6. Premier coup

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PDV Ashley : Une fois rentrée chez elle...

Je fixais le ciel à travers la petite fenêtre de mon nouveau chez moi. La pluie s'était mise à tomber. J'observais attentivement l'eau couler sur la vitre.

Elle m'avait dit que les étoiles renfermaient les âmes qui pleuraient les peines des personnes qu'elles aimaient.

Un sourire s'afficha sur mes lèvres. Une petite goutte salée s'écoula le long de ma joue.

La nuit commençait à tomber. L'air devenait de plus en plus frais. Une pensée traversa mon esprit. Je n'avais récupéré aucune de mes affaires avant de m'enfuir de chez mon père.

Je devais y retourner, pour tout embarquer avec moi. Du moins, prendre le peu de choses qui m'appartenaient et auxquelles je tenais. Récupérer mes quelques souvenirs...

Je soupirai.

...

Je marchais silencieusement entre les rues et les avenues. La pénombre du soir emplissait la ville et ses bâtiments.

Une voiture passa à côté de moi, en faisant siffler l'air. Je m'abritai derrière un poteau, pour ne pas être vue. Puis, je repris calmement ma route. Au loin, mon ancienne maison commençait à se dessiner.

Pour ne pas angoisser davantage, j'inspirai profondément et bloquai l'oxygène dans mes poumons. Je recrachai l'air, ressemblai toutes mes forces et me remis en route. La fenêtre de ma chambre donnait directement sur l'allée de la maison, ce qui me facilitait la tâche.

Je m'accrochai fermement à la gouttière pour tester la résistance. Elle paraissait solide. Je resserrai ma prise et me tortillai pour grimper. Je levais mes pieds l'un après l'autre et faisais de même avec mes mains.

Une fois arrivée en haut, je m'agrippai au rebord de ma fenêtre avant de m'y suspendre. Puis, j'ouvris, en silence, la vitre. Je fis attention à ne pas la faire claquer contre le mur.

Ma chambre était plongée dans l'obscurité, seule la lune l'éclairait un minimum. Je me dirigeai vers ma commode et tirai le premier tiroir. Mon sac ouvert, je fourrai plusieurs sous-vêtements à l'intérieur, avant de passer au prochain tiroir.

Petit à petit, mon sac se remplissait de mes affaires les plus importantes.

Avant de repartir, j'embarquai rapidement ma dernière photo d'elle. Elle y était si jolie, si belle. Elle avait un sourire rayonnant. Je la contemplai un long moment, très long moment, avant de la mettre avec le reste de mes affaires.

Je jetai un dernier coup d'œil à cette pièce. Cette pièce que je ne reverrais sans doute plus jamais de ma vie. Oui. C'était ça. C'était sûrement la dernière fois que je pouvais la voir, de mes propres yeux. La dernière fois que mes pieds toucheraient ce sol sal et froid. La dernière fois que mes yeux se poseraient sur les quelques meubles qui occupaient l'espace.

Sur un coup de tête, je pris un papier et notai :

« Papa. Non. Jean-Antoine. Je sais que je ne suis pas ta fille à tes yeux, alors logiquement, tu n'es pas mon père. Donc, Jean-Antoine, c'est Ashley. Hier, je suis partie. Je me suis ENFIN évadée de ta torture, de ta prison, de ton emprise.
Tu ne peux pas savoir à quel point j'aurais adoré écrire, dans cette lettre : Je t'aime de tout mon petit cœur, tu vas énormément me manquer, merci pour tout, prends soin de toi. On se revoit vite. En effet, j'aurais tant aimé griffonner ces quelques mots sur un papier, l'accrocher sur la porte du frigo et imaginer ta réaction et tes pleurs. Mais non. Nous savons tous les deux qu'il en est autrement. Dans notre situation, je peux traduire : Je ne t'aimerai jamais, je ne te pardonnerai jamais, tu ne me manqueras jamais, je regrette de t'avoir eu comme père, comme seule famille. Et tu peux mourir, je m'en fous. La voilà, la traduction exacte. La traduction de mes pensées.
Jean-Antoine, un jour, j'ai cru t'aimer, j'ai cru t'apprécier, j'ai cru pouvoir passer outre ce que tu m'as fait subir. La réalité, c'est que depuis que tu me l'as enlevée, ELLE, ma raison de vivre, une chose s'est éteinte en moi et ne se rallumera jamais.
C'est d'ailleurs ce jour-là que j'ai compris. Que j'ai enfin compris qui tu étais au fond. Au fond, tu es un monstre. Un putain de monstre. Et tu sais pourquoi ? Je vais te le dire, car tu n'as jamais hésité, regretté, ou ne t'es jamais excusé des souffrances que tu m'infligeais. Tu m'as blessée, tant physiquement, que mentalement. Je suis détruite, amochée, abîmée, éteinte, vide.
Et c'est pour ça que, ce soir, je décide de ne jamais t'accorder mon pardon, ni mon amour.

Damore (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant