En quelques mois, le temps s'était énormément détérioré. Du haut de son système immunitaire défaillant, Colette portait autant de couches de vêtements que possible. Elle marchait à vive allure sur les quais de la gare. Enfin, aussi vite qu'elle le pouvait, ce qui restait relativement lent.
Elle était contente pourtant, malgré le froid mordant ses joues déjà rouges, la condensation sur ses lunettes et le fait qu'elle ne sentait que peu ses orteils dans ses bottines.
"Ça y est je suis sortie. Le médecin est très content, le traitement a bien repris et fonctionne".
Elle avait envoyé son message à Johannes avant même de prévenir sa famille. Elle savait pourtant qu'il ne le verrait pas avant plusieurs heures. Mais elle imaginait qu'il apprécierait de voir qu'elle avait pensé à lui même quand il n'était pas disponible.
Comme si elle pouvait faire autrement. Elle était tombée officiellement amoureuse sans pouvoir s'en empêcher. Et il le savait, sans doute. Même si elle ne le lui avait pas dit. Même s'il n'avait posé aucune question. Elle n'était juste vraiment pas discrète, même en ne communiquant que par écrit. Un comble pour elle qui aimait tant jouer avec les mots.Ces pensées amenèrent naturellement un pincement à son cœur inquiet. Il était fatigué. Le travail était dur. Il était occupé par son quotidien. Il répondait moins souvent ou moins longtemps. Voire les deux.
Dans le train qui la ramenait chez elle, après avoir discuté des propos du médecin avec qui de droit, elle se laissa envahir par la sensation. L'accueillie. L'accepta. Et la transforma.
Triste tango
Pour chaque pas en arrière que je fais,
Tu me retiens pour trois pas en avant.
Lorsque je tourne la tête pour t'ignorer,
Tu m'attrapes et me renverse, souriant.
Puis c'est toi qui t'éloigne, te retourne,
Moi qui te suis lorsque tu me fuis...
Mais plus ma main saisit ton épaule et te ramène vers moi,
Plus elle glisse et dérape...
Bientôt, je te manquerai.Elle aimait particulièrement le double sens de sa dernière phrase. Elle était persuadée qu'un jour elle le manquerait en n'étant plus suffisamment intéressante. Alors il partirait. Mais elle aimait aussi l'idée que, une fois parti, il se retourne pour voir que sa partenaire de danse n'était plus là. Et comment danser le tango si on est seul ? Peut-être qu'alors elle lui manquerait un peu ?
Apaisée, légèrement et temporairement, elle se laissa bercer par la musique qui sortait de ses écouteurs pour glisser dans une demie somnolance créative. Les histoires s'enchaînaient au gré de ses yeux perdus dans le vide, s'arrêtant sur le reflet dans la vitre d'un passager ou d'une passagère.
C'est le sourire aux lèvres qu'elle posa le pied sur le quai de sa ville.
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Colette
عاطفيةColettte a des rondeurs, de l'enthousiasme, des bouclettes et des couleurs à revendre. Mais voilà, 80kg de tout ça, c'est difficile à gérer... Pour les autres ! Romantique dans l'âme revenue à la réalité, elle cherche à aimer et être aimée en retour...