Chapitre 14

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Je me retrouvai seule dans la salle de bains après le départ de Louise. Les trois couples se rendaient en ville pour manger au restaurant et traîner à deux. Et j'angoissais un peu de rester ici maintenant que je savais ce que je savais...


*

Noah était amoureux de toi en primaire, au collège et encore au lycée, même s'il refusait de l'avouer.

Non, Noah me déteste, dis-je en croisant les bras sur ma poitrine.

Dany, oublie un peu vos gamineries et essaye de voir ça autrement. Noah était toujours en train de chercher un moyen de te faire enrager, il voulait attirer ton attention. Je t'accorde qu'il est pas doué, que le message n'était pas clair... Mais tu le connais, c'est Noah...

Il n'a jamais rien dit...

Même pas cette fameuse nuit ? lança Louise en souriant.

Non, il m'a carrément virée de son lit, c'est pas le comportement d'un mec amoureux.

Je sais pas... Je le comprends pas toujours, tu sais. Sa stratégie de séduction me dépasse. Je ne sais pas si j'en serais là où j'en suis avec Clément s'il m'avait draguée en me balançant un ballon en pleine tête !

On rit en repensant à cette époque. J'avais beau avoir passé toutes ces années à me venger des mauvais coups de Noah, j'en gardais de bons souvenirs. Tout finissait toujours dans les rires, même si c'était pour rire de l'un ou de l'autre.

*


J'étais assise dans le canapé, le nez dans un des bouquins à disposition dans la petite bibliothèque. Je faisais semblant de lire, j'essayais de tourner les pages régulièrement pour être crédible. Mais connaître la vie secrète des bousiers ne me passionnait pas plus que ça... Noah était dans la cuisine, je l'entendais brasser la vaisselle de là où j'étais. Je me sentais bizarre après les révélations de Louise. Je repassais quelques images de notre enfance dans mon esprit, comme pour trouver un signe, quelque chose que j'aurais manqué... et j'avais toujours du mal à y croire. Pourtant il y avait bien eu une fois, au lycée, où je m'étais posé des questions sur lui. Et sur ce que je ressentais vraiment... Quand il m'avait plaquée dans l'herbe après que j'ai lancé ses chaussures dans un arbre. J'ai cru être allée trop loin, parce qu'il avait changé ensuite. Il avait pris ses distances et, chaque fois que je l'avais cherché, taquiné et embêté, il s'était vexé. Ce n'était pourtant pas son genre, lui qui riait de tout, tout le temps.

L'adolescente que j'étais s'était demandé pourquoi il était comme ça. Pourquoi ça m'ennuyait à ce point ? Pourquoi Noah était aussi crétin ? Pourquoi j'y pensais le soir avant de m'endormir ? Pourquoi j'avais l'impression que ses blagues nulles me manquaient ? Et pourquoi tout ce qu'il faisait, disait ou pensait m'énervait alors même qu'il m'arrivait d'être d'accord avec lui ? Et, parce que toutes ces pensées se mélangeaient dans ma tête, je devenais aussi susceptible que lui. Sur la défensive.

Un bruit de verre brisé me sortit de mes pensées. J'allai dans la cuisine pour voir ce qu'il se passait et je le trouvai penché au-dessus de l'évier en train de se rincer la main. Il s'était coupé avec un morceau de l'assiette qu'il avait fait tomber.


— Besoin d'aide ? dis-je en lui tendant le rouleau de Sopalin.

— C'est rien.

— Je vais chercher des pansements.


Je fouillai ma valise pour trouver ma trousse à pharmacie, en bonne Miss Catastrophe et victime des insectes vicieux, j'avais toujours le minimum nécessaire pour survivre. J'allais revenir dans la cuisine quand il approcha, le doigt enroulé dans une feuille de Sopalin. Il s'assit sur le canapé et retira délicatement le papier pour vérifier si ça saignait toujours.


— OK, ne panique pas, d'accord, tu vas t'en sortir, blaguai-je en sortant un pansement de ma trousse de façon dramatique.

— Allez, dépêche-toi avant que j'en mette partout, râla-t-il sans manquer de sourire.

— Tu veux mordre dans un bout de bois ou tu penses pouvoir supporter la douleur ? continuai-je en retirant les petites bandes.

— Très drôle !


Je savais qu'il me trouvait drôle. Et je devinais qu'il essayait de rester impassible. Ce qui me donnait plus envie de renchérir que d'arrêter. Enfin, il tendit son doigt vers moi en se cachant les yeux avec sa main libre, tordant sa bouche grossièrement pour faire semblant d'avoir peur. Je rigolai en le voyant faire et je me penchai sur son doigt coupé pour coller le pansement. Je sentis sa main trembler légèrement dans la mienne, ou bien était-ce moi ? Je pouvais nier autant que je le voulais, ce contact ne me laissait pas indifférente.


— OK, tu as été très courageux, tu pourras avoir de la glace pour le dessert, dis-je en posant ma main sur son épaule.


Même si je ne contrôlais pas vraiment mes gestes, j'étais consciente que ça ne me ressemblait pas d'être tactile comme ça... Pourquoi je n'arrêtais pas ? Pourquoi j'aimais le contact de sa peau ? La solidité de cette épaule ? Le sourire qu'il me rendait ? Les révélations de Louise étaient en train de me retourner le cerveau ! Il fallait vite que je me reprenne avant que Noah ne s'en rende compte.

Même pas en rêve #1 (à nouveau disponible)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant