Vivre son Printemps [Romance - amour interdit]

Briser la glace

Ce samedi matin, Yumi est surprise de constater que ses parents ne sont pas là. La domestique lui explique qu'ils sont en voyage d'affaires et vont rencontrer un ministre français pour l'ouverture d'une de leurs entreprises à Paris. La jeune femme n'écoute que d'une oreille. Tout ce qu'elle veut, c'est qu'ils soient là. Elle prit le téléphone et en profite pour appeler son grand-père maternel. Ce dernier est malade, âgé de 92 ans il s'estime heureux d'avoir eu une belle vie. Il adore sa petite fille et c'est lui l'a poussé à faire du dessin. C'est un vieil homme énergique, toujours disponible pour faire une activité quelconque et rencontrer des gens. Mais à l'autre bout du fil c'est une voix fatiguée qui parle à Yumi. Ils échangent quelques banalités pendant de longues minutes.

- Tu as dit à ta mère que tu voulais faire une école d'art pour devenir illustratrice ?

- Oui, et ça ne s'est pas très bien passé...

- Ah je vois, elle veut que tu fasses une grande université avec études de commerce j'imagine. Le grand-père est désolé de ne pas avoir de solution. Et sinon, dis-moi, tu as un petit copain ? Ce Sato, me semble être un bon garçon non ?

- Grand-père, je vois Sato comme mon frère, avec toi c'est ma seule famille.

-Très bien, je vois, dommage. Et tu aimes quelqu'un en ce moment?  

Les secondes qui suivent cette question trahissent la jeune femme.

-Je ne sais pas...

- Ah quelqu'un te plaît mais tu ne sais pas encore si c'est juste une attirance ou de l'amour, encore moins si c'est réciproque.

- Oui... mais ce n'est pas possible de toute façon.

Yumi rougit derrière le combiné du téléphone.

- Oh ? Mais pourquoi donc ? Pas du même milieu ?

- Si ce n'était que ça papy... Elle soupire.

- Tu ne veux vraiment pas en parler ma puce ? Très bien.

Avec sa voix souriante, il change de sujet pour lui parler de la campagne où il a pris sa retraite. Les paysages calmes, verdoyants, les animaux sauvages, loin du tumulte de la capitale et du business. Puis, il est temps de mettre fin à la conversation. Yumi monte dans sa chambre pour se préparer à sortir : Sato a un match important aujourd'hui.

Il est tard quand le groupe de professeurs sort de la réunion de bilan. Marc râle, en bon français, que faire ce genre de réunion un samedi est un crime selons-lui. Mais Mr Kiritani lui fait remarquer qu'il est compliqué de réunir tout le monde en semaine, même le soir à cause des activités des clubs. En réponse Marc embarque une bonne partie de ses collègues dans un izakaya du quartier. Après des heures de discussion, de chiffres et de débat, peu d'entre eux ont su dire non à une bonne bière. Marc tire par le bras son nouveau collègue pour être sûr qu'il ne s'enfuit pas.

Après un après-midi de préparation, Sato entame son quart de finale sous une pluie d'encouragements. Il est populaire dans le club et parmi les filles. Yumi dans les gradins le soutient comme elle peut, et fait démonstration d'une certaine capacité à porter la voix très loin. Sato se sent enflammé et mène son adversaire par le bout du nez. Les échanges sont intenses, rapides. Le match va durer une bonne demi-heure avant la victoire du jeune homme. Puis il en gagne un autre jusqu'à se qualifier en demi-finale. Pour fêter ça Sato, Yumi et quelques membres du club accompagnés de leurs amis, décident de sortir en ville.

L'izakaya choisi par Marc est chaleureux, situé dans un quartier animé, il accueille le groupe de professeurs à bras ouverts. Une très longue table est aménagée pour eux en fond de salle. Marc tire le manteau et la veste de Kiritani : il veut le mettre à l'aise le plus possible. De tous ses collègues, Marc le trouve le plus intéressant, surement parce qu'il est le seul à ne pas avoir encore étalé sa vie devant un français avide de contacts et histoires humaines. Mr Kiritani est le seul à demander une bière sans alcool. Au moment de trinquer dans la bonne humeur, et de boire cul sec, il réalise qu'on lui a servi une bière classique. Sa tête se met à tourner violemment. Marc le remarque, et lui demande si ça va.