La ronde (2)

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Après vingt minutes de recherche infructueuse dans l'aile Nord, l'esprit de Severus divagua vers les potentiels maléfices qu'il pourrait jeter au concierge pour se venger. Il n'avait jamais apprécié le cerbère de Poudlard. Ce vieux crapaud décharné prenait un malin plaisir à errer la nuit, dans l'espoir de mettre la main sur le moindre dissident. L'énergie qu'il dépensait pour atteindre ses objectifs quasi proches du sadisme, était une aberration aux yeux du professeur. D'ailleurs, Rusard détestait les enfants, cela ne faisait aucun doute. Alors pourquoi continuer d'exercer dans une école, si ce n'était pour prendre son pied à dispenser des punitions ? Severus réprima une grimace de dégoût.

- Vous pensez qu'il s'est enfuit, Professeur ?

Et cette façon de s'adresser à lui, dégoulinante d'un respect exagéré, agaçait profondément l'ancien mangemort.

- En considérant qu'il y avait bien quelqu'un initialement vous voulez dire... ironisa Severus.

- Oui, oui c'est vrai, répéta bêtement l'autre.

Le chat malingre miaula son approbation à son tour. Ce fut, du moins, ainsi que Severus l'interpréta. Tout-à-coup, un bruit de verre brisé résonna dans le corridor. Rusard sursauta et s'agrippa à la cape de Severus, tandis que son félin offrait une parfaite illustration de son courage en détalant dans le couloir. La main du maître des potions resserra sa prise sur le bois de sa baguette.

- Qu'est-ce que c'était ?!, couina Rusard.

- Comment pourrais-je le savoir puisque je suis ici avec vous ?!

Severus dégagea son habit des doigts parcheminés du concierge, et avança prudemment. L'extrémité de son arme sorcière éclairait la quasi-totalité de l'espace et nulle âme vivante ne se manifestait. Un tableau rouspéta à son passage mais Severus n'en avait cure. Il découvrit alors une porte, relativement dissimulée par une armure massive. Un craquement sourd provenant de derrière les battants, lui confirma que l'individu se trouvait caché là.

- Argus, restez derrière, voulez-vous, ordonna le Serpentard.

Puis d'un mouvement prompt, il effectua une série de sortilèges, permettant d'ouvrir la porte, d'éclairer la pièce cachée, tout en se protégeant d'un bouclier. Ses yeux fouillèrent l'obscurité avec une rapidité déconcertante et son cœur manqua un battement lorsqu'il découvrit une paire de jambes étalées au sol. Rusard glapit lorsque son regard torve se posa sur le corps :

- Par les cochons de Circé !

Severus lorgna Rusard avec confusion. D'où lui venaient de pareilles expressions ? Puis il reporta son attention vers l'inconnue, qui n'en était plus une, couchée au sol. L'appréhension qui s'était emparée de lui un court instant, s'était muée en une sorte d'exaspération, dès qu'il avait identifié la chevelure hirsute de Sibille Trelawney et son odeur de xérès. Décidément Severus aurait mieux fait de sombrer dans un coma éthylique cette nuit-là.

- Tout va bien Rusard, il s'agit simplement de Sibille, qui a encore un peu trop forcé sur ...Hum...la boisson.

- Oh

- Je vais la ramener à l'infirmerie. Il doit me rester un philtre revigorant, assura le potionniste en faisant léviter le corps de sa collègue.

- Bien, alors je vous laisse Professeur, accorda le concierge avec un empressement non dissimulé.

- Je crois, en effet, que vous m'avez suffisamment « aidé » ce soir, murmura Severus d'un ton glacial.

Mais son vis-à-vis ne saisit pas le double sens de cette phrase, puisqu'il bomba le torse, fier comme un Hippogriffe, avant de partir. L'enseignant passa une nouvelle main sur son visage fatigué. Puis il prit la direction de l'infirmerie, Trelawney dans son sillage.

**🍀

Le corps de la professeure de divination s'écrasa mollement dans l'un des couchages de l'infirmerie. Heureusement, aucun patient juvénile ne s'y trouvait ce soir-là, remarqua Severus. Trelawnay ronfla bruyamment, et le potionniste la scruta d'un air blasé. Il fit venir à lui une potion de dégrisement d'un accio, déboucha le flacon dans un petit « plop » sonore, puis versa son contenu dans la bouche béante de la voyante. Celle-ci toussota, recrachant une partie du remède, avant de déglutir d'une façon peu attrayante. Le bruit mouillé qui s'échappa des lèvres minces de la sorcière accrocha une moue de dégoût sur le visage fin de Severus. Sa collègue se remit presque aussitôt à dormir. Ainsi, après avoir remis un peu d'ordre dans l'hospice, Severus s'apprêtait à quitter les lieux, lorsqu'une main emprisonna son poignet. Simultanément, la douleur de son cou et de son épaule se réveilla. Intense. Mordante. Insupportable. Si bien, qu'il lâcha sa baguette en gémissant. Ses genoux heurtèrent le sol brutalement. Il posa instinctivement une main protectrice sur la zone endolorie, s'attendant presque à y sentir le sang couler, tant la souffrance y avait été puissante.

Severus avait pensé, un fragment de seconde, qu'un ennemi tapi dans l'ombre l'avait lacéré d'un coup de lame. Puis la douleur avait cédé, aussi vite qu'elle était venue, permettant au maître des potions de reprendre difficilement son souffle.

Les prunelles d'obsidiennes du maître des potions, se posèrent alors sur Trelawney, qui se tenait assise toute droite, face à lui.

- Sibille ? Que... articula péniblement Severus avant d'être interrompu par la voix caverneuse de la prophétesse.

- La marque du Serpent brillera bientôt d'un éclat nouveau,

Même en ces murs, règnera l'inévitable chaos.

Celui qui s'habille d'ombres et pensait avoir vendu son âme,

Commettra bientôt, aux yeux de tous, l'irréparable.

Pourtant sa présence protégera bien des vies,

A commencer par celle du fils de son ennemi.

La malédiction du Djinn le condamne à une mort douloureuse

Mais les héros ont-ils le droit à une fin heureuse ?

La professeure de divination interrompit sa diatribe avant de s'effondrer sur son matelas sans plus de cérémonie. Severus la scruta le cœur battant la chamade. Il n'osait plus faire le moindre mouvement, ni même cligner des yeux, sous peine de réveiller à nouveau la cartomancienne. Ne risquait-elle pas de lui pondre un nouveau présage d'ailleurs ?! Severus se renfrogna légèrement. Décidément, Sibille demeurait infréquentable. Soit elle était consciente et en état d'ébriété avancée, soit elle noyait son entourage de mauvais augures. Le potionniste en avait raz la baguette d'entendre parler de son avenir, d'une si sombre façon. Il savait que Voldemort reviendrait, il y était préparé depuis plusieurs années, bien qu'il redoutât ce moment. Mais voilà qu'il apprenait par cette vieille chouette, qu'il commettrait un acte impardonnable. Severus soupira douloureusement. Il se baissa pour récupérer sa baguette, referma les pans de sa cape autour de ses épaules, pris d'un violent frisson. Voilà qu'il se sentait vieux avant l'heure. La vie cesserait-elle un jour de s'acharner contre lui ?

Ce fut à ce moment précis que le sombre professeur devina la présence de Mia dans ses appartements et son cœur manqua un battement. Bon finalement la vie pouvait être douce de temps en temps, constata-t-il. Et il retourna aux cachots sans se rendre compte qu'il courait.

**🧙‍♂️

Et voilaaaaa. Fin de cette 8e histoire

Toujours sur une note légère malgré la gravité de la situation (de la prophétie) ^^

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Fragments De ViesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant