Cher Plan Foireux

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Une fois Olivia partie, je me coulais un bain bouillant. Mon amie avait insisté pour veiller sur moi depuis mon canapé-lit mais j'étais assez grande pour faire face à cette déception seule, à l'aide d'un bon bain aux huiles essentielles et d'une rasade de Rescue. Après tout, Lucy Vincent ne disait-elle pas que l'eau chaude permettait de libérer de l'ocytocine ? Je n'avais pas besoin de la présence de Léo pour libérer cette hormone.

Les révélations sur le statut marital du comédien m'avaient assommées. Dans mon esprit, les pensées et les émotions se bousculaient. Léo était arrivé dans ma vie un peu comme un tsunami. Depuis ma plage tranquille, j'avais vu la vague à l'horizon mais, tout comme ces benêts de vacanciers, je m'étais dis qu'à cette distance elle ne pouvait qu'être inoffensive et qu'il serait toujours temps, si elle s'approchait davantage, de courir m'abriter en lieu sûr. Aujourd'hui, je n'étais plus certaine d'arriver à faire marche arrière.

Après une heure d'immersion dans l'eau chaude, mes idées ressortirent plus claires. Je décidais de ne faire aucun compromis avec mes valeurs intrinsèques. La nature de l'homme était peut-être polygame au temps de la préhistoire pour la bonne survie de l'espèce, il n'en restait pas moins que l'homme moderne possédait deux grands lobes frontaux qui lui permettaient de contrôler ses pulsions animales. La théorie de Léo ne tenait pas la route. Epuisée par la journée, je m'écroulais sur mon lit.

Le lendemain, la sonnerie de mon portable me réveilla à 8h15. Les yeux mi-clos, je réussi non sans difficulté à déchiffrer le texto qui s'affichait sur l'écran de mon iPhone : « Fais gaffe, j'arrive ».

Je clignais des yeux pour essayer de les décoller et relu le message une deuxième fois. L'étonnement, puis la panique, m'envahirent d'un seul coup. Je bondis hors du lit et fonçais vers la salle de bain. Un rapide coup d'œil en direction du miroir m'apprit que s'endormir les cheveux mouillés était une très mauvaise idée. Des épis indomptables se dressaient sur ma tête et je n'avais pas le temps de refaire un shampoing. Douze minutes plus tard, le comédien toqua à ma porte. Je l'entrouvris très doucement, priant intérieurement pour qu'il s'abstienne de tout commentaire.

- Eh bien ! s'exclama-t-il aussitôt qu'il vit ma tête. Tu as tout misé sur ton brushing ce matin. On obtient comment cet effet ? 

- Si tu pouvais avoir la gentillesse de ne pas penser à voix haute ce matin, ça serait sympa...

- T'as passé la nuit derrière un réacteur d'avion?

Il souriait, une guitare à la main.

- Si tu veux tout savoir, je n'ai pas eu le temps de sécher mes cheveux hier soir.

Léo avait le don de me faire oublier ma devise : Never complain, never explain.

- Ah ça...le cheveu raide, c'est pas toujours facile. 

- Ma parole, t'es venu pour faire un point Jean Louis David?! Et je te rappelle qu'il est 8h du matin et que tu débarques à l'improviste, j'ai horreur de ça.

- Ah non ! Ne fais pas ta Genevoise coincée !

Il n'y avait que lui pour débarquer chez moi, m'extirper de mon sommeil placide, se payer ma tête et retourner la situation contre moi lorsque j'essayais de me défendre. Pour toute réponse, j'essayais de refermer la porte sur son pied droit. Léo agita aussitôt sous mon nez deux billets de train. Ma colère diminua sous l'effet de la curiosité. Je jetais un œil sur la destination : Paris.

- Cher amour vegan sans chair, acceptes-tu d'accompagner un cœur second hand à Paris ce week-end ?

- Ça tombe mal, j'ai conférence tofu.

Jeune EveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant