Chapitre 41 - Mission de collecte

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Eddie émergea brusquement de la vision, debout au milieu de la pièce ; les yeux grands ouverts, le souffle court.

Submergé par une vague d'hystérie, alors qu'il cherchait frénétiquement à se débarrasser des racines invisibles qui semblaient encore l'enserrer ; il agita ses bras et ses jambes, comme s'il voulait les repousser, criant de terreur et de frustration.

Ozzie se mit sur ses pattes arrières et posa ses pattes sur son torse ; l'obligeant à reculer et à se laisser glisser contre l'une des parois ondulée. Respirant profondément, il réussit à se calmer légèrement. Ses mains tremblaient tandis qu'il les portait à son visage. Il avait du mal à croire à la réalité du hangar à bateau qui l'entourait.

- Ça va, Ozzie... Ça va... murmura-t-il, passant une main tremblante sur la peau grêlée de l'animal. Ce n'était qu'une vision... Rien qu'une putain de vision.

Il prit quelques instants pour reprendre son souffle, essayant de rassembler ses pensées chaotiques. La terreur s'estompait peu à peu, laissant place à une profonde confusion. Eddie comprenait le sens de cette vision ; Vecna essayait de l'atteindre via cet homme. Cet infirmier, gardien ou... peut importe ce qu'il était. 


* * *

Avec une lenteur maladroite, il fouilla autour de lui, découvrant des restes de boîtes de céréales ouverte et quelques bouteilles en verre teinté.

- Je suppose que c'est mon déjeuner, soupira-t-il, prenant une bouchée de céréales et une gorgée de bière.

Il continuait de se remplir les joues en regardant Ozzie se coincer la tête dans les boîtes en carton jusqu'à ce qu'il comprît que ce n'était pas les céréales qu'il essayait d'atteindre, mais bien les insectes qui y avaient élu domicile.

Il laissa échapper un juron étouffé et posa précipitamment sa boîte.

* * *

Attendant avec son maître que le jour suivant arrive ; Ozzie se leva et se mit à fouiller les coins sombres du hangar. Il revint vers Eddie, la queue battante. Tel un vrai chien domestique.

Eddie fronça les sourcils en voyant ce que tenait Ozzie. C'était un oiseau mort, un petit moineau. Il le déposa devant Eddie avec fierté, comme s'il avait accompli une grande prouesse.

- Ozzie pas encore. Non, c'est dég...

Ozzie le poussa joyeusement vers lui, attendant des éloges pour sa découverte.

Ne recevant aucun signe gratifiant, il retourna explorer les recoins du hangar et revint peu de temps après avec un autre trophée, cette fois-ci un rongeur sans vie.

Bon sang, Ozzie, tu ne peux pas rapporter des choses plus... agréables ? proposa Eddie, légèrement dégoûté, mais fasciné par ces découvertes.

Mais Ozzie semblait satisfait de ce thème. Il continuait à chercher et à rapporter des créatures mortes, les déposant devant Eddie avec une fierté non dissimulée.

Peu à peu, une petite pile de trophées s'accumula devant Eddie, comprenant divers oiseaux, rongeurs et même quelques insectes encore à demi-vivants.

Tu comptes les manger au moins ?!

Ozzie lui posa un rat sur les genoux. Eddie sursauta et se cogna la tête sur une étagère pendant que le rongeur filait en cuinant.

Encore sous le choc de sa vision et légèrement désorienté, il se frotta le haut du crâne.

Ozzie, toujours sur sa mission de collecte ; continuait de rapporter ses macabres trouvailles.

Le chien déposa un autre petit cadavre à côté de la pile grandissante, cette fois-ci un lézard aux couleurs vives. Eddie ne pouvait s'empêcher de trouver la situation à la fois comique et perturbante.

Je suppose que c'est ta façon de m'aider à passer le temps. Attends, tu fais quoi là ? Ozzie ?!

Ozzie venait de sauter dans une bâche accrochée au mur. Il revint vers Eddie en poussant cette fois-ci du museau ; une petite créature noire. Eddie se figea instantanément, les yeux écarquillés.

- Non, pas ça, Ozzie... pas ça. T'approche pas de moi avec ça.

La petite chauve-souris battait des ailes ; tournant sur elle-même. Inoffensive et désorientée. Mais Eddie avait du mal à détacher son regard de la petite créature. Il se mordit la lèvre inférieure, essayant de reprendre contenance. La sueur perla sur son front alors qu'il tentait de rassembler le courage de déplacer la chauve-souris hors de sa vue.

Il s'efforça de ne pas penser à ses ailes, à ses pattes frêles, et à l'idée qu'elle puisse s'envoler brusquement vers lui. La respiration saccadée, il essaya de se calmer.

C'est qu'une chauve-souris d'ici, pas du monde à l'envers. Tu ne dois pas en avoir p..peur. Bon sang, Ozzie. Peux-tu... peux-tu l'emmener ailleurs ?

Ozzie semblait un peu confus par la réaction d'Eddie, mais il finit par gober la petite créature.

Ozzie, ne la tue pas. Ozzie ! Je comprends que tu veux m'aider, mais s'il te plaît, ne tue pas cette chauve-souris.

Ses pétales s'ouvrirent ; l'animal battit des ailes. Les utilisant comme des nageoires pour se dépêtrer de la flaque de bave.

Écoute, Ozzie, je sais que j'ai une peur irrationnelle de ces bestioles, mais celle-ci est différente. Elle ne vient pas du monde à l'envers. Elle ne me fera pas de mal.

C'est ça, Ozzie, doucement. Regarde, elle n'est pas agressive. Il la reniflait.

Eddie prit une profonde inspiration et tendit la main pour saisir doucement la chauve-souris.

D'accord, petite chauve-souris, il est temps de te remettre dehors.

Il se releva d'une main ; évitant le bas de l'étagère. D'accord, tu es presque libre. Encore un peu de courage. Ozzie le suivit jusqu'à la porte.

Non, pas comme ça. L'animal s'aplatissait sur sa main. Il pouvait sentir ses petits doigts s'agripper aux siens comme des petits crochets. Cela lui donnait des frissons. Il avait peur qu'elle le morde. Il ouvrit la porte.

Voilà, tu es libre. Aller. Dégage maintenant.

La créature continuait de s'agripper fermement. T'as envie d'attendre et de sécher un peu avant de t'envoler, c'est ça ? Mais pas moi.  Aller, fous le camp !

Pitiéééé...

Il avait cruellement envie de secouer sa main.

Bon, c'est pas comme si j'avais quelque chose de mieux à faire. Il s'assit à l'entrée du hangar et attira l'animal sur le haut de son genou.

Ozziiie ; qu'est-ce que tu me fais faire...

Il resta là ; genoux collés contre la poitrine ; à contempler pendant une bonne heure la petite créature qui se nettoyait tranquillement.

Ozzie, couché à côté de lui dans l'entrebâillement de la porte, redressa la tête au bruissement de ses ailes.

Ça y est, elle est prête.

Ils la regardèrent tous les deux s'envoler.

Demain, je vais à mon enterrement Ozzie ; je te donne la tâche de débarrasser cet endroit de toute bestiole morte que tu trouveras en mon absence.

Eddie Munson/Kastheory - Pétales closesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant