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Kany
19 heures 01

Je ne savais pas ce qui m'arrive pour que je fonde en larmes devant une femme inconnue mais ça me faisait du bien. Elle m'a prise dans ses bras et me console en me tapotant doucement le dos. Je suis à cran. Cette journée a été la plus épuisante depuis que je suis à bord.
D'abord Ouly et la gifle dont je n'ai pas pu me venger à cause de Demba et ensuite Hakil qui me crie dessus sans ménagement.

- Je . . . Je suis vraiment désolée madame, dis-je en reniflant bruyamment et en me dégageant de ses bras. Je n'aurai pas dû vous embêter comme ça.

Elle me sourit et m'offre un mouchoir qu'elle a sorti de son sac.

- Tu n'as aucun reproche à te faire ma chérie, répond-elle en arrangeant quelques mèches derrière mon oreille. Tu ne me déranges pas. Au contraire, il te fallait quelqu'un pour sortir ce que tu as sur le cœur.

Je hoche la tête, honteuse. Je n'ai pas l'habitude d'exprimer ma peine devant un inconnu. La femme se décale pour laisser passer une passagère et poursuit :

- Je vais te laisser mon numéro pour que tu puisses me contacter quand tu as fini ton service.

J'acquiesce et enregistre son numéro. Elle me souhaite une bonne fin de service et continue son chemin vers le navire. Je me rappelle que j'ai oublié de lui présenter le lieutenant puisqu'elle m'avait questionnée sur lui.
En parlant de Hakil, il était trop affairé à surveiller le chargement pour nous remarquer ou avoir le temps de papoter avec cette étrangère. Je ne sais pas comment le fils de cette dernière a fait pour être ami avec ce rabat-joie mais je le plains.

21 heures 04

Je n'arrive toujours pas à m'endormir après avoir pris un bon bain, fait mes prières et avalé comme dîner quelques croissants que j'ai acheté à Dakar.
Le mal de mer n'a pas eu le temps de se manifester car je me suis sustentée assise sur ma couchette et me suis allongée aussitôt après m'être brossé les dents. Je suis trop fatiguée pour aller au "carré".
La climatisation a été rétablie avant l'embarquement des passagers alors la chaleur n'était pas la cause de mon insomnie.

Dans ma couchette, je repense en boucle à la scène avec la second capitaine. Je cherchais sans relâche une solution pour me venger efficacement de Oulimata. C'est sans doute pour cette raison que je n'arrive pas à fermer l'œil. Je sais que je risque d'être très fatiguée si je ne dors pas avant mon quart de minuit à 04 heures mais il fallait que je mette la main sur quelque chose. Un stratagème qui me permettra enfin d'avoir ma place dans ce navire. Cette folle de Ouly mérite que je me venge d'elle sans ménagement. L'idée de ne pas lui rendre sa gifle m'indigne mais je n'ai pas le choix.

J'envoie un message à Demba pour voir s'il pouvait me donner la solution au plus vite. Il me répond qu'il doit se reposer pour commencer son quart de minuit à la machine et qu'il vaut mieux qu'on en reparle en dehors du navire, comme convenu. Je lui envoie un sticker qui faisait une moue de déception et décide d'appeler de nouveau papa.

- Ma chérie ! s'exclame-t'il quand il décroche. Je suis vraiment navré de ne pas avoir pu te rappeler en avance. Le travail était trop chargé dernièrement et il fallait que je m'active.

- Ce n'est rien baba, je comprends.

- Merci ma fille ! Alors, comment se passe ton stage à bord ? J'espère que tu fais des efforts !

Il avait un ton rieur. Cependant, je n'ai pas le cœur à la blague alors je reste silencieuse un moment. Il ne tarde pas à se rendre compte de mon petit mutisme.

- Est-ce que tout va bien ma fille ? s'inquiète papa. Tu te sens bien ?

- Tu sais papa . . .hésité-je, j'ai une question à te poser. Et j'aimerai que tu me répondes franchement.

Gaal gui (Le navire)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant