27

114 15 3
                                    

[Incroyablement culoté]

Le lendemain matin, je suis prête dès huit heures. J'ai soutenu mon projet mentalement des dizaines de fois, j'ai défendu avec acharnement mes idées contre mes propres missiles. Je suis parée ! N'aimant pas attendre sans rien faire, je décide de partir d'emblée en direction du centre-ville. Je suis nettement en avance. J'hésite à me rendre chez Nate pour récupérer ma guitare, mais vu l'heure, j'ai surtout peur de le réveiller. J'opte donc pour un café en terrasse, la musique dans les oreilles.

À dix heures, je suis assise dans le couloir de l'administration en patientant calmement.

Elia : « Jude, je pense à toi. Nelson vient de partir, il a annoncé qu'il ne s'absenterait pas longtemps. Tu as du talent, Jude Line Cooper. Et beaucoup de charme. Qui pourrait y résister ? Pas moi. Mais, pour le moment, il s'agit d'eux. Alors, oublie ton charme assassin et défonce tout avec ton talent indéniable. »

Moi : « Qui séduit qui maintenant ? Je devrais te remercier pour ce message, mais je préférais te le démontrer. Je vais devoir faire preuve de plein de charme et d'une bonne dose de talent pour y parvenir. Mais n'oublie pas que je suis obstinée. Eh oui, considère ça comme une promesse et une menace, Honey. »

Elia : « Tout ce dont j'ai besoin, complètement fou, à plus tard. »

𝅘𝅥𝅮

— Bonjour, Jude, me lance Madame Perdrel. Ravie de voir que vous êtes parmi nous.

Je lui souris comme seule réponse et elle frappe à la porte du directeur qui nous invite à entrer. Je m'installe en face de son bureau et la femme assise à ma droite entreprend déjà d'expliquer pourquoi nous sommes ici. Elle évoque ma disparition de la semaine dernière et ma présence dans la classe de son collègue.

— Nelson va bientôt arriver, intervient le directeur. Je refuse de commencer ce rendez-vous sans lui, cependant parlons de votre absence. Cette partie ne le concerne sans doute pas.

— Oui, vous avez raison. Vendredi, quand j'ai quitté le cours de Madame Perdrel pour la pause-déjeuner, je ne suis jamais revenue. J'ai conscience que je n'aurais pas dû partir et encore moins le faire sans prévenir, néanmoins ce qui est fait est fait. Je ne peux que vous présenter mes excuses et vous assurer que cela ne se reproduira plus.

— Ce ne sont que des paroles, commente ma professeure.

— En effet, mais vous avez connaissance de mon dossier scolaire. Mon taux d'absence est extrêmement bas et bien en dessous de ce qui est communément admis.

— Mais ce qui est communément admis, reprend-elle, ce sont des manquements pour motifs médicaux.

— Madame Perdrel n'a pas tort, ajoute le directeur.

Ce dernier s'interrompt à l'instant où Nelson apparaît. Sous le regard outré de ma professeure, il s'assoit sur le coin du bureau.

— Pardon, pour le retard, je suis forcé de sécher ma propre classe pour ce rendez-vous. Quel horaire étrange, dit-il en souriant. Jude, Sophie, Enzo.

— Nous parlions justement de ça, répond le directeur. Jude, il est vrai que vous avez effectivement un taux d'absence remarquable.

— Mais elles doivent être justifiées et un festival n'est pas un motif valable, reprend ma professeure.

— Pardon, mais toutes mes absences depuis le lycée étaient pour des concerts. Ce n'est pas ce que vous voulez entendre, mais c'est la vérité. Cela ne m'a pas empêchée d'être une excellente élève. Aussi, nous parlons actuellement d'étudiants, de jeunes qui ont une vingtaine d'années. À votre avis, est-ce plus recevable comme justifications d'avoir des maux de tête, des nausées ou encore des entorses quand on sait que pour les trois-quarts d'entre eux, ce sont de simples conséquences d'une violente gueule de bois ? Ne trouvez-vous pas cela étrange que les absences pour motifs médicaux sont celles des jeudis et des vendredis ? Et que celles pour raisons personnelles ou grèves de transports apparaissent les lundis matin et les vendredis après-midi ? Parce que si ces excuses sont plus valables que la vérité, alors je vous prie de me croire en vous disant que j'ai dû rentrer plus tôt, car la conduite d'eau de ma salle de bain a soudainement explosé.

June Wild, L'effet d'un caillouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant