8 - Melinda

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« Une nouvelle maison. Une nouvelle adresse. Une nouvelle vie. L'horizon paraît moins bouché. Colombe sourit. Elle ne le sait pas, elle ne se doute de rien, mais elle savoure une de ses dernières nuits de sommeil. » Tatiana DE ROSNAY



       

- 8 -

Mardi 13 mai

10 h 53


Melinda


Le jour est levé et les rayons de soleil s'infiltrent à travers les rideaux de ma chambre. Je m'étire, les bras au-dessus de la tête et les yeux fixés au plafond, où un élégant plafonnier d'époque brille de toutes ses pampilles de cristal. Les fabuleux jeux de lumière et de prismes colorés m'émerveillent. J'imagine son visage, son sourire. Il est si charmant et il faut bien l'avouer : sexy en diable. Il a fait naître en moi des sensations que je n'avais jamais ressenties jusque-là, enfin du peu que je me souvienne. Il ne lui aura fallu que quelques millièmes de seconde pour susciter en moi une tentation si troublante que j'en rougis alors que je suis seule dans ma chambre. Il y a ce rêve récurrent où cet homme me console et me rassure, mais rien qui ne s'apparente à cette passion enivrante. Jamais je n'avais ressenti une telle attirance physique, elle en est presque vitale. À son contact, mon corps s'éveille. Je rêve de ses mains douces et délicates qui parcourent chaque centimètre carré de ma peau.

Qui est-il... ? Le reverrai-je... ?

Ce matin, après une bonne nuit de sommeil sans le moindre cauchemar, ce qui relève du miracle, je suis déterminée à atteindre mes objectifs et à poser mes valises à Seattle. Le salon nous aura occupées une grande partie de la journée, et Emma et moi avons déposé plusieurs candidatures. Une seule grande entreprise, dans le quartier d'affaires de Seattle, a suscité un intérêt particulier. La personne en charge des recrutements nous a présenté des postes susceptibles de nous intéresser, et, effectivement, j'ai postulé pour l'un d'eux.

Nous avons ensuite quitté le salon et sommes allées dîner dans un petit restaurant près de chez elle. Le cadre était chaleureux et les serveuses très sympathiques, tout le contraire des lieux que je côtoie d'habitude. Nous avons fait plus ample connaissance et, malgré son côté plutôt extraverti, Emma est une jeune femme très gentille, agréable, et dotée d'énormément d'humour. Elle ne mâche pas ses mots et elle m'amuse à chaque fois qu'elle se met à sautiller sur place. Elle apporte beaucoup de fraîcheur à mon univers rigoureux et austère. J'ai tenté de le lui dissimuler tant bien que mal toute la soirée. Puis nous sommes parties chacune de notre côté en nous promettant de nous appeler dès le lendemain.

Mon téléphone posé sur la table de chevet sonne. Je l'attrape rapidement et me retrouve les fesses les premières au sol, les cheveux en bataille devant les yeux. Je tente vainement d'y remettre de l'ordre, mais c'est peine perdue.

— Allô ? Melinda Evans, j'écoute...

— Mlle Evans. Je suis Daniel Engle de chez Kyle Entreprise. J'espère ne pas vous sortir du lit à... 11 heures, me dit-il d'un ton taquin.

Je peux sentir d'ici qu'il regarde sa montre. Je me rassois sur mon lit et cherche une position plus confortable.

— Absolument pas ! Je reviens de... la salle de sport, Monsieur... Engle.

Bravo ! Je passe pour une menteuse ; je suis sûre qu'il ne m'a pas crue une minute.

— Je vois... Je me permets de vous contacter, car votre candidature a été retenue. Je souhaiterais vous rencontrer dans la journée. Cela est-il possible pour vous ?

— Oui, je suis disponible. Quelle heure vous conviendrait le mieux ?

Je sors mon agenda de mon sac. Nul besoin de confirmer qu'il ne comporte aucun rendez-vous de la semaine. Je lève les yeux au ciel. C'est déprimant.

Après notre conversation et le désordre que j'ai infligé à ma garde-robe, je me rends compte que partir en emportant uniquement une petite valise était une très mauvaise idée. Nous avons rendez-vous en début d'après-midi, et je n'ai rien à me mettre. Il me faut une tenue moins sophistiquée que celles des Entreprises Evans, où mon père exige de tous ses employés la limite de la perfection, et où je me sente à l'aise. Je suis heureuse et impatiente de découvrir leur bureau et le poste qu'ils vont me proposer. Espérons que ce soit celui qui m'intéressait. J'en ai besoin plus que jamais, et je dois mettre toutes les chances de mon côté.

Je pénètre dans les parkings dédiés aux visiteurs de Kyle Entreprise, qui se situent au sous-sol de la tour de verre. De somptueuses voitures y sont garées et une limousine noire prend toute une rangée, rien que pour elle. Cela explique peut-être le nombre d'agents de sécurité et de gardes du corps postés à chaque entrée de service et portes d'ascenseur. Jamais je n'avais vu un tel dispositif de sécurité pour une entreprise, même si celle-ci est l'une des plus puissantes du pays.

Je sors et verrouille ma voiture. Je me dirige directement vers les ascenseurs en sentant tous les regards des agents de sécurité rivés sur moi. Puis j'appuie rapidement sur le bouton d'appel.

Faites qu'il se dépêche d'arriver... Vite, allez, descend... Ouvre-toi...

Je ne comprends pas, me suis-je garée au bon endroit ? Pourquoi me dévisagent-ils tous en murmurant des choses, une main posée sur l'oreille ? Cet endroit me fiche la chair de poule.

PING ! Le voilà. Je m'engouffre à l'intérieur et appuie précipitamment sur le bouton du 33e étage, comme si ma vie dépendait de la rapidité avec laquelle les portes allaient se refermer sur moi. À mon grand étonnement, je reste seule dans cet ascenseur qui monte sans s'arrêter. Cet endroit est très « étrange ». Pourquoi n'y a-t-il personne dans cette cabine ? Nous sommes en début d'après-midi, et des milliers de personnes travaillent dans cette tour. Les gens devraient être de retour de leur déjeuner ou bien encore partir en rendez-vous. La tour comporte trente-cinq étages, le dernier doit probablement être celui de la direction. Non, mais... pourquoi je ne m'arrête pas au 33e ?

J'appuie rapidement sur le bouton 33, mais l'ascenseur continue son ascension, passant le 34e étage et s'ouvrant sur le 35e, le dernier étage de la tour. Une jeune femme brune aux magnifiques yeux bleus m'attend, une tablette à la main et un casque téléphonique sur la tête. Elle y souffle des informations que je ne peux pas entendre et me sourit de toutes ses dents. Elle s'avance vers moi et me fait signe de sortir d'une curieuse façon. Je la rejoins dans le vestibule, où se trouvent une console et un vase de roses blanches. Elles sont superbes et me rappellent instantanément la rose que mon bel inconnu a déposée sur le bar devant moi. Le souvenir de ses mains sur mes hanches et de son souffle sur ma peau réveille en moi un désir brûlant... Mais qu'est-ce qui m'arrive ? Je secoue nerveusement la tête. Il faut que je me concentre sur mon rendez-vous.

Un tableau est accroché au mur. Il est d'une telle intensité que tout mon corps frissonne à l'image qu'il renvoie. C'est un dessin de couleur noire, avec des touches argentées et blanches, peut-être dessiné au crayon sur une simple feuille de papier et encadré par la suite dans un grand format. Est-ce que tout est démesuré dans cette entreprise ? Le tableau représente des roses qui s'entrelacent, les tiges sont finement tracées, remontant le long du dessin et finissant dans le néant. En m'approchant, j'aperçois des caractères d'écriture que je n'arrive pas à déchiffrer ; il se dégage d'eux une grâce toute en harmonie, légèreté et aisance. Ce dessin m'émeut, me trouble, et je peux presque ressentir une blessure profonde et immuable qu'aurait voulu y incruster son auteur.


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