La lune par la fenêtre

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Le lendemain je me réveille avec le crâne aussi lourd qu'une boule de bowling. A peine ais-je mis un pied à terre que ma tête se met à tourner comme si j'étais sur un tourniquet qui ne voulait plus s'arrêter. Je suis obligée de me raccrocher aux barrières de mon lit pour ne pas tomber. Le poids de la nuit encore sur mes paupières, je ne remarque pas tout de suite le petit calepin posé à l'arrache sur mon oreiller. Ce n'est que quand ma main le heurte que je prends conscience sa présence. Je sursaute, le même frisson qu'hier me traversant l'échine. Du bout des doigts, comme si ce carnet était la chose la plus fragile du monde, je l'ouvre et laisse mon regard se balader au fil des lignes que je lis. Je lâche un soupir.

Sur le coup, cette idée m'avait paru fabuleuse. Maintenant, je me rends compte que c'est un peu bizarre d'écrire la vie de quelqu'un d'autre.

***

J'aurais dû être au lycée il y a bien une heure mais je suis dans mon lit, tremblante de fièvre et sans force. C'est la quatrième fois que je relis le contenu de mon calepin et je me retiens de rajouter quelques lignes à mon histoire. Que penserait Cassandre si elle savait que je suis barjo au point d'écrire une histoire sur elle ?

Je réfléchis quelques secondes et me décide enfin, non sans un goût amer de culpabilité dans la bouche. De toute façon on ne se reverra jamais et je n'ai rien d'autre à faire pour l'instant.

Les premiers mots marqués sur la page me donnent une sensation de bien-être immédiat.

« Cassie avait un petit ami parfait, des amis parfaits, une vie parfaite, quand elle désirait quelque chose, elle se présentait devant elle en l'espace d'un claquement de doigts. La seule chose sur cette terre qu'elle ne pouvait pas posséder était Harper.

Une simple amie d'enfance qui, avec le temps s'en était allée, comme un dessin fait sur une plage qui se serait fait balayer par les cruelles vagues de l'oubli. Elle avait continué son chemin, omettant Cassie derrière elle, ne lui laissant qu'un flou souvenir de ses yeux nacrés et de son odeur fleurie. Dans l'avant dernier tiroir de son bureau, Cassandre avait une petite valise remplie de photos prises cette fameuse année, une des plus belles qu'elle n'ait jamais vécu. On pouvait voir les deux amies sauter dans les feuilles orangées lors d'un soir d'automne glacé, dévorer une glace près de la mer azur ou encore s'enlacer tendrement, dans une joyeuse effusion d'amitié. La vérité, c'est que dans ces moments-, elle ne savait plus quoi penser. Être proche d'Harper signifiait le Graal, pouvait la faire sourire pour le reste de la journée ou encore pleurer de joie. Au simple contact de sa main, elle avait l'impression de tomber dans le vide et de ne pouvoir se raccrocher à rien, entraînée tant bien que mal dans les bas fonds du doute. Ce doute qui la tourmentait pendant des nuits entières, la seule chose qui pouvait lui faire peur. Cette hésitation permanente quant à son amie et à ce qu'elle ressentait pour elle.

ON VEUT TOUS VIVRE T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant