Chapitre 21 Lara

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Je n'ai pas l'habitude d'aller en boite, mais je ne suis pas née de la dernière pluie, je sais comment sont les hommes là-dedans. Pourtant, jamais, je n'aurais imaginé ça. Un type relativement taillé vient à mon encontre et son regard en dit long sur ce qu'il a en tête. Avant que j'ai le temps de dire quoi que ce soit, il commence à se coller à moi. J'ai toujours dit que je refusais de me battre et de décharger ma colère sur quelqu'un, mais au bout d'une minute, je sens le feu monter trop vite, je ne peux pas me contrôler. Je m'apprête à lui mettre un bon direct mais visiblement quelqu'un a jugé bon de le faire à ma place. Mon cœur rate un battement quand je fixe Eli défoncer la mâchoire de ce mec. Je cligne des yeux, incapable de bouger. Je ressens des choses trop contradictoires d'un coup. Un flux d'émotion, de soulagement m'envahit, mais aussi de frustration de ne pas avoir eu l'occasion de me défendre seule. C'est la première fois de ma vie que quelqu'un se bat pour moi. Et ce n'est pas n'importe qui. C'est Éli. Je le regarde et je n'aime pas ce que je vois. Ses mains encore serrée en poing et en sang tremblent, son regard est rempli de haine contre le type à terre et le désespoir que je lis dans ses yeux me met dans un état proche de la crise d'angoisse. En un clin d'œil, il tourne les talons et sort par une porte qui mène à un petit espace extérieur. Sans réfléchir, je m'élance derrière lui en repoussant les corps qui déambulent dans tous les sens. J'arrive enfin à cette foutue porte et la pousse avec empressement. Je sursaute en entendant un bruit sourd et sec. J'avance de quelques pas et découvre Eli en train de se déchainer sur un mur. Horrifiée, je me précipite pour l'arrêter mais manque trébucher, l'alcool bien présent dans mes veines.

— Arrête ! Mais putain arrête !!

Trop tard, il va se péter la main...

— Arrête s'il te plaît !

Il se retourne soudainement et je ne vois plus un homme en face de moi, mais une bête. Je tressaille. On dirait qu'il est possédé. Prisonnier de quelque chose, un souvenir, une blessure... Il me fixe et ses yeux s'écarquillent légèrement.

— C'est moi. Tout va bien.

Il cille et met quelques instants à sortir de son état de transe. Sa respiration est tellement rapide qu'on pourrait croire qu'il vient de courir des kilomètres. Je m'approche avec prudence, prête à lui dire que tout va bien, que cet homme ne m'a pas touché, mais brusquement il me serre si fort contre lui que mon souffle se coupe l'espace d'un instant. Je ressens toutes ses émotions. Mon Dieu... C'est trop. Je n'ai pas envie qu'il ressente ces choses-là... non non non... Son étreinte se relâche légèrement, je sens son front se poser sur mon épaule, et sa respiration irrégulière ne se calme pas. J'ai envie de lui dire que ce n'est pas grave, que j'aurais su me défendre, qu'il n'a pas à s'inquiéter pour moi. Sa détresse me brise le cœur. Il colle son front contre le mien. Cette proximité me rend folle. Je n'en peux plus, j'ai l'impression que je vais mourir s'il reste comme ça une seconde de plus sans rien faire. Mon cœur tambourine tellement fort que je sais qu'il est en train de sortir de ma poitrine. Et tant mieux, je pourrais lui montrer qu'il ne bat que pour lui. Le rassurer. Mais avant de m'en laisser l'occasion, Eli prend mon visage entre ses mains et écrase désespérément ses lèvres aux miennes. D'abord lentement, comme s'il demandait la permission, puis ardemment. Comme s'il attendait ça depuis le début. Comme moi. Je me demande comment j'ai pu avoir autant de retenue.

Je m'empare de son cou et me fond dans son torse. Il n'est pas assez près. Il me répond, mais ça ne suffit pas. Je veux plus. J'ai besoin de plus... Il pleut légèrement. Je n'avais même pas remarqué. On va être trempés si on ne rentre pas, mais j'ai tellement chaud que je m'en fous complètement. Nos lèvres se séparent, mais je reste collée à lui. On ne dit rien, on se regarde simplement. Aussi sincèrement que la première fois qu'on s'est vus. Nos souffles sont si rapides qu'ils en deviennent insignifiants, c'en est presque ridicule, on dirait qu'on vient de se battre. Il ferme les yeux en me massant la nuque et ça me provoque un délicieux frisson. Je savoure ce moment que j'attendais et que je n'étais même pas sûre de pouvoir espérer. Sans un mot, je lui prends la main. Il ne pose aucune question et lorsque nous traversons la boîte, je ne réponds même pas à mes amis qui nous demandent ce qui se passe, ni même au regard haineux de Laetitia. Là, je n'ai pas le temps, je n'ai envie que d'une chose...

BOXING HEARTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant