Chapitre 7

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J'étais en train de préparer mon sac à dos dans ma chambre fraîchement épurée de ses posters et de ses babioles d'adolescente quand mon téléphone sonna. C'était Louise.


— Allô ?

— Salut, tu vas bien ?

— Oui, je prépare mon sac, et toi, ça va ?

— Ouais, euh, te mets pas en colère d'accord... je te passe Clément.

— Quoi ? Pourquoi ?

— Allô, Dany ?

— Salut, dis-je un peu perplexe.

— Hum, comme tu es célibataire maintenant et qu'on a loué le chalet pour 8, il reste une place, en quelque sorte. Du coup, avec Louise, on s'est dit qu'on pouvait inviter quelqu'un en plus. Et il se trouve que... euh, Noah revient en France ce mois-ci et il est disponible...


Je savais qu'il attendait une réponse et qu'il en avait peur.


— Tu te fous de moi ?

— Écoute, il dormira dans le salon, vous serez même pas obligés de vous parler...

— Passe-moi Louise, dis-je.

— Euh, elle préfère pas, tu lui fais peur.


Je l'entendis rire derrière lui, complètement terrifiée, c'est clair !


— Je vous déteste, dis-je sans le penser.

— Allez, ce sera l'occasion d'enterrer la hache de guerre, on est plus des gosses.


Forcément, ils ne savaient pas que la colère que je ressentais pour Noah n'avait plus rien à voir avec nos gamineries. Personne ne savait que, ma première fois, c'était avec lui. Et la sienne avec moi... Et qu'il était aussi le premier garçon à m'avoir brisé le cœur.


*

2009

Comment tu savais que c'était ma première fois aussi ? demanda-t-il alors qu'il me tenait dans ses bras.

T'es jamais sorti avec personne...

Mais j'aurais pu, sans en parler.

C'est vrai...

Est-ce que c'est parce que je m'y prends mal que tu as deviné ?


Je ris... J'étais surprise que Noah le brave se sente vulnérable avec moi.


Quoi ? Pourquoi tu rigoles ?


Mais il riait aussi.


Hier on se détestait et maintenant je suis dans ton lit, je crois que tu t'y prends plutôt bien au contraire.


On s'amusait un peu de la situation sans se lâcher. Puis il bougea pour passer au-dessus de moi et m'embrasser. C'était trop bon pour être bizarre maintenant.


C'était pas calculé, tu sais, j'avais pas prévu ça.

Je sais, soufflai-je, plus sérieuse.

Mais c'était vraiment... incroyable.


Je sentais le feu monter dans mon ventre, dans mes joues... C'était inattendu. On avait déjà du mal à comprendre comment on en était arrivés là, alors j'imaginais la réaction des autres. J'avais peur de ce qu'il se passerait une fois qu'on sortirait de cette chambre. J'avais toujours peur de ce qui pouvait m'arriver de bien.

Ce matin, alors que je m'étais réveillée avant lui, un souvenir longtemps refoulé m'était revenu en mémoire. J'avais revu mon père rentrer à la maison pour le dîner. Du haut de mes 10 ans j'avais su lire la crainte de ma mère dans ses yeux. Elle redoutait ma réaction. Je n'étais plus la petite fille pleine d'espoir qui attendait le jour où ses parents allaient se remettre ensemble. Après des mois sans nouvelles de lui, j'avais cessé d'attendre après mon géniteur. Et puis, ce soir-là, il avait su me faire rire, il avait fait mille promesses, il avait rempli mon cœur d'un espoir brûlant. Nous avions passé la soirée à regarder des dessins animés jusqu'à ce que je me rende compte que papa, assis dans le canapé, tenait ma maman endormie dans ses bras. C'était familier, c'était douloureux, c'était beau. Je m'étais levée pour aller me coucher sans un bruit. Demain matin, il serait là, demain matin tout serait comme avant, mieux encore ! Demain, je serai la plus heureuse.

Il était passé à côté de moi, assise sur les marches du perron au petit matin, sans me regarder. Mais il avait regardé ma mère avec une froide indifférence. En un claquement de portière il avait emporté ses fausses promesses et la confiance que j'avais cru retrouver. Maman avait pleuré, elle ne se cachait plus. Peut-être qu'elle voulait me donner une leçon, m'apprendre quelque chose sur la vie, ou peut-être qu'elle n'avait plus la force d'attendre le soir, que je sois endormie, pour pleurer seule dans sa chambre.

Maintenant que nous étions réveillés, que nous devions penser à l'après, je n'étais plus sûre de rien.


Noah... commençai-je, je voudrais qu'on garde ça pour nous, tu veux bien ?

Tu veux dire, même pas en parler avec les potes ?


Il plissa les yeux comme s'il ne comprenait pas. Évidemment qu'il ne comprenait pas. Ce n'était pas plus clair dans mon esprit. Tout ce que je pensais c'était que si ça devait s'arrêter demain, je ne voulais pas que tout le monde sache que j'avais mal.


Même pas, confirmai-je timidement.

OK... répondit-il un peu sèchement, les sourcils froncés.


Il se redressa pour s'asseoir au bord de son lit, me tournant le dos.


Noah, ça va ?


Je tentais une approche en posant une main douce sur son épaule. Mais il la repoussa d'un mouvement brusque sans me regarder.


Tu devrais rentrer chez toi, Danielle, me chassa-t-il avec la violence d'une porte claquée par un vent glacial.

Même pas en rêve #1 (à nouveau disponible)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant