Chapitre 20 - C'est bien cela je suffoque

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Il y a des jours où sans raison, une alarme clignote dans ma tête pour me mettre en garde. Des jours comme aujourd'hui où je ne l'ai pas écouté. Des jours qui font que le ciel me tombe sur la tête et où je pensais mes peurs enfouies au fond de moi, sans aucune possibilité de ressurgir, ce jour-là c'est aujourd'hui. Je ne décroche pas un mot dans la voiture. Le retour se fait sous silence, cet homme n'était pas prévu au dîner et pourtant il était bien présent, nous devions rencontrer deux hommes, il y en avait trois et le troisième n'était pas là par hasard j'en suis certaine.

Kadden n'a pas ouvert la bouche de tout le repas, ni même de la route de retour, Brooks passe ses nerfs sur l'écran tactile de son téléphone et Gage essaye tant bien que mal de détendre l'atmosphère. J'ai fait capoter la réunion, ils n'ont pas obtenu le contrat car j'ai préféré quitter la table à la seconde même où je l'avais rejointe, prétextant une maladie soudaine ainsi que des vertiges. Je n'ai pas eu à beaucoup feindre, mon teint est pale, je n'ai plus aucune force, totalement ravagé par les souvenirs et par mes pensées obscures.

La voiture s'immobilise dans le silence pesant de l'habitacle. Je remarque alors que je me trouve chez moi, je ne prononce pas un mot et me contente de sortir mon sac sur l'épaule. J'ai à peine posé un pas au sol que je me sens pleinement déséquilibrée, me rattrapant à la portière pour rester debout. Je marche tel un zombie jusqu'à mon hall, puis j'appuie automatiquement sur les touches de l'ascenseur. Je n'ai même pas pris la peine de regarder mon courrier, je n'en ai ni la force, ni l'envie.

Je pousse la porte de mon appartement et me laisse tomber comme une masse sur mon canapé. Je ne suis pas installée que quelqu'un toque à la porte, j'ouvre sans même regarder de qui il s'agit, Brooks évidemment. Je croise ses yeux où se mêlent colère et inquiétude. Je baisse mon propre regard. Les larmes dévalent sur mes joues quand je sens mon ventre émettre une embarder. Sans plus de réflexion je me précipite aux toilettes où je me déleste de la nourriture que j'ai pu avaler depuis hier. Une main se pose sur mon dos et forme des rotations.

- Vas-tu me dire ce qui se passe, l'inquiétude perce dans la voix de Brooks, d'habitude calme.

- Non, je prends une inspiration et me redresse, je ne veux pas.

- Je t'ai donné la chance de travailler à mes côtés, de faire ce que tu aimes et tu refuses de me dire la raison de ton état.

- Oui.

Il soupire, Brooks ne soupire jamais réellement, ou du moins pas avec cette intonation dans la voix. Il se relève et la chaleur de son corps disparaît pour ne laisser que le froid glacial de mes pensées. Je tire la chasse et me relève péniblement puis je passe dans la salle de bain. Je m'avance dans la cuisine où il est accoudé au plan de travail. Je fais le tour de la pièce sans pour autant trouver la présence des autres garçons, à coup sûr ils sont rentrés à la D.B Corps pour réparer mes conneries.

Je sens un liquide couler le long de ma joue, ce n'est qu'en l'essuyant que je remarque que des larmes nimbent à nouveau mes yeux. Brooks le remarque à son tour car il me tend la boîte de mouchoirs, il n'a jamais été si distant avec moi, son attitude me blesse encore plus que tout. Je tente de m'approcher mes stops mes pas en voyant le regard qu'il pose sur moi. Je ferme les yeux pour ne plus le voir, mais au contraire il me hante bien plus fort, bien plus atrocement. J'ai l'impression que des centaines d'aiguilles sont en train de me piquer la peau, que l'on essaye de m'arracher le cœur, que je n'arrive plus à respirer, c'est bien cela je suffoque.

- Sawyer, respire correctement bordel, il laisse enfin la colère nimber sa voix.

- Je ne peux pas, j'y arrive pas, je panique pleinement sans arriver à m'arrêter.

Plus forte que mes démons - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant