25 - Déménagement

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Dans la semi-clarté de la chambre, Matthieu regardait Colette dormir. La convaincre que le lit était assez grand pour qu'ils le partagent sans se gêner avait été un drôle de combat, mais Matthieu avait obtenu gain de cause au terme d'une négociation serrée. Le déménagement, la veille, avait épuisé la jeune femme qui dormait maintenant à poings fermés. La matinée était bien avancée et le jeune homme avait eu du mal à distraire Misty pour qu'elle laisse sa maîtresse dormir. La petite chatte dormait maintenant d'un œil au pied du lit.

En la faisant jouer discrètement, le drap avait bougé, découvrant Colette. Alors qu'il tendait la main pour la recouvrir, il aperçut une trace plus sombre sur le ventre de son amie. Fronçant les sourcils, il plissa les yeux pour mieux voir. Sur la peau immaculée une cicatrice d'une dizaine de centimètres tranchait vivement. En observant plus attentivement, le jeune homme vit d'autres balafres d'à peine un centimètre disséminées autour du nombril de la jeune femme. Elles étaient, de toute évidence, chirurgicales.

Se demandant pourquoi elle ne lui avait pas parlé d'opérations passées, Matthieu saisit le drap et la recouvrit. Avait-ce été grave ? Pourquoi avait-elle autant de cicatrices ? Était-ce lié au problème de santé qu'elle avait eu autrefois ?
Elle ne lui avait pas dit grand chose à ce sujet, se contentant d'expliquer qu'elle était gênée de son corps à cause des nombreuses vergetures qui le recouvraient ; vergetures dues à des prises et pertes de poids rapides et successives, liées à des médicaments hormonaux. Elle ne s'était pas étendue sur la maladie qui lui avait fait prendre ces médicaments, n'avait pas voulu parler plus avant de cet effet yoyo.
Matthieu se rendit soudain compte qu'elle lui avait caché tout un pan de sa vie et ne savait s'il était inquiet pour sa santé ou triste qu'elle n'ait pas eu assez confiance en lui. Sans doute un peu les deux.

Les quelques jours qui suivirent furent consacrés à l'aménagement de l'appartement pour que chacun y ait sa place de manière équitable. Ce n'était pas une mince affaire considérant la tonne et demie de livres que Colette possédait. Heureusement, il restait assez de place pour caser son mur de bibliothèques.
Du coin de l'œil, Matthieu essayait de capter un mouvement ou une occasion qui révélerait la cicatrice et lui permettrait d'aborder le sujet. Malheureusement, la jeune femme portait toujours des vêtements qui la couvraient...

Colette voyait bien que le jeune homme était perturbé. Peut-être avait-il changé d'avis ? Elle avait fait un tri dans ses affaires mais elle devait avouer qu'elle remplissait les deux tiers de l'appartement et cela pouvait être très gênant pour lui.

- Mat, demanda-t-elle finalement, tu n'as pas l'air dans ton assiette, ça va ? Je peux mettre certaines choses en garde-meuble en attendant d'avoir un autre appartement si tu veux.
- Non, non ce n'est pas ça ! Je suis très heureux de voir cet appartement enfin rempli, mes affaires étaient loin d'être suffisantes.
- Alors qu'est-ce qu'il y a ?

Elle prit sa main et sourit doucement pour l'encourager. Matthieu hésita puis soupira et se lança sans oser regarder Colette.

- Je dois t'avouer quelque chose...

Il s'humidifia les lèvres. Malgré son envie de le presser, Colette se contenta de serrer un peu plus sa main et de patienter.

- Ce matin, pendant que tu dormais, les draps ont glissé... j'ai vu... Enfin j'ai vu...

Colette fronça les sourcils. Elle était pourtant sûre que son pyjama ne révélait rien de compromettant.

- Une grande cicatrice sur ton ventre, lâcha-t-il enfin. Et enfin je me demandais comment tu l'avais eue et pourquoi tu ne m'en avais pas parlé avant...
- Je vois...

Colette tendit l'autre main et Matthieu la saisit.

- Regarde-moi Mat.

Il releva les yeux, l'air penaud.

- Ce n'est rien. Je te raconterai tout un jour, c'est promis. Mais là... Je suis désolée je ne peux pas.
- Tu n'as pas confiance en moi ?
- Si, j'ai confiance. J'ai juste... Peur.
- De quoi ?
- Que tout ce que cette cicatrice implique... Mette fin à notre amitié.
- D'accord... souffla-t-il. J'attendrai.
- Merci...

Elle serra doucement ses mains.

- Dis-moi juste une chose s'il te plaît.
- Demande moi.
- Ce n'est pas dû à... Ce n'est pas quelqu'un qui t'a fait du mal ?
- Non, non au contraire.

Matthieu hocha la tête. Il attendrait alors.

ColetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant