OVEREXPOSED

1 | overanxious

ESTHER

20:38

Dire au revoir à Miranda s'est avéré plus difficile que prévu.

Tellement difficile, en fait, que j'ai pleuré pendant tout le trajet du retour en métro, ainsi que dans la cage d'escaliers de l'immeuble – et bien sûr, une fois dans mon nouveau chez-moi, sur le canapé. Je crois que celui-ci a déjà pris l'odeur de mes larmes.

C'est officiel : je peux ajouter un nouvel endroit sur la liste des endroits dans lesquels j'ai déjà pleuré. Je compte caler mon nouvel appartement entre les toilettes du KFC, la Tour Eiffel – j'étais émue par la vue, OK ? – et le cabinet de mon esthéticienne.

D'ailleurs, il y a autre chose qui est aussi officiel : je suis désormais seule dans une ville que je connais à peine.

Enfin, seule, pas tout à fait – en réalité, je sors déjà ce soir. En apprenant que j'allais déménager à Paris, j'ai reçu un message de Lou, une créatrice de contenus rencontrée l'été précédent lors d'un évènement pour une marque de beauté. Elle m'a aussitôt proposé de me joindre à elle pour aller boire un verre dans un bar tout près de chez-moi, ce que je me suis empressée d'accepter.

Au moins, ça m'a forcée à sécher mes larmes, pensé-je en traversant la rue.

C'est bête mais pour l'occasion, je me suis sentie obligée d'enfiler une jolie robe et de me maquiller légèrement. Lou est tout simplement époustouflante, et je ne me voyais pas arriver au bar avec les yeux bouffis, mon jogging ridicule et mon parfum senteur dépression.

Tandis que j'approche du lieu de rendez-vous, mon cœur accélère dans ma poitrine. Je retire mes écouteurs et les glisse dans la poche de ma veste, les mains moites.

Pourquoi suis-je aussi stressée, d'abord ? J'ai déjà rencontré Lou et elle a été adorable avec moi. Il n'y a aucune raison de stresser, c'est juste un petit verre entre filles : il faut simplement que je reste moi-m...

— Hé, Esther ! Salut ! m'interpelle soudain une voix.

Je scanne la terrasse des yeux avant de remarquer que l'éclat de voix provient d'une grande table placée sous une toile rouge, tout près d'un chauffage extérieur. J'aperçois très vite Lou, inratable avec son visage parfait maquillé d'un rouge à lèvres rouge pétant et les seins remontés dans un corset noir.

Le seul souci, c'est qu'elle n'est pas seule.

Plusieurs de ses amis l'entourent. Je les connais tous de vue mais pas personnellement, sauf l'un d'eux, Lucas, que j'ai déjà croisé plusieurs fois lors d'évènements professionnels. Ils sont tous habillés avec style, osant les pièces originales et les couleurs qui se remarquent. Plus je m'approche de leur table, plus je sens ma gorge se serrer à l'idée que je fais clairement tâche dans le décor malgré ma petite robe noire.

— Tu as trouvé facilement, c'est cool, commente Lou en me voyant arriver. Désolée, on a déjà commandé ; on mourrait de soif, ajoute-t-elle en me faisant une petite place à sa gauche sur la banquette.

— Pas de souci.

Je m'installe, m'efforçant de sourire poliment aux gens qui m'entourent. Certains m'ignorent carrément, d'autres me scannent de haut en bas et seul l'un d'eux, le garçon à ma droite, prend les devants pour engager une discussion.

— Maël, enchanté, me dit-il avec un sourire.

— Esther.

Nous échangeons un sourire poli. Premier bon point, il ne mentionne même pas mon pseudo.