Chapitre 7

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Mercredi 29 avril 2015

Olivia : Je suis devant la fontaine

Mattéo : Désolé, je suis en retard. J'arrive dans 5 min

Je me laisse tomber sur le rebord de la fontaine. Arrivée il y a un quart d'heure, j'ai déjà eu le temps de faire trois fois le tour de l'Esplanade. C'est tellement rare que je sois autant en avance que je ne sais pas comment me comporter. Je crois que je préfère le rôle de la personne en retard, c'est nettement moins frustrant et énervant.

Je resserre ma queue de cheval, ajuste ma frange et époussette mon short à fleurs avant d'avoir une montée de panique. Est-ce que Mattéo va aimer ma tenue ? Est-ce qu'il me trouvera jolie ? Ce rendez-vous est décisif. Si je le foire, toutes mes chances seront foutues. Et Dieu sait que je suis douée pour tout saboter alors j'appréhende beaucoup.

C'est la première fois que je fais ça aussi, je veux dire, un rendez-vous avec un garçon. Je sais comment ça marche dans les films mais dans la vraie vie, c'est autre chose...

Ravalant mon angoisse, je me lève et débute des tours autour de la fontaine. Deux garçons sont posés sur un banc pas très loin et me reluquent comme si j'étais un sujet d'expérience scientifique. Ils rient et je ne peux m'empêcher de penser qu'ils se moquent de moi. C'est con, je sais très bien que les gens ont bien mieux à faire que de se foutre de ma gueule et pourtant, dans les endroits peuplés, j'ai toujours cette impression.

Là.

Il est là.

Il se rapproche.

Il ne m'a pas encore vue alors j'en profite pour le regarder. Il porte un jean brut et un t-shirt vert pastel très simple. Ça lui va bien. Des lunettes de soleil reposent sur son crâne mais je ne comprends pas très bien leur utilité puisque le ciel nuageux ne laisse pas passer le moindre rayon de soleil. Ça doit être pour le style.

Il finit par me repérer et je lui souris timidement avant de détourner mon regard et de reporter mon attention sur mon téléphone.

—Hey !

Mon cœur bat à tout rompre. Mon t-shirt colle déjà sous mes aisselles. Mon Dieu. Heureusement que j'ai pris une veste pour camoufler tout ça.

Il me fait la bise et l'angoisse qui m'habite se demande comment je vais tenir toute la durée du rendez-vous.

—Désolé pour l'attente, mon père a insisté pour que j'envoie un mail pour lui juste avant que je parte, du coup j'ai loupé le bus.

—T'inquiète, c'était pas long.

—Ouf, on y va ?

Je hoche la tête et lorsqu'il commence à marcher en direction du Plan d'eau, je lui emboîte le pas.

—Je te montrerai là où je m'entraîne. On passera devant le club, me dit-il en descendant les escaliers menant au lac.

—Je pense savoir où c'est. J'ai fait du kayak une année pendant les animations estivales. J'étais vraiment nulle.

—Le kayak, c'est pas exactement pareil. Mais je pourrais te donner des cours d'aviron un jour, si tu veux.

—Pourquoi pas !

J'ai l'air super enthousiaste mais à l'intérieur, je me décompose. Qu'est-ce qui m'a pris de dire « pourquoi pas » ? Parce que ce que je n'ai pas dit à propos de mon expérience avec le kayak, c'est que c'était tellement horrible que j'ai arrêté au bout de deux jours. Je suis tombée dans l'eau et j'ai été traumatisée. Plus jamais je ne veux revivre ça.

L'Art d'errerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant