Chapitre 19

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En arrivant au lycée, Xie Lian avait le cœur léger, se remémorant encore la visite de San Lang. Les deux amis se retrouvèrent et allèrent ensemble au premier cours. Mais l'insouciance de la veille fut rapidement chassée. Quand ils entrèrent dans la classe, toutes les conversations s'arrêtèrent brusquement et des yeux farouches se tournèrent vers Xie Lian. Des murmures s'élevaient çà et là. Le délégué discutait dans un coin de la salle et quand il vit Xie Lian entrer, il perdit lui aussi son enthousiasme. Mais, contrairement aux autres élèves qui ne révélaient qu'aversion, son visage semblait plutôt inquiet. Il semblait être en pleine hésitation, se demandant s'il devait ou non le rejoindre. Avant qu'il put se décider, le professeur entra dans la salle et les élèves regagnèrent leur place.

Difficile pour Xie Lian de se concentrer quand il sentait tous les regards tournés vers lui. Il ne comprenait pas pourquoi sa vue les mettait dans un pareil état. San Lang remarquait le comportement de son ami changer et, tandis que le professeur questionnait un autre élève, il lui chuchota :

— Quelque chose ne va pas, Gege ?

— Tu ne trouves pas le comportement de tout le monde assez étrange, ce matin ? J'ai l'impression qu'ils vont me jeter des pierres.

— Tu n'as rien à craindre, je ne laisserai jamais une telle chose arriver. Ne fais pas attention à eux, ils doivent seulement être déçus que les vacances soient terminées.

— Oui, peut-être...

— De quoi pouvez-vous bien parler qui soit plus intéressant que le cours ?

Le professeur était désormais en face des deux adolescents. San Lang leva à peine les yeux, et Xie Lian se perdit en excuses. Il eut l'impression que les regards noirs autour de lui s'intensifiaient, ce qui le mit davantage mal à l'aise.

Le cours se poursuivit sans encombre, même si Xie Lian peinait à se concentrer. À mesure que la journée s'écoulait, le comportement des autres à son égard ne changeait pas. Même Shi Qingxuan ne lui avait pas adressé la parole de la journée, alors qu'il aurait été le premier à lui demander comment ses vacances s'étaient passées. Xie Lian n'en avait que plus d'interrogations.

Le lendemain, personne ne lui adressa la parole non plus — à l'exception de San Lang. Il n'avait jamais été très proche de ses camarades de classe, mais cela ne justifiait pas, selon lui, un tel comportement. Il était tenté de poser la question, mais il avait peur d'entendre la réponse ; alors il ne demanda rien. Malgré les conseils de San Lang de ne pas prêter une trop grande attention à ce phénomène, Xie Lian ne pouvait être autrement qu'inquiet. Avait-il fait quelque chose de mal ? La semaine précédant les vacances fut tout à fait normale. Peut-être avaient-ils appris, par quelque moyen, ce qu'il s'était passé l'autre jour dans le parc ? Et s'il y avait des connaissances de ces garçons dans son nouveau lycée ou pire, dans sa classe ? Les rumeurs se répandent vite.

Il en venait à élaborer toutes sortes d'hypothèses, lorsque Shi Qingxuan vint enfin le voir. C'était le troisième jour suivant la rentrée, juste avant la pause déjeuner. Les élèves rangeaient leurs affaires mais Xie Lian et San Lang avaient déjà quitté la salle. Le délégué courut à leur suite, interpellant Xie Lian et demandant à lui parler en privé quelques minutes. San Lang s'apprêtait à partir quand Xie Lian s'exclama :

— C'est inutile, il peut rester. Il n'y a rien à cacher, San Lang peut être mis au courant.

— Très bien, comme tu voudras, répondit Shi Qingxuan. Je voulais simplement t'expliquer la situation.

Il avait pris un air sérieux, comme il en prenait rarement ; cela ne présageait rien de bon. Mais il donnait l'impression d'être plus inquiet encore que Xie Lian. Il chercha ses mots, avant de poursuivre.

— Je suis désolé, j'aurais dû t'en parler avant, mais je ne savais pas comment aborder le sujet. Je me rends compte que j'ai fait une erreur, tu as dû t'inquiéter par ma faute et... Alors voilà, je vais te le dire, parce que tu as le droit de savoir. Tu as dû remarquer que les autres t'évitaient un peu depuis deux jours. C'est parce que... Parce qu'ils savent. Ils savent maintenant que... tu as été exclu de ton lycée après avoir envoyé un gars à l'hôpital.

Il avait dit ces derniers mots avec précaution, comme s'il craignait de heurter la sensibilité de Xie Lian. Il guettait la réaction de son interlocuteur dans une attente presque insoutenable. Xie Lian, quant à lui, encaissait l'information. Simplement. Il se doutait que la vérité finirait par éclater.

— Bien sûr, je les comprends, dit-il après un moment.

— Je suis désolé Xie Lian... Mais je vais essayer de leur parler, pour qu'ils se montrent moins désagréables envers toi tout de même. Je n'ai pas envie que l'ambiance de classe soit brisée. Je vais faire tout mon possible, je te le promets !

— Merci Shi Qingxuan, c'est très gentil de ta part.

Et le délégué partit, avec cette nouvelle mission à sa charge.

San Lang était resté étrangement silencieux. Il brisa le silence, et Xie Lian comprit que c'était de la colère qu'il contenait pendant tout ce temps.

— Ils n'ont rien compris, ces idiots.

— C'est inutile de s'énerver.

— Je suis sûr qu'aucun d'entre eux ne serait capable d'un acte de bravoure comme le tien.

— Ne t'en fais pas, Shi Qingxuan va rapidement régler le problème.

— Je peux le régler vite fait, le problème.

— San Lang, s'il te plaît, ne fait rien de risqué. C'est vraiment gentil de vouloir m'aider, mais je ne souhaite pas que tu t'attires des ennuis.

— Ne t'inquiète pas pour ça, Gege. Tes ennuis sont les miens, et je ne veux plus te voir te battre seul. Je ne veux pas que tu t'inquiètes pour ces gens, parce qu'ils sont indignes de ton attention. Mais si tu veux parler à quelqu'un et si c'est important pour toi, rappelle-toi que je suis là. Je serai toujours de ton côté.

Xie Lian ne savait que répondre à cela, et ne put que lâcher un simple "Merci" avec un sourire. Au fond de lui, un poids venait de s'enlever.

"Tout ceci n'est qu'éphémère. Tout finira par s'écrouler un jour, et tu te retrouveras seul. Il n'y a que moi qui puisses te comprendre..."

Cette voix. San Lang ne semblait pas l'entendre car il ne fit aucune remarque. Xie Lian dut se faire violence pour ne pas se cacher les oreilles ou répondre à haute voix. Il fit de son mieux pour ignorer le spectre qui le hantait. Car oui, il ne le lâchait pas d'une semelle, multipliant les apparitions tant dans ses cauchemars qu'à l'improviste au cours de la journée.

La distance entre la réalité et l'hallucination était fine. Quand Xie Lian apercevait le masque mi-pleurant mi-souriant dans le miroir, quand une voix résonnait dans sa tête, une voix que seul lui semblait entendre ; était-ce une menace réelle ou le fruit de ses peurs ? Dans le premier cas, pourquoi cette créature s'obstinait-elle contre lui ? Dans le second, cela signifiait qu'il tendait progressivement vers la folie. Dans tous les cas, il craignait d'en perdre la raison. Il appréhendait de tourner le regard, de peur de l'apercevoir au coin d'une rue, dans la salle de classe. Il appréhendait le sommeil, le moment où il était le plus vulnérable. Il était constamment sur le qui-vive.

Les seuls moments de relative paix étaient en compagnie de San Lang. À ses côtés, ses angoisses se dissipaient. À ses côtés, il s'efforçait de chasser les idées noires qui le rongeaient et il se surprenait de nouveau à sourire. Il avait l'impression qu'il était en sécurité et même si ce n'était qu'illusoire, cela lui faisait le plus grand bien. Un jour, il s'était demandé s'il ferait mieux de lui parler de ce qui l'angoissait mais il s'était ravisé. Malgré ce que San Lang lui avait dit, il ne voulait pas l'ennuyer avec ses histoires. Mais surtout, si cette menace n'était pas fondée, il le prendrait pour un fou — et cela, il ne le supporterait pas. Il garda le silence à ce sujet, pensant que la situation s'améliorerait. Cependant, ce n'était pas si simple...

Heavenly High School {TGCF AU Fanfiction}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant