32 | overfoolish

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ESTHER

01:21

Je sursaute en voyant que le son de mon portable est activé et jette un œil à ma gauche. Heureusement, Cléo dort toujours à poings fermés.

Je ne regrette pas du tout ce qu'il s'est passé, au contraire. Dormir en tout bien tout honneur avec lui était déjà agréable mais ça, c'est un niveau au-dessus. Je l'assume.

Depuis hier, j'ai l'impression que ma vie toute entière était en train de s'écrouler. L'impression d'avoir aimé une illusion et d'avoir inconsciemment cautionné les actes de Maël m'a poussée à un dégoût de moi-même tellement extrême que je n'arrivais tout simplement plus à faire face. Sans Miranda pour éponger mes crises de larmes tout au long de la journée, je ne sais pas où je serais en ce moment.

Ça fait peut-être drama queen, mais le fait est qu'en la laissant partir aujourd'hui j'ai eu l'impression d'être abandonnée. Elle se sentait affreusement mal de me laisser à Paris mais elle a des examens pour valider ses partiels de médecine cette semaine et elle devait à tout prix rentrer pour réviser.

Heureusement, Cléo était là. Je crois que chacun des mots qu'il a dit, chacun des gestes qu'il a effectué et chacun des regards qu'il m'a lancé depuis que nous nous sommes retrouvés sont désormais gravés en moi.

Ma vie est sans dessus-dessous, ma tête aussi et je ne parle même pas de mon cœur, mais Cléo est mon roc. J'ai envie de me rappeler pour toujours de cette nuit. De ses doigts le long de ma mâchoire, de ses baisers dans mon cou, de ses papouilles dans mon dos et de ses jambes emmêlées aux miennes. Tout.

En silence, j'attrape alors mon portable, laissé sur la table de chevet. Avant de jeter un œil à mes notifications, je vérifie que Cléo dort toujours. Mission accomplie : il n'a pas bougé d'un pouce.

Lou : Je pense qu'on devrait expliquer la situation en vidéo et la poster sur nos réseaux. Parce que s'il fait du mal à une autre fille, je ne me le pardonnerais pas...

Lou : ... Et je pense aussi qu'on devrait contacter une avocate pour nous protéger et être sûres que ça ne nous retombe pas dessus.

Ma gorge se serre et automatiquement, les larmes me montent aux yeux. C'est un mélange d'un peu tout : colère, dégoût, peine, haine. J'en veux à Maël d'être un prédateur et je m'en veux encore plus de ne pas l'avoir décelé avant.

À cause de lui, je crois que je me détesterais toujours un peu maintenant.

Je fixe les messages de Lou, les doigts suspendus au-dessus du clavier. J'ai peur. J'ai peur que tout le monde nous déteste, que personne ne nous croie, que ça détruise nos vies et nos carrières. Mais par-dessus tout, j'ai peur de ne pas avoir le courage de faire ce qu'il faut et de mourir de culpabilité de ne pas avoir agi quand je le pouvais.

Alors, parce que je sais au plus profond de moi que c'est ce que je dois faire, je tape ma réponse :

Moi : Je suis d'accord sur tout. On en parle lundi.

Le temps que j'appuie sur « envoyer », je sens le lit s'affaisser à côté de moi. Aussitôt, je pose mon portable sur la table de nuit et me rallonge normalement, le sang battant à mes tempes.

— Tu faisais quoi ? marmonne Cléo dans mon oreille d'une voix semi-endormie.

Il s'est collé à mon dos et embrasse mon épaule nue, ses doigts caressant ma nuque. Il est doux, comme d'habitude. Il est parfait.

— Je... C'est compliqué, murmuré-je, les dents serrées.

Le brun semble sentir que quelque ne chose ne va pas et me presse gentiment le cou pour me faire tourner vers lui. Nos nez se frôlent et il embrasse ma pommette tandis que je passe une main dans ses cheveux en bataille. Même s'il vient de se réveiller, il a les yeux plutôt alertes à cause de l'inquiétude.

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