Chapitre 17

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Jeudi 5 novembre 2015

Depuis le début de cette semaine, je plane. Entre l'orientation qui s'insinue dans chacune de mes pensées et la peur de croiser Mattéo, je peine à me concentrer. Que ce soit en cours ou quand je passe du temps avec Rose, mon cerveau ne filtre qu'un mot sur trois. C'est épuisant.

Cet après-midi, la classe de Valentine et la mienne nous rendons au salon d'orientation organisé au Parc des Expositions de Metz. La liste des formations que je dois aller voir s'est encore allongée depuis la semaine dernière. En fait, je n'ai pas envie de passer à côté de quelque chose. Ma devise pour ce salon, c'est « mieux vaut trop que pas assez ».

Si mon stress est à son maximum, c'est aussi parce qu'aujourd'hui, je vais croiser Mattéo. C'est inévitable. Mais ce n'est pas le simple fait de le revoir qui m'angoisse autant, c'est aussi parce que j'ai pris une décision : je vais lui avouer que, moi aussi, je l'aime bien. Oui, c'est une grosse annonce qui changerait beaucoup de choses alors j'espère ne pas me prendre un râteau. C'est tellement rare que je prenne mon courage à deux mains que ça me dissuaderait d'être entreprenante pour le restant de mes jours.

Sur le chemin pour rejoindre le bus qui nous emmène au salon, je repère la classe de Mattéo sortir du lycée. Innocemment, mon regard se balade dans la masse d'élèves puis finit par tomber sur lui. J'ai le temps de l'observer quelques secondes avant qu'il ne relève la tête vers moi. En un instant, son visage se transforme et un sourire chaleureux s'y matérialise. Je le lui rends mais une pointe d'amertume me gagne quand je me rappelle que son sourire ne veut pas dire ce que je voudrais.

C'est un sourire d'ami.

J'efface mes ruminations en me répétant que je vais bientôt corriger le tir et me retourne vers Rose.

—Tu comptes lui dire comment et quand ? me demande-t-elle.

Cette semaine en classe, je lui ai tout raconté. Ça m'a fait du bien de me confier parce qu'en me refaisant le film de mon histoire avec Mattéo du début à la fin des milliers de fois, j'étais à deux doigts de me perdre. Elle m'a aidé à y voir plus clair et c'est d'ailleurs elle qui m'a conseillé de lui avouer mes sentiments. Rose part du principe qu'il vaut mieux toujours dire la vérité parce que même si on en vient à être déçu, au moins on aura été complètement honnête avec nous-même. Elle n'a pas tort. Ceci dit, ça n'en reste pas moins difficile à appliquer.

—Je sais pas trop, dis-je en levant les yeux vers le ciel. Pendant le salon, j'aurai pas le temps et il sera sûrement occupé, lui aussi. Peut-être après en rentrant. Je crois qu'on descend tous les deux à la Seille pour la correspondance.

—T'as qu'à lui proposer de se poser un peu au parc de la Seille.

—Ouais, je vais voir mais déjà, faut que j'ose engager la conversation.

En arrivant au salon, je me rends compte que je n'ai jamais demandé à Rose ce qu'elle comptait faire après le bac. Alors, dans la file d'attente, je le lui demande.

—Je pars en road trip, m'annonce-t-elle.

—Sérieux ? C'est trop cool !

—Ouais, je sais. Je fais partie de la team indécis alors je me suis dit que ça me ferait pas de mal de me prendre un an (ou plus, qui sait ?) pour sortir de mon quotidien et voir d'autres choses.

Je trouve son idée incroyable. Un an de pause pour réfléchir, ça pourrait m'être très utile. Mais mon côté aventurière n'est pas assez développé pour que j'envisage un road trip comme elle. Ceci-dit, une année sabbatique pour découvrir des métiers, je garde ça dans un coin de ma tête.

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