BOXING HEART

Chapitre 45 Lara

Je suis dans un parc pour enfants. Il y a des éclats de rire partout, un joyeux chaos de voix cristallines qui s'entremêlent dans l'air. C'est contagieux. En voyant les petits anges, je ne peux m'empêcher de sourire. Mais mon regard est attiré par une petite fille, un peu à l'écart. Elle est différente. Elle a ce regard intense, cette posture déterminée. Elle ne joue pas, elle veille. Et soudain, elle intervient. Un groupe d'enfants chahute un garçon plus frêle qu'eux. Elle s'interpose sans hésiter. Son poing se serre, son menton se lève, et je reconnais cette attitude. Je me reconnais. Mon cœur rate un battement. Je fais un pas vers elle, fascinée, curieuse mais quelqu'un me retient par le bras.

— Non, laisse-la. Elle a encore le temps.

Je me fige et me retourne lentement. Stupéfaite, je regarde ma mère, ébahis. Elle est là, devant moi, plus jeune, plus lumineuse que dans mes souvenirs.

— Maman ? Qu'est-ce que tu fais là ?

Elle ne répond pas tout de suite. Elle me regarde avec ce sourire tendre, celui que j'ai si souvent cherché dans la vraie vie, celui que la maladie a fini par effacer. Je rapporte mon attention vers la petite fille... mais elle a disparu. À sa place, j'observe une adolescente. Elle est plus grande, plus forte. Mais son visage est fermé, durci par quelque chose que je ne peux pas identifier. Une douleur, une solitude.

— C'est moi...

Ma mère acquiesce doucement.

— Maman qu'est-ce que je fais là ? On est où ?

— Profite, tu as encore deux ans, max...

— Deux ans ? Avant quoi ?

Elle détourne les yeux.

— Avant que je ne sois malade.

Mon estomac se contracte violemment.

— Je suis en train de rêver ?

— On peut dire ça.

Soudain, un bruit de fond envahit mon monde. Une alarme. Des crises. Et puis... Une voix. Une voix qui transperce tout.

— Maman qu'est ce que c'est ?

— C'est rien, ne t'en fais pas.

— LARA !

Mon cœur s'arrête. Éli. Je lève les yeux vers le ciel, là d'où semble provenir le son. Mon ventre se serre.

— Il est merveilleux, murmure ma mère. Tu as de la chance.

Mes jambes faiblissent.

— J'ai besoin de lui... Je suis en train de mourir, c'est ça ?

Un frisson glacé court sur ma peau.

— Non ma puce. Pas aujourd'hui.

— D'accord... Toi non plus, hein ?

Elle sourit et rit doucement.

— Non. Moi non plus. Je ne suis pas malade ici.

Je veux y croire. Je veux croire qu'ici, elle est éternelle.

— Ici ?

— Dans ton esprit.

Un pincement serre ma gorge.

— Si seulement c'était le cas dans la vraie vie...

Elle me regarde avec ce sourire mélancolique, puis elle désigne quelque chose derrière moi.

—Regarde.

Soudain, le décor bascule, et nous nous retrouvons dans mon club de boxe.

Eli et moi sommes en plein combat. Nos poings s'entrechoquent, nos regards s'embrasent. Ma mère me regarde avec fierté.