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[Poupée vaudou]

La première fois que je me réveille, je suis entourée d'une exquise odeur de cèdre et de violette. La chaleur qui m'enveloppe me pousse à me blottir encore plus. Un grondement régulier me berce au rythme de lents mouvements. Pourtant, je m'éveille un peu plus lorsque je sens des mains sur moi. L'une, autour de ma taille, faufilée sous mon t-shirt, et l'autre près de mon visage. Je bouge pour me redresser, je suis tourmentée, sans pour autant parvenir à émerger complètement. Je perçois l'agitation d'un drap qu'on froisse, puis des doigts délicats glissent sur ma joue. Des murmures familiers me rassurent et je me retourne. La dernière chose que je devine est le poids d'une couette qui me tombe dessus.

La deuxième fois que je sors du sommeil, c'est en sursautant. La musique, non, du bruit, fort, beaucoup trop fort, survient juste de l'autre côté du mur. Le visage fiché dans le matelas et recouvert de l'oreiller, je grogne et je jure.

— Je fais la promesse de retrouver le petit con responsable de ça, je le traquerai sans répit et quand je saurai enfin qui il y est, je fabriquerai une saleté de poupée vaudou et j'enfoncerai une aiguille dans sa tête tous les putains de samedis matin.

Le boucan continue de plus belle quand une voix d'homme hurle.

— Allez les mollusques !

— Rectification, je vais d'abord lui faire la peau, lui briser les rotules et le noyer dans la boue.

J'entends alors un rire masculin juste à côté de moi, beaucoup trop près de mon corps. Je tressaille une nouvelle fois. Je suis réveillée, pratiquement ressuscitée, et sans réfléchir, je bondis sur l'homme qui remue à ma gauche. Je tente de le maîtriser maladroitement jusqu'à ce qu'il ne bouge plus, assise à califourchon sur ses hanches. Ses mains sont prises au piège des miennes, épinglés sur le matelas. Ses yeux d'ambre croisent enfin les miens et son sourire charmant me donne envie de deux choses, le frapper et l'embrasser. Je me souviens illico de l'endroit où je me situe et je me détends, sans pour autant le libérer.

— Sauvage !

— Pendant un instant, j'ai oublié où je me trouvais, avoué-je.

— Oui, j'avais saisi. Tu comptes me lâcher ou tu prévois aussi de me faire la peau ?

— Non et oui. Ou peut-être l'inverse.

Sans comprendre ce qui m'arrive, je me retrouve allongée sous lui. La rapidité avec laquelle il nous a fait basculer me surprend. Je tente de bouger pour me défaire de son corps, m'attendant à devoir lutter avec acharnement, mais non. J'y parviens vite, retrouvant notre position d'origine. Je leste mon corps, pour ne pas me faire avoir deux fois. Il abandonne rapidement. L'unique mouvement que je devine, c'est son sexe qui durcit lentement contre moi, ce qui m'oblige à cesser tout mouvement.

— Tu bandes. Ce sont les menaces de mort imminente qui t'excitent ?

Il ricane et son ventre est pris de soubresaut sous mes cuisses.

— C'est juste le matin.

Je vois à son visage la concentration dont il semble faire preuve, en vain.

— Ce n'est pas seulement ça.

— Je le reconnais, te sentir te frotter contre moi, n'arrange pas vraiment les choses.

Son regard et sa franchise me troublent. Il en profite pour nous faire rouler une fois de plus. Cette fois-ci, il pèse plus lourd et ses mains encerclent mes poignets. Il me maintient plus fermement, pourtant, je ne cherche pas à m'enfuir.

— Je ne me souviens pas m'être endormie dans ton lit.

— Tu t'es assoupie à la moitié du film.

Sa voix est toujours aussi rassurante et son souffle balaie lentement les mèches embrouillées qui encadrent mon visage.

June Wild, L'effet d'un caillouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant