Les enfants déchus : la fin d'une civilisation

Chapitre 5

*pdv Perceval*

Il suivit des yeux Damnésa puis Cast qui sortaient avec envie. Lui aussi aurait bien aimé fuir comme le frère et la sœur, mais malheureusement il était coincé entre les remarques inutiles de sa mère qui cherchait vainement à calmer Nico et l'impuissance qui clouait sur place sa sœur ainée. Ses pieds le démangeaient mais le reste de son corps refusait de bouger comme encré sur le parquet de la principia à regarder une nouvelle dispute père-fille se déclencher. Nico et Bianca étaient pourtant si complices d'habitude. Aujourd'hui toute cette complicité semblait avoir disparue voire n'avoir jamais existé. Les regards étaient haineux, les cris puissants et les corps remplis de fatigue muée en colère. Tout le monde était-il autant à bout de nerf pour que la moindre discussion tourne au vinaigre ? Qu'est-ce qu'il arrivait à sa famille ? Pourquoi était-elle en train de se déchirer elle-même là où le retour des disparus aurait dû recoller les morceaux ?

Toutes ces questions trottaient dans la tête de Perceval depuis quelques jours déjà et il n'avait toujours pas trouvé de réponse à aucune d'entre elles. Pourtant ces yeux voyaient bien les murs s'effondrer autour de lui. Silena n'aura plus jamais le même regard. Samuel semblait revivre de plein fouet le deuil de sa sœur pareil pour Calypso et Léo. Bianca avait perdu toute trace d'innocence en comprenant que la fin du monde était proche. Charles perdait de plus en plus le contrôle de ses émotions et de sa force comme sa mère. Ethan s'était refugié derrière un masque d'indifférence et antipathie permanant. Cast s'écartelait entre ses parents et son frère et sa sœur. Damnésa avait complétement perdu le contrôle. Et puis il y a tous ceux qui n'était plus là. Le visage pâle et sans vie de Connor lui revient avec la force d'un fouet abattu dans le dos avant de se métamorphoser en celui de Rachel. Une pierre tomba dans sa poitrine aux multiples souvenirs partagés avec Clara quand tout aller bien. Avant que cette dernière ne parte, qu'elle l'abandonne. Il dû inspirer profondément pour empêcher les larmes de monter.

- « J'AI DIT NON BIANCA ! » hurla Nico encore une fois « POINT ! »

Son visage luttait de plus en plus pour garder les larmes enfouies en lui. Il ne voulait pas que sa famille parte en morceau, pas comme ça. Pourquoi ? Pourquoi cette haine ? Pourquoi ces cris ? Il voulait que cela s'arrête. Les voix résonnaient en triple dans sa tête prisonnière de son propre mal être. Qu'ils se taisent !

- « C'EST MON CHOIX ! TU NE PEUX PAS M'EMPECHER DE FAIRE ÇA ! »

- « BIEN SUR QUE JE PEUX, JE SUIS TON PERE ! »

Une larme lui échappa, puis deux avant qu'il ne s'écroule. Le silence se fit brusquement autour de lui. Son cerveau avait surement fini par couper le son. Il sentait les larmes mouiller ses genoux aussi fort qu'il percevait les battements de son cœur affolé mais aussi soulagé. L'unique voix qui criait encore été surement celle de sa sœur mais il n'était plus sûr de rien. Par contre, il sentit des bras fermes le tirer en dehors de la pièce avec une force vertigineuse. Il aurait voulu s'abandonner dans ces mains amies tendues mais très vite leur contact rassurant disparu, le laissant affalé contre un mur surement sur la terrasse de la principia. Des frissons parcouraient tous ses muscles. Il était frigorifié.

Ce n'est que plusieurs minutes plus tard qu'il parvient enfin à relever les yeux pour croiser ceux océaniques de Damnésa. C'était elle qui l'avait sorti de là, de cet enfer. Encore une fois. Ces yeux magnifiques l'observaient avec inquiétude et une partie de sa lèvre extérieure était repliée à l'intérieur de sa bouche.

- « Merci ! »

C'est le seul mot qu'il parvient à murmurer d'une voix encore éraillée par les crises de larme. L'adolescente passa une main nerveuse dans ses cheveux avant de planter des yeux mitrailleurs sur la porte du bâtiment. Le regard doux qu'il avait vu quelques secondes plutôt semblait n'avoir jamais existé. La porte claqua une deuxième fois sur Hannah.