11 - Bienveillance

24 2 0
                                    

Elle avait fini par avouer à Johannes. Elle avait beaucoup pleuré, à nouveau. Il s'était montré désolé. Elle lui avait dit ne pas vouloir que leur relation change mais qu'elle ne pouvait plus rester comme ça. Que c'était égoïste de sa part mais qu'elle voulait qu'il comprenne pourquoi elle s'éloignait, fatalement. Qu'elle lui souhaitait tout le bonheur du monde.

Elle avait quitté le jeu aussi. C'était trop dur. Elle gardait contact avec certains et certaines mais ce n'était plus pareil. Au fond, il n'y avait que le jeu qui les liait.

Alors que la tristesse pointait son nez, elle posa sa tête dans ses mains et ferma les yeux. Elle repensa à ce week-end à la mer. Un petit sourire orna presque immédiatement ses lèvres alors qu'elle voyait Matthieu à nouveau dans son esprit.
Quand elle avait fini par se calmer, il l'avait aidée à se lever et à ranger ses affaires. Il l'avait raccompagnée jusqu'à sa voiture et avait griffonné une adresse sur un bout de papier : il lui proposait un dîner.

Ce soir-là, elle avait dîné avec lui et ses parents, rigolé, écouté des anecdotes de pêche et de haute mer. Avait peu parlé en soi, mais cela lui allait.
Quand la soirée s'était terminée, elle était restée un peu pour observer un magnifique tableau représentant un galion espagnol. Sans même s'en rendre compte, elle s'était machinalement assise en face de l'œuvre pour s'en imprégner. Les coups de pinceaux qui texturaient le bois et les vagues si différemment mais avec brio. Les couleurs ternes du bateau qui laissaient toute la place aux nuances de bleu et de blanc de l'océan.

À nouveau, Matthieu s'était assis à côté d'elle, en silence cette fois. Il était un peu perdu face à son regard dans le vide et pourtant si intensément concentré. Il prit le parti de patienter.

- Tu sais, dit-elle finalement tout bas, j'ai toujours voulu être une sirène.
- Vraiment ? chuchota-t-il à son tour.
- Oui, souffla-t-elle. L'océan me fascine. Sa force, son agitation, son calme pourtant... il a l'air si uniforme mais il abrite tellement de merveilles. Et tout y est gracieux.

Elle marqua une pause.

- À quelques exceptions abyssales prêt, rit-elle.

Il sourit. Elle l'intriguait grandement. Elle avait l'air d'être désespérée et pourtant elle s'émerveillait encore devant un tableau. Elle trouvait la force de rire, mais semblait encore sur le point de pleurer.

- Il y a... Un aquarium pas très loin d'ici. Tu voudrais y aller demain ?
- Et bien... Je suis censée rouler demain, pour rentrer chez moi...
- Oh...
- Mais... j'aime trop les aquarium... Je suppose que je peux rentrer l'après-midi.

Ils échangèrent un grand sourire avant qu'elle ne rentre.

Quand elle repensait au lendemain, Colette souriait encore plus. L'aquarium était magnifique. Ils avaient passé des heures à regarder les poissons nager, tels des milliers d'arc-en-ciel. Ils avaient discuté aussi. C'est cette nouvelle amitié qui lui avait donné le courage de parler à Johannes. Ça n'aurait pas été juste de maintenir le secret plus longtemps...

Maintenant, elle devait gérer le trop plein d'émotions. La tristesse. Le manque. L'angoisse. En continuant à faire son travail en souriant, sans perturber ses élèves aussi sensibles qu'elle. Certains avaient déjà senti qu'elle n'était pas au mieux de sa forme d'ailleurs. Difficile de le leur cacher entièrement. Mais elle réussirait à surmonter cette épreuve, comme toutes les autres.

ColetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant