Prologue

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ESTHER

19:45

— Et juste ici, c'est la salle de bains !

Je zoome légèrement sur quelques recoins stratégiques, dont l'immense baignoire à pieds – mon coup de cœur – ainsi que les grands rangements qui remplissent le mur du fond.

— Voilà pour ce room tour, j'espère que ça vous a plu, reprends-je, cette fois face à la caméra. Je vous ferais sûrement une vidéo YouTube cette semaine pour vous en montrer plus mais en attendant, n'hésitez pas à répondre à cette story pour me dire ce que vous pensez de mon nouveau chez-moi.

Je marque une légère pause, le sourire aux lèvres.

— Je sens que je vais être heureuse, ici.

Sur ce, je coupe la vidéo et glisse mon portable dans ma poche, satisfaite.

— C'est bon, on va pouvoir ramener tes affaires maintenant ? demande une voix lasse derrière moi.

Je fais volte-face, tombant nez-à-nez avec Miranda. Celle-ci est accoudée au chambranle de la porte, les bras croisés sur sa poitrine par-dessus son minuscule débardeur blanc. Le crayon noir qu'elle a appliqué sous ses yeux a légèrement coulé avec la pluie et quelques mèches de ses cheveux – celles teintes en rose en particulier – ressortent encore plus que d'habitude.

— Il pleut, flemme, rétorqué-je.

Miranda arque un sourcil.

— Et donc ? Tu as déjà payé le camion, je te rappelle.

J'hausse les épaules et la dépasse pour rejoindre le salon avant de lui répondre :

— On n'est pas obligées de l'utiliser.

Je l'entends soupirer dans mon dos avant qu'elle ne rétorque :

— Bordel, c'est beau d'être riche.

Je lève les yeux au ciel en pinçant les lèvres, m'abstenant de tout commentaire. S'il y a bien une seule personne sur Terre que j'autorise à parler de mon compte en banque, c'est Miranda ; cependant, ça ne veut pas dire que j'apprécie qu'elle le fasse.

— On mange ? proposé-je pour changer de sujet.

Ma meilleure amie acquiesce avant de venir m'aider à sortir nos provisions.

Nous sommes passées chez Monoprix sur le chemin et avons acheté toute la nourriture nécessaire à deux femmes de vingt-deux ans lors d'un pseudo emménagement : deux baguettes tradition, du fromage, une bouteille de vin blanc et un cheesecake au coulis de cerise. Oh, et des clopes aussi.

(Que des choses nécessaires, je vous l'ai dit.)

Nous nous installons autour de la table et mangeons devant un épisode de How I Met Your Mother. Tout est comme d'habitude : Miranda ne rit à aucune blague, je ris à toutes, je l'engueule parce qu'elle ne rit pas et elle me rétorque de la fermer. Je veux dire, nous avons déjà fait ça des milliers de fois... Et pourtant, il y a tout de même quelque chose de différent.

Cela faisait près de six mois que je cherchais un appartement dans la capitale, et plus d'un an que je voulais partir de chez mes parents. Créer du contenu digital dans un village des Vosges, coincé entre deux cols de montagne, un supermarché discount et une station de ski à l'arrêt les trois quarts de l'année, ce n'est pas ce qu'il y a de plus facile. Et puis, je passais le plus clair de mon temps dans le train, à faire des allers-retours jusqu'à Paris.

Naïvement, je pensais que trouver un appartement ne serait pas si compliqué que ça... Mais si j'ai bien appris une chose au cours des derniers mois, c'est que l'enfer est une douce punition comparé aux recherches immobilières en région parisienne.

OVEREXPOSEDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant