Chapitre 5

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Il m'a fallu plusieurs jours pour nettoyer la maison, mais rien qu'après une journée à laisser les fenêtres ouvertes, l'air est déjà plus respirable. Les poutres en bois, autrefois ternies par la saleté, commencent à retrouver leur éclat. J'ai jeté la literie et tout ce qui ne me servirait pas, faisant place nette pour les futurs aménagements. J'ai fait appel à un entrepreneur compétent qui s'est attelé à régler l'électricité et à remplacer le chauffe-eau défaillant.

Dans le garage, j'ai découvert une agréable surprise que mon grand-père avait laissée derrière lui : un magnifique pick-up Chevrolet C10. Bien sûr, il avait besoin d'amour et d'attention, mais cela ne me dérangeait pas du tout. Avec un peu d'huile de coude et d'ingéniosité, j'ai réussi à le remettre en marche. Il roulait à son rythme et avait tendance à vouloir s'arrêter au bord de la route pour souffler un peu et profiter du paysage, je savais que je pouvais lui redonner tout son éclat avec un peu d'entretien. Pendant que mon entrepreneur s'occupait de la climatisation, je faisais quelques réglages mécaniques et du ménage. La maison enfin habitable, j'allais m'équiper, en m'organisant pour me faire livrer, le lendemain, je m'attaquerais à la gélule. Il était temps, j'étais en ville depuis près de dix jours. Le camion était désormais immatriculé à mon nom, je pouvais circuler sans problèmes.


Équipé d'une caisse à outils contenant le nécessaire pour effectuer des réparations de base, je me gare sur le parking de la gélule, imaginant ce que le pick-up et elle auraient pu se raconter s'ils pouvaient parler. Armé de mon pied-de-biche, je commence à arracher le panneau de bois qui bloque la porte. Avec un léger grincement, la porte cède, et je la maintiens ouverte en plaçant un parpaing. L'air sent le renfermé, mais l'intérieur est étonnamment bien préservé. Les banquettes et les tabourets du comptoir ne sont pas trop abîmés, juste couverts d'une fine couche de poussière. Avant l'inspection complète avec mon entrepreneur, je m'empresse de retirer les panneaux de bois des fenêtres, laissant enfin pénétrer la lumière après de longues années d'obscurité.

J'empile la vaisselle et tout le matériel sur les tables, les organisant pour faciliter les futures vérifications. C'est alors qu'un bruit caractéristique attire mon attention : le ronronnement des moteurs de motos. Deux imposantes Harley-Davidson se garent sur le parking, révélant deux hommes à la posture menaçante.

« Salut », dit l'un d'eux en passant la tête par la porte tandis que l'autre pénètre à l'intérieur de la gélule, scrutant chaque recoin.

« C'est loin d'être ouvert les gars, pas avant un moment », les préviens-je poliment.

« On ne vient pas pour manger », grogne celui qui est entré, l'air provocateur.

Je l'observe, sentant l'animosité qui émane du motard. Je choisis de ne pas me laisser intimider par son attitude. Au contraire, un léger sourire se dessine sur mon visage. Il cherche manifestement les problèmes, cherche à provoquer une altercation car il est clair qu'il aime se battre.

« On faisait des affaires avec l'ancien proprio, on a comme un droit acquis », dit-il en me fixant intensément.

Je lui rends son regard sans ciller. « Ça m'étonnerait », rétorqué-je d'un ton ferme. « Le resto a fermé quand tu devais encore faire dans ta couche. L'ancien propriétaire ne faisait certainement pas affaire avec vous, et même si c'était le cas, je ne suis pas lui. Je suis le nouveau propriétaire, et ici, je veux un commerce clean. Alors à moins que ce soit en rapport avec la restauration, vous ne ferez pas d'affaires ici. J'espère que vous comprenez. »

Le biker près de la porte esquisse un sourire en coin. « Bien sûr », dit-il poliment. « Bonne journée, Monsieur, et bienvenue en ville.

— Merci, et passez me voir quand ce sera ouvert », lui dis-je en retour.

Cover me with loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant