Solitaire (BxB) Terminée

Chapitre 7

ELIOT

Je suis là face à Hugo, je le sens troublé par notre nouvelle proximité, quant à moi, je n'ai jamais cessé de l'être depuis la première fois où je l'ai vu.

Nous sommes assis face à face devant un petit-déjeuner préparé par lui-même avec soin.

Il ne se rend sûrement pas compte, mais je n'ai pas cessé de sourire depuis que je suis installé près de lui.

Je réalise que c'est la toute première fois où je peux être moi-même avec un garçon, il n'émet aucun jugement ni sur ma couleur de cheveux, ni sur ma manière de me comporter, je suis seulement Eliot, et pour une fois, je ne me sens plus si différent.

Quant à Hugo, il ne le sait pas encore, mais ses pensées se bousculent dans ma tête, tantôt brouillonnes et tantôt limpide.

C'est délicat, d'être littéralement dans la tête d'une personne, c'est une sensation dont je me suis vite habitué, ce garçon respire la bienveillance pour toutes les personnes qui l'entoure, sauf pour lui malheureusement, il a une estime de lui qui me peine énormément, toujours dans le doute, toujours dans le regret de ne pas faire assez.

Ce sont principalement des bribes de pensées qui me viennent de lui, un ensemble de couleurs et de mots, chaque couleur représentant un sentiment.

_ Est-ce que ça va Hugo ?

Il arrête de manger et me regarde tristement.

_ Je fais encore des cauchemars, mes nuits sont quelque peu agitées, et je ne dors pas très bien, mais physiquement ça va beaucoup mieux, merci.

_ Je comprends. Lui dis-je d'un air compatissant.
Tu sais, je pense que tu arriveras bien mieux à avancer, si tu vidais tout ce que tu as sur le cœur.

_ Je n'ai pas envie d'embêter ma mère avec ça ou qui que ce soit d'autres.
De toute façon, je n'ai personne d'autre.

_ Maintenant tu m'as moi. Je lui lance, comme un cri du cœur.

Hugo ne répond pas, ces mots que je viens de prononcer l'ont chamboulé.
Il triture une de ses tartines le visage baissé, muré dans un silence, il se repasse ma phrase en boucle dans la tête.
Je la vois teintée de rose puis teintée de violet, elle finit par s'assombrir pour disparaître ne laissant qu'un triste vide, pour lui, je vais l'abandonner bien assez tôt, comme toujours à la fin, il ne restera que sa mère et lui.

_ À partir de maintenant, je vais venir t'embêter tous les jours, tu ne te débarrasseras pas de moi si facilement.

Il me sourit tristement.
Nous finissons le petit-déjeuner, puis nous allons nous installer sur son lit.

J'ai envie de discuter avec Hugo, d'en savoir un peu plus sur lui, sans avoir à envahir ses pensées.
Je n'ai pas mis énormément de temps à apprivoiser ce don, je me suis rendu compte que si je ne laisse pas entrer ses pensées elles ne viennent pas à moi d'elle-même, sauf en cas de forte émission, négative comme positive.

J'essaye de ne pas empiéter sur sa vie privée, de lui laisser quand même son jardin secret, mais c'est compliqué de résister à la tentation de ne pas tout apprendre de lui de cette manière.

Nous sommes assis l'un à côté de l'autre, c'est moi qui romps le silence.

_ Je voulais te demander quelque chose depuis hier.
Est-ce qu'on pourrait échanger nos numéros de téléphone portable ?
Ce n'est pas que je déteste nos conversations, s'envoyer des messages en utilisant des feuilles de papier à travers la fenêtre, c'est sympa, mais ce serait plus pratique, et je pense qu'on pourrait sauver quelques arbres si on utilisait quelque chose d'un peu plus commun. Je lui lance en souriant.