Août 2022, Albanie. ✷ GABRIELE.
Et cela fait une ( longue, si longue ) semaine que Gabriele est sortie de son nuage de fumée mais elle n'a toujours pas parlé à Kristjan. ( Techniquement si, Gabie lui a parlé ; simplement, pas de ce sujet. ) Pourquoi devrait-elle le faire ? La fille unique des Zacchi n'est même pas sûre d'être enceinte. C'est bien pour cela que Gabriele se trouve actuellement allongée sur le sol de sa salle de bain, son regard fixé sur le plafond. Une tâche attire son attention. Depuis quand ce miroir est-il accroché là ? Le carrelage est froid. Super froid. Trop froid. Et si elle se réchauffait un peu ? Gabriele se lève, sort de la pièce. ( Si elle reste ici, la possibilité de faire une bêtise ⸺ qu'elle s'est jurée de ne jamais réitérée ⸺ est envisageable. La guérison est un long chemin dont elle s'abstiendrait de ses tentations. )
C'est sa chambre qui l'accueille, Veline assise sur le parquet de celle-ci. ( Un lieu sacré pour notre jeune femme, son bric-à-brac entourant la rousse dans une forme de cercle. Les deux rideaux encadrants la fenêtre sont tirés. Le crépuscule pointe le bout de son nez, Apollon laissant sa place. ) Enfin, sa chambre est un bien grand mot car en vérité, c'est celle de Kristjan, celle où il a grandi. L'ambiance y est particulière et l'odeur de la lavande aromatique lui est insupportable. Et assise sur le rebord de son lit, elle observe Veline en train de se coiffer, les mains de la rousse attrapant mèches et barrettes pour former un chignon. À ses côtés, son diffuseur d'odeurs rend la situation difficile à vivre pour Gabriele Zacchi ; au bord des larmes, mais Gabriele les ravale puisque, d'après Veli, cela apaise le cœur et l'esprit.
⸺ Faut vraiment qu'on se change les idées.
⸺ Ah ouais ?
Ses petits doigts de fée se mettent en pause. Ses lèvres ( qu'elle refuse de peindre en couleur ) sont tordues, les coins abaissées vers ses genoux qui sont recroquevillés l'un sur l'autre.
⸺ Bien sûr, Gabriele. Je te vois morose depuis un mois, je n'en peut plus. Toi et Kristjan, vous faites vraiment la paire.
⸺ C'est... un compliment ?
⸺ C'est à toi de voir. Toujours est-il que tu vas me faire le plaisir de lever tes petites fesses et d'aller te changer puisque je t'emmène dans un de mes endroits favoris. ( Gabriele n'ose pas lui dire non. À quoi bon lutter contre Veline Elezi ? )
⸺ D'accord. Tu sais à quelle heure les garçons rentreront ? Faudrait peut-être les prévenir... ( Et ses yeux dans le vide donnent l'impression qu'elle cherche un fantôme ; le sien. Gabriele ne trouve pas. )
⸺ Ils sont grands, Gabriele. Ils vont se démerder. ( Et cette obligation de prononcer le nom Gabriele dès qu'il faut lui adresser la parole. Veline a peur qu'elle oublie son nom, sinon. )
⸺ Peut-être qu'ils vont s'inquiéter, non ? S'ils rentrent et que nous ne sommes pas à la maison... Peut-être qu'ils vont être inquiets.
⸺ Peut-être, mais Gabriele, laisse moi te dire un secret : il y a quelque chose de formidable qui existe désormais, ce sont les téléphones portables.
Et l'italienne pèse le pour et le contre. ( Attendant sa réponse, Veline attrape sa palette de maquillage ; timidement présente dans son foutoir. )
⸺ C'est d'accord. Mais seulement si tu m'autorise à passer un coup de fil avant.
⸺ Je ne suis pas un monstre, Gabie. Évidemment. ( Et ses mains s'affairent de nouveau, ajoutant grossièrement du fard à paupières vert sur le dessus de ses yeux. )
⸺ Ok. Je reviens vite. J'suis déjà prête, de toute façon.
Et Veline dévisage la fameuse tenue en question, un jogging taché par la sauce de son repas de ce midi ; et ses larmes.
⸺ Alors non, ma belle. Tu téléphone puis tu te changes, zéro négociations possibles. ( Quand elle reviendra, une tenue concoctée par la rousse sera là, étalée sur le lit, n'attendant qu'elle. )
Gabriele acquiesce et se faufile hors de la pièce, rôdant dans les couloirs ; passant devant l'ancienne chambre parentale, et arrive presque dehors. ( Et la véranda l'accueille avec joie. )
⸺ Allô ? ( Résonne de l'autre côté du téléphone de Gabriele après une série d'innombrables sonneries ; et la nuit tombe directement dans le jardin, où quelques oiseaux piaillent comme si la journée ne faisait que commencer. )
Gabriele répond. ⸺ Deux semaines s'écoulent durant son appel. Les plaies se referment petit à petit et le sel de ses larmes semble de moins en moins cathartique ; ses blessures se ferment.
Août 2022, Albanie. ✷ GABRIELE.
Il y a deux mois, dans un coin perdu de la capitale Lombarde, les vitres de la portière du véhicule noir étaient couvertes de buée et pour une fois, elle n'avait pas dérangée Gabriele. La Lune observait la scène ; ricanant. ( Puisque l'astre argenté savait. )
Aujourd'hui, c'est le dernier jour de Gabriele et Kristjan en Albanie. Donc aujourd'hui, c'est le dernier jour où notre protagoniste peut franchir cette étape. ( Celle de la Mort à la Vie. )
Et désormais assise sur ses toilettes, Gabriele Zacchi attend impatiemment le résultat des deux tests de grossesse posés sur le rebord de l'évier. Pourquoi est-ce si long ? Gabie jette un regard à la cabine de douche puis elle se lève et s'éloigne un peu de l'objet de ses tourments pour se concentrer sur sa trousse de toilette qui est toujours en désordre, le tissu crachant pinceaux et tubes de mascara ; et pour cesser de penser à ce qu'il se trame, ou non, dans son ventre. ( Dans le couloir, Henrik appelle Veline et la rousse ne répond pas. Il l'appelle encore. Elle répond. )
⸺ Aurais-je une nouvelle protégée ? ( La Lune demande. )
⸺ Je ne sais pas. ( Gabriele répond. )
⸺ J'espère vraiment que cela sera le cas. ( Gabriele hausse les épaules. Elle ne sais pas si ce sera le cas ; et ne sait pas non plus si elle l'espère. )
⸺ Et pourquoi ? Pour pouvoir, à son tour, l'abandonner ? ( La colère dans ses yeux fait trembler les Étoiles. )
⸺ Comment oses-tu me le reprocher ? ( Quelle est l'autre solution ? Avouer ses tords ? Gabriele préfère mourir ; ce n'est pas nouveau. )
⸺ Je fais ce que j'ai envie. Je n'ai pas besoin de toi. ( Elle sait qu'elle ment. )
⸺ Si c'est comme cela. ( Paf. Dans le noir de la nuit, la Lune disparaît. Des larmes coulent sur le visage de Gabie sans une seule trace de son argenté. )
Et l'aiguille de l'horloge a fini son tour. ( Pour la deuxième fois de la journée, elle a raison. ) ⸺ Il est donc l'heure du verdict. Elle approche à reculons du lavabo en marbre blanc ; son test est positif. Et le second aussi. ( Lune sourit. C'est la prophétie qui se réalise. )
Smoke Signals. ✷ baerella.
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✷ Smoke Signals.
Narrativa generaleBurnin' trash out on the beach. ✷ Football fic. / K. Asllani. ✷ BENEAMATA BABIES #1.