J'avais effectué un énième aller-retour cuisine lorsque ma mère me rejoignit, légèrement gênée. Je ne bougeais pas, continuant mes préparations. J'en étais même à me dire que ce cuiseur à riz était une bénédiction. Au moins avec une telle quantité, nous étions au point pour recevoir tout le monde. Je pensais même qu'il manquait un conteneur à riz en cèdre. Shimura-sensei m'en avait parlé lors de ma dernière séance et m'avait montré ceux que son salon de thé possédait. Il m'en fallait absolument un. J'économisais pour cela et j'étais certain que Jimmy serait ravi. Et puis le riz, c'était pratique et peu cher pour rassasier la foule qui ne manquerait pas de camper chez nous. Je m'arrêtais dans ma préparation. Chez nous ? Apparemment oui, j'avais fait un pas et même un grand. Ma mère profita de mon hésitation pour se lancer dans la fosse aux lions.
- Tu ne m'en veux pas trop ? demanda-t-elle doucement.
Je soupirais avant de me retourner vers elle.
- T'en vouloir, je ne crois pas. Je comprends. Pas contre, je ne pourrais pas oublier.
Elle regarda vers le sol, mal à l'aise.
- Merci, repris-je. Pour Max.
- Je t'en prie, j'avoue que je l'aime bien, ce grand dadais.
- Il m'a sauvé la vie, ce grand dadais, comme tu dis si bien.
- Je sais et je lui en suis infiniment reconnaissante. C'est lui qui a rattrapé mes erreurs alors le moins que je puisse faire pour lui est d'être présente à mon tour.
- Vraiment ?
- Je le pense. Ça fait beaucoup à avaler ces derniers temps mais en même temps ..
- Ne t'inquiète pas, répondis-je immédiatement. Je ne me suis jamais entendu avec papa, enfin beau-papa, et toute sa famille de merde.
- C'est vrai que ... bon, moi non plus. En fait, je faisais exprès de cramer le repas à Noël. Ils me répugnaient avec leur racisme et autre tare. Je ne comprends pas comment j'ai pu rester sous la coupe d'un tel homme. J'ai failli tuer mes fils virtuellement parlant. C'est un comble. Je vous ai donné la vie et vous me l'avez rendue. Je te promets de ne plus faillir de la sorte, jamais plus.
- Je me disais bien que quelque chose n'était pas normal, tu es une excellente cuisinière, soupirais-je. Je crois que j'ai hérité de ton caractère.
- Non, Samuel. Tu as le caractère de ton père. Tu es droit et fort. Ta faiblesse n'était que le reflet de la mienne. Ton père aurait adoré le jeune homme que tu es devenu.
- Même si son fils est gay ?
- Il adorait Adam et il était gay, il adorait Albert, et il est gay. Crois-tu vraiment que ton père aurait seulement eu l'idée de se poser la question ?
- Je ne sais pas, maman, je ne le connais pas.
- Et bien moi oui, et je sais qu'il aurait sans doute fait passer un très mauvais quart d'heure à James, sourit-elle moqueuse.
- Tu l'aimes ?
- Ton père ? Oui, je l'aime. Tu n'imagines pas à quel point j'ai aimé le jeune homme qu'il a été et combien je l'aime encore même s'il n'est plus avec nous. Il me manque, le plus difficile a été de te voir grandir et de constater à quel point tu lui ressemblais. Je ne dis pas ça pour te culpabiliser. C'est juste un fait. Tu es magnifique avec ces yeux. Il y a tout ce que ton père était à l'intérieur. Ton père t'a aimé, Samuel. Dès la première seconde où il a su que tu allais venir au monde. On voulait se marier, venir à Paris avec Adam et Albert. On avait tellement de projets. Il m'a appris le français. Ton père était doué en langue, tu sais. Et ...

VOUS LISEZ
Pour vivre
Ficción GeneralC'est lorsque tout va mal que le choix se présente violemment à soi. Choisir une mort de l'âme qui envahit déjà tout ou bien choisir la vie et ses explosions chaotiques. C'est le choix de Sam. Partir. Tout quitter pour recommencer. Pour apprendre à...