Chapitre 19

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Sous mes yeux demi-clos, mon esprit s'égare sur un point fixe de mon plafond.

Encore sous l'effet de la fatigue, je laisse le dernier album de Népal chanter dans mes écouteurs. Les prods océaniques se mélangent à la mélodie des assiettes cassées et de cris stridents venant de mes parents.

Je perçois leurs cris, mais aucun de leurs mots. Ceux-ci sont brouillés par la distance.

Je m'assois sur le bord de mon lit et balaye ma chambre des yeux, cherchant du regard la motivation pour me lever et voir ce qui se passe en bas.

Cependant, rien ne me donne envie de bouger. Mes vêtements d'hier sont toujours par terre, mes devoirs incomplets sont toujours posés sur mon bureau et ma lampe, que j'avais oublié d'éteindre avant de dormir, semble avoir brûlé son ampoule.

J'ai l'impression de n'être à présent qu'un élément du décor. Un chandail sur le sol, un crayon mâchouillé à cause du stress, une boule de papier dans la poubelle, ou encore un post-it sur lequel serait marqué les devoirs à faire.

Mon regard se perd dans ma chambre jusqu'à apercevoir mon paquet de cigarettes mis en évidence sur ma table de chevet.

Je me lève pour aller le cacher dans mon armoire, à l'abri yeux indiscrets de ma mère, et ouvre ensuite la fenêtre d'un mouvement mécanique. Ça sent le renfermé et la nicotine ici. Sentir cette odeur en permanence commence à me monter à la tête. Les voix sont toujours aussi fortes qu'il y a quelques minutes et coincé devant ma porte fermer, je me demande si aller voir ce qui se passe est une bonne idée.

Je reste alors là quelques minutes avant que dans un élan de curiosité, je me décide enfin à descendre les escaliers dans leur grincement camouflé par les voix de mes géniteurs.

Mon cœur s'emballe brusquement quand plus qu'à quelques mètres de mes parents, j'entends ma mère jeter un verre dans ma direction.

Caché derrière le mur, je ne discerne que des insultes et des questions sans réponses que pose en continu ma mère.

Aucune explication sur la source de cette engueulade avant que je ne voie la scène.

Les larmes brillent les éclats de verre sur le sol. Ma mère est la source de celles-ci et mon père semble en être leur cause. Celui-ci admire l'eau salée sur le sol fixement et silencieusement.

Les assiettes cassées par terre vont nous coûter cher. Entre les débris de verre, le téléphone de mon père y repose.

Je discerne entre les sanglots les tristes exclamations de ma mère. Des : «je te faisais confiance» qui sonne tous faux à mes oreilles.

Pas besoin d'être un génie pour comprendre que ma mère a dû voir les messages de tromperie de mon père. Elle a joué l'aveugle et ça lui tombe dessus aujourd'hui.

Après encore quelques minutes à se chamailler, mon père met fin à la dispute en ramassant son téléphone. Ma mère reprend son souffle et soutient le regard de mon père un moment avant de lui pointer la sortie.

- T'es sérieuse là ?

La voix de mon père est lasse, mais laisse une pointe de surprise glissée.

Elle hoche simplement la tête pour confirmer ces doutes et «l'homme de la maison» sort d'un pas lent et fatigué de sa propre baraque.

La voilà donc seule, pied nu, au milieu des morceaux de cœur et de verres sur la moquette. Derrière lui, mon père a laissé un silence cassé par les sanglots de sa femme. Ma mère pleure. Encore et encore.

Drogue Nostalgique. [Lockzie]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant