont été déplacés.

Le choix est simple. Je dénonce mon amie ou je me dénonce. Je croise les doigts pour que ça passe mieux si c'est moi...

- Ecoutes...C'est moi... c'est moi qui ai fouiller dans tes papiers... Dis-je alors en baissant les yeux.

- Mais pourquoi? Demande t'il alors avec surprise.

- Je te soupçonnais de faire toujours partie du SD. Alors j'ai voulu vérifier. Avoué-je.

- Mais pourquoi ne me l'as tu pas demander?

- Je ne sais pas....

Je sens son regard pesant sur moi et je n'ose pas le soutenir. Je tente alors d'inverser les rôles.

  -  J'ai vu le dossier qui me concerne... Celui qui mentionne que je suis une terroriste... pourquoi l'as tu conservé? le questionné-je alors.

- Je l'ai emmener quand nous sommes partie de Besancon pour qu'il ne reste plus de traces de toi la bas et que personne ne puisse te retrouver.

Je me sens alors bête...

- Alice... me dit il en caressant mon visage. J'ai confiance en toi. Tu ne risques rien.

Mon sourire se mélange au malaise. Et je me sens mal lorsqu'il me dit qu'il a confiance en moi.

- Mais dis moi si tu sais quelque chose à propos de Lucie. Réitère t'il.

- Non, je ne sais rien. On parle principalement du travail. Nié-je. Mais si tu cherches à avoir des informations sur elle, c'est que tu fais toujours partie des renseignements...  Conclue-je.

- J'ai parfois l'ordre de faire des recherches sur certains cas oui car j'étais un très bon élément au  Sicherheitsdienst à Besançon. Mais j'ai refusé une nouvelle place sur Paris. Je suis officiellement affecté aux affaires juives.

Je ne suis pas forcément ravie qu'il soit aux affaires juives, mais j'ai accepté le fait qu'il était soldat allemand et occupant... Je l'accepte lui, mais je n'accepte toujours pas ce qu'ils font...

  -  Est ce que ma réponse te conviens ? Me dit il alors en souriant, en me voyant plongée dans mes pensées.

  -  Oui lieutenant Einsenmann... lui répondis-je ironiquement.

Il m'embrasse intensément puis va rejoindre son appartement...

Coucher avec l'ennemi...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant