Je me lève d'un bond. Je suis trempée de sueur, debout sur mon lit, en position de combat... Ah. Encore ce rêve. Toutes les nuits c'est comme ça. Je regarde mon réveil. 3h du matin. C'est plus tôt que d'habitude. J'écarte les bras et, lentement, me laisse tomber en arrière. J'atterris au milieu des couvertures et soupire. C'est foutu pour aujourd'hui, je ne me rendormirai pas. Après un long moment à fixer le plafond, je décide de sortir. J'ai besoin d'une cigarette. Sans cesser de repasser mon rêve en boucle dans ma tête, j'enfile mes baskets, un sweat, et je pars en claquant la porte. Personne ne me le reprochera, de toute façon. Ça fait des années que je vis seule.
À cette heure ci, il n'y a personne dans la rue. Les lampadaires éclairent un peu le trottoir et les deux trois SDF qui y dorment. Je passe sans les regarder. Qu'est ce que ça changerait, d'ailleurs ? Pas leur vie, en tout cas. Je tourne à droite devant un bar et je rejoins la porte de service. Arrivée là, je prend mon élan... et frappe un grand coup de pied dans la porte. Quasiment aussitôt, la fenêtre du premier étage s'ouvre et un homme dans la trentaine, cheveux bruns, yeux noirs, mal rasé et de toute évidence mal lavé, me regarde de haut en bas avant de ronchonner :
- Silver, ma belle, tes insomnies de plus en plus matinales commencent à me taper sur les nerfs.
- Comme si t'étais en train de dormir. Ouvre moi, crétin, il fait froid dehors et une nouvelle porte ça coûte cher.
- Pff... C'est bien parce que c'est toi...
Quelques minutes plus tard, je suis assise au comptoir du bar propre et désert et je fixe le verre de bière que mon ami me sert. Lui me regarde et demande :
- Tu veux pas quelque chose de plus fort qu'une bière ?
- Ça ira. Je venais juste pour les clopes, à la base.
- Tu ne devrais pas en fumer.
- Tu ne devrais pas m'en vendre.
- T'as raison. Tu es mineure. Donc techniquement, c'est illégal de ma part. Mais ça fait cinq ans que tu squattes mon bar une nuit sur deux, alors à force... De toute façon, si je ne t'en vendais pas, tu irais voir ailleurs, pas vrai ? Donc je préfère encore t'en vendre et pouvoir réguler un minimum ta consommation plutôt que te laisser te défoncer complétement.
- ... Sympa de ta part, Jun. Tu veux bien me filer cinq paquets ?
- ... Deux.
- Quatre.
- Trois et c'est ma dernière offre.
- Ça marche.
- Je te préviens, avec trois paquets, tu fais deux semaines. Je t'en revendrais pas avant ça.
Je hausse les épaules. Moi au moins, je ne fume que des cigarettes. Je fourre les paquets dans ma poche et cherche mon portefeuille d'une main.
- Je te dois combien ?
- ... T'as pas ton portefeuille, pas vrai ?
- Je l'ai pas.
- T'es désespérante. Prend tes clopes et vas te recoucher. Tu peux pas passer la nuit ici, tu vas finir par te faire pincer. Et moi, je tiens pas à aller en prison pour avoir vendu de l'alcool et du tabac à une gamine de 16 ans.
- Je te revaudrai ça.
- Pas la peine. Ou plutôt si, fais quelque chose pour ma conscience : rentre chez toi sans passer par la case bastons.
Je le fixe un instant, sceptique, avant de tourner les talons.
- Je te promets rien.
De toute évidence, il sait que je n'ai pas l'intention de rentrer chez moi maintenant, donc pas la peine de mentir. Aussitôt sortie, j'ouvre un paquet et en tire un long bâtonnet blanc parfaitement roulé. Je le porte à ma bouche et j'allume mon briquet. Mais au moment où la flamme atteint ma cigarette, je m'arrête.
- Qu'est ce que vous voulez, vous ?
- C'est dangereux de se promener seule la nuit, tu sais ? On va te raccompagner.
L'odeur du tabac brûlé commence à envahir l'atmosphère. Je tourne la tête d'un air fatigué et je me passe la main dans les cheveux en soupirant.
- Sérieusement, chaque fois que je sors sans ma veste, c'est pareil...
Je m'avance vers les deux gars qui m'ont suivie et, brusquement, j'envoie mon poing dans la figure du premier. Projeté en arrière, il atterrit dans une flaque d'eau. Le deuxième tente de me frapper la nuque. J'arrête son bras d'une main et l'envoie valser à son tour. Je continue mon chemin en déclarant :
- Pathétique.
Alors que je m'éloigne, l'un des deux idiots me lance :
- C'est plutôt toi qui est pathétique, à frapper puis partir comme une lâche !
- Justement.
Je retire ma cigarette de ma bouche et, alors qu'un nuage blanchâtre m'enveloppe, je continue sans me retourner :
- Je parlais de moi.
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Silver Heart (Chifuyu x oc)
FanfictionTrahie par son meilleur ami et abandonnée par ses proches, Silver mène son gang dans les rues de Tokyo, noyant son amertume dans les clopes et les bastons. Indifférente au malheur des autres et fatiguée du sien, elle délaisse le lycée pour s'enferme...