Chapitre 13

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- Putain. Je fais quoi ? Je ne veux pas le faire... J'ai peur. Je ne peux pas.

Mes mains, ma jambe, ma lèvre inférieure tremblent de peur et d'appréhension, pendant que ses mots repassent en boucle dans ma tête.

- J'ai des affaires à régler Baptiste. On fait ça dans 2 semaines. Le jeudi soir, tu viendras lui proposer un verre. Un verre, puis deux, puis trois, puis... Tu sais quoi ? Jusqu'à ce qu'il soit à deux doigts de l'overdose. Tu le ramèneras aux coordonnés GPS que je t'enverrai le jour même ok ? Tu feras ce que tu veux de lui après. Je te fournis le lieu, les outils, la drogue, mais je ne le touche pas.

Ma voix s'entremêle avec la boule qui pèse dans ma gorge. Le stress. Ça me tue. Putain, mais elle fout quoi ?

Elle ne fait rien pour m'apaiser, j'ai l'impression. D'habitude, elle sait calmer mes émotions fortes. Mais je pense qu'après les aveux que je lui ai fait, elle et la lune m'ont tourné le dos pour ce soir.

Les vagues frappent plus fort qu'à leur habitude. Elle est en colère. Contre-moi ? Sûrement. Je me sens soudainement très seul face au monde si vaste. Même la nature m'a abandonné.

Je perds le contrôle. Et je sens que c'est comme si j'étais déjà mort. Personne ne lira les mots que j'écris dans ce cahier entre mes mains...

Ou peut-être que oui. Si la pluie ne trouve pas mon cahier avant quelqu'un, si elle ne fait pas couler l'encre de mes mots sur la page qui sera après mouillé.

- Je ne peux pas le faire.

Les vagues reprennent de façon à ce que j'entende leur mécontentement.

- Je ne peux pas.

Les vagues hurlent leur déception.

- Pardon, pardon, pardon.

Je m'approche de la mer, un bras tendu vers elle, dans l'espoir qu'elle veuille au moins écouter mes excuses. Mais plus je m'approche, plus j'ai l'impression que les vagues sont loin et quand je les touche enfin, je me rends compte que ce sont seulement la carapace qui cache son cœur. Je me sens loin de la seule chose qui m'aime. La mer. Je la vois s'éloigner, enfoncer plus profondément son cœur dans ses fonds marins. Ses faiblesses au fond de ses eaux noires, où mes idées noires me mène.

- Je ne sais pas quoi faire, putain, fait moi un signe pitié! Aide-moi!

L'eau salée se retrouve jusqu'à mes hanches. Engourdie. Je suis putain d'engourdie.

- Explique-moi!

Je cligne plusieurs fois des yeux, ne comprenant plus les mots aléatoires qu'elle me lance, est-ce qu'elle me parle même ?

- Arrête tes conneries, Baptiste.

Sa voix me transperce. Elle continue de me crier la même chose.

- Arrête.

Je pleure à chaudes larmes, triste de voir que je la dégoûte tant que ça. Elle me broie le cœur à chaque fois qu'elle fait ça.

- Baptiste ? Arrête, j'ai peur.

- Non, pardon, je recommencerais plus. Je te le promets.

- Reviens.

- Laisse-moi rester avec toi. J'ai cru que t'allais m'abandonner. Reste avec moi.

- MERDE BAPTISTE, PUTAIN ARRÊTE, TU VRILLES REVIENS.

Ce n'est plus elle. Sa voix si douce, calme, essayant de me rassurer et devenue d'un coup un grand poignar dans le dos. Ce n'est pas elle. Jamais elle ne m'a criée dessus. Je ressors de ma transe, de cette pseudo-noyade pour cette fois me noyer pour de bon dans l'océan de ses yeux.

- Toi?

- BAPTISTE, TU REVIENS MAINTENANT.

Je n'arrive plus à bouger. Paralysé. La boule dans ma gorge à doubler de volume puis c'est cloner pour s'installer dans mon ventre. Les deux sont trop lourdes. Je ne peux pas bouger. J'aurais voulu lui hurler de dégager, de trouver mieux à faire que de sauver son bourreau, mais je n'arrive qu'à respirer difficilement.

Je me racle la gorge pour lui répondre, mais je ne peux pas. Je ne peux plus. Je ferme les yeux en priant que la mer m'emmène loin de la voix de Lucas. Priant de m'endormir avant que ça ne soit Lucas qui s'endorme en premier.

- Baptiste... Tout va bien aller, ok ? Approche, s'il te plaît.

Il me reparle à nouveaux et j'entends la voix de la mer dans sa voix. Douce, aimante, celle qui m'aime. Je me retourne totalement vers lui et je le vois, le chandail trempé comme son visage.

Je me dirige d'un pas plus que lent, ralentie encore plus par l'eau qui veut m'engloutir me noyer avec ses sentiments. Encore 3 mètres.

Je vois ses tremblements, il a froid ou peur, je ne sais pas.

2 mètres.

Il sourit, soulager que j'avance enfin vers lui ou nerveux que l'eau m'emporte.

1 mètre.

Il pleure, de soulagement.

Face à lui.

Face à lui, je m'écroule littéralement, à bout de force.

Il semble fatigué également, mais continue de m'aider en me servant de support.

- Pardon.

Il ne répond pas.

Un simple pardon.

Pathétique, sans sens, sans motivation, sans réel penser. Juste, pardon. Un pardon, car je me sens mal. Car je suis égoïste.

Le passage des larmes sur ses joues ne s'efface pas, son regard se perd dans le mien quand on se retrouve enfin sur le sable, d'un geste vif il me tend sa veste beaucoup trop petite pour moi. Je la prends quand même en tant que couverture et me couche sur le sable froid.

J'arrive enfin à mieux respirer, l'odeur du sel de mer maintenant loin de moi.

Lucas ne tarde pas à s'asseoir à côté de moi, regardant les flots de l'eau s'agiter seul, attirant l'attention du monde. Les étoiles n'en demandent aucune, mais elles réussissent à capter mon attention. Elle que je regarde, n'en a peut-être jamais eu. Je suis peut-être le premier à lui sourire.

- Pourquoi tu souris, débile.

Mon sourire s'efface sur le coup.

- Ça ne t'était pas dédié.

- je sais.

Je tourne ma tête vers sa direction, oubliant l'étoile et la perdant sûrement à tout jamais. Lucas rigole et s'allonge.

- Je rigole, ça va.

Il reste silencieux un moment avant de reprendre la parole après ce lourd moment.

- Tu sens cette odeur?

- Quelle odeur encore.

Je hume quand même l'air, mais je ne sens que l'odeur du sable à côté de ma tête. Lucas se relève et se penche vers moi.

- Respire avec moi et tu verras.

Il prend ma main et la pose sur son propre torse, insirant et expirant d'une lenteur appaisante. Son sourire est doux, presque timide comme celui de la Joconde.

- Tu sens ?

Comment ne pas le sentir maintenant? Cette odeur de soulagement, de calme. Je coupe notre contact visuel pour fermer les yeux et profiter de cette odeur rare dans ces lieux si stressants.

J'aimerais pouvoir rester comme ça à vie. Tout mes sens en alerte, aucun ne m'nvoie de signaux sur un potenciel danger. Car ici, c'est chez moi et je le sais. Ma maison, sa sécurité, son amitié, lui. Je l'aime cet idiot.

- Putain...

Je ressens maintenant la fatigue s'emparer à nouveaux de tout mes gestes même ceux les plus simples. Si je n'aurais pas eu à croiser ses yeux aquarelles, parler ou même ouvrir les yeux m'auraient parru impossible. Mais il est là, et il ne partira pas.

Pas maintenant.

- À suivre-

Drogue Nostalgique. [Lockzie]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant