Chapitre 43 - Derrière les tombes

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Son oncle venait de descendre de l'estrade. Arrivant trop tard, il n'avait pu entendre ce qu'il se disait à son sujet.

- Quel gâchis. Personne n'a eu l'idée de passer nos morceaux à mon enterrement. Qui sait, ça aurait pu faire décoller ma carrière post-mortem.

- Encore plus quand ils reviennent en mort-vivant, prêt à faire une danse de zombie, Eddie ?!

Il se retourna brusquement, les yeux écarquillés, la poitrine palpitante, pour faire face à Robin qui se tenait là avec un sourire taquin.

Il tira sur son bras.

- Baisse-toi, je suis en infiltration ! Et j'ai toujours un cœur qui bat, je sais qu'il est vide ; le cercueil ; et j'ai pas besoin de ton aide pour me pousser dedans à coup de crise cardiaque.

Ils se cachaient derrière les tombes.

Alors, ils t'ont tout dis à ce que je peux comprendre.

Eddie ne détournait pas le regard ; son oncle était à présent seul au premier rang. Assis sur une chaise.

- Comprendre ?

- Oui, t'as pas peur de moi. T'as même pas l'air éton...

- Tu me terrorises.

- Moi. Terroriser l'intrépide Buckley ?! Moi le terrifiant mort-vivant qui sait pas mettre un pied devant l'autre. Fais-moi rire. Il dit ça de manière détachée.

Robin laissa s'installer un silence timide ; Eddie se pencha en arrière.

Vraiment ? Au pire, considère-moi comme un gentil fantôme.

- Okay. Donc t'es d'accord pour que je te vois plus comme Casper, le gentil petit fantôme que comme un zombie maladroit ?

- Casper, vraiment. Robin hocha les épaules.

- On est dans l'ambiance.

Eddie se sentit obligé de se retourner.

- T'inquiète pas, Robin, je n'ai pas encore succombé à l'envie de manger des cerveaux. Je suis encore moi-même, Casper ou zombie.

- Comment tu vas ? Un petit rire sarcastique vint secouer les épaules d'Eddie.

- S'il te plaît, dit-elle sincèrement. Elle attira son attention en touchant son bras. Tu as traversé tellement de trucs bizarres que... c'est... c'est... t'es revenu d'entre les morts. Comment tu te sens ?

Elle attendait vraiment une réponse. Robin fouillait son âme à travers ses yeux, prête à écouter et à comprendre.

- J'ai appris des trucs sur mon oncle, sur mon passé. J'ai l'impression d'être un étranger dans mon propre corps. Un danger pour moi-même. Alors comment je vais, je le sais pas moi-même sincèrement. Sur ces derniers mots, il ne parvint à soutenir son regard.

- Tu es là pour ton oncle ou pour assouvir un désir glauque d'assister à son propre enterrement ?

- Tu n'essaies pas de...

- Ce n'est pas à moi de dire comment tu dois aller, Eddie.

- Merci.

Tu sais... je ne comprends pas vraiment pourquoi ils sont tous là. Ils savent que je suis vivant, alors pourquoi...

Robin l'interrompit doucement.

- Eddie, ils sont là parce qu'ils t'apprécient et qu'ils se soucient de toi, peu importe ce qui s'est passé. Même si tu as traversé des choses étranges, ça ne change pas qui tu es pour eux.

- J'en suis pas si sûr.

J'ai peur, Robin. Peur qu'ils n'aient plus confiance en moi, qu'ils aient peur de moi après tout ça. Ce qui est déjà le cas.

Robin posa doucement sa main sur l'épaule d'Eddie.

- Eddie ; l'amitié vraie est solide, ça traverse les épreuves ce truc-là. Si tes amis sont ici maintenant, c'est parce qu'ils veulent te montrer qu'ils sont là pour toi. Peut importe comment ils le montrent.

Donne-leur une chance de te montrer qu'ils sont prêts à te soutenir, peu importe ce qu'il s'est passé.

- Ils savaient que je viendrais ?

- Dustin te connaît, Eddie. C'est le truc le plus Métal que tu puisses faire.

- T'as pas tort. Il regarda le groupe d'ami. Mike et Lucas avaient dû être mis au courant, ils ne partageaient pas la même peine que d'autres. Gareth non plus. Même s'il paraissait blanc comme un mort.

Nancy et Erica étaient là, elles aussi.

Je ne m'attendais pas à les voir ici, surtout après tout ce qu'il s'est passé. Robin comprit de qui il parlait.

- Eddie, tu sais que les gens peuvent être plus compréhensifs qu'on ne le pense parfois. Peut-être qu'elles sont venues pour montrer qu'elles sont prêtes à laisser le passé derrière elles, tout comme tu essaies de le faire.

- Tu trouves que j'essaie de laisser le passé derrière moi.

Robin contempla un instant Eddie, puis elle plongea la main dans sa poche et en sortit un papier chiffonné. C'était une photo montrant le groupe Hellfire. Un avis de recherche.

- Regarde ça, Eddie. C'était avant tout ce bazar. Vous étiez heureux, insouciants, et vous cassiez la tête d'ogres aux crottes de nez pendouillantes, ensemble.

Eddie émit un petit rire.

- Ouais, je m'en souviens. Mais ça s'est un autre passé, tu vois, un passé plus simple. Je ne combat pas le même en cet instant.

- Laisser le passé derrière toi ne signifie pas oublier, mais plutôt se rappeler d'où tu viens tout en avançant vers l'avenir. C'est ce que tu essaies de faire, Eddie, et c'est admirable.

- Si tu le dis.

Eddie observait à nouveau son oncle avec un mélange complexe de gratitude et de tristesse. Wayne avait tenté de lui rendre sa mémoire, de lui permettre de comprendre son passé, mais cela avait provoqué une avalanche d'émotions inattendues et douloureuses pour lui.

Il était à la fois un allié qui cherchait à l'aider et un homme dépassé par les circonstances. Ne calculant plus aucune limite. Et le blessant au passage.

- Je pense l'avoir pardonné.

Ils continuèrent à observer discrètement la cérémonie depuis leur cachette, partageant des sourires complices lorsque des policiers ; assistant eux aussi à l'enterrement ; commençaient à trouver le temps long et piquaient du nez.

- Aaah... crampe, crampe... Elle le poussa pour qu'il se dégage un peu et qu'elle puisse étendre sa jambe.

Ses mains se mirent à trembler doucement. Un contraste frappant avec son attitude enjouée. Un état qui n'était pourtant pas invoqué par sa personne. Était-ce la situation en elle-même qui la stressait ?

Il ne pouvait pourtant s'empêcher de se demander si elle cachait quelque chose, si elle avait des préoccupations ou des angoisses qu'elle gardait pour elle-même ; le concernant.

Cependant, il remarquait que Robin regardait fréquemment par-dessus son épaule pour vérifier qui regardait. Elle semblait se méfier des autres, comme si elle s'attendait à ce que quelqu'un vienne poser des questions ou la juger.

Nancy et Érica. Il était évident qu'elle était tendue en leur présence, comme si elle craignait que des tensions ne se développent.

Il comprit. Elle lui avait fait réaliser que laisser le passé derrière lui et donner une chance aux autres de changer était la meilleure solution.

Ces petits détails lui montraient que Robin elle-même était aux prises avec ses propres démons émotionnels et qu'elle n'était pas aussi stable qu'elle pouvait le paraître.

Elle cachait ses inquiétudes derrière son attitude taquine.

Manquant de confiance en elle.

Eddie Munson/Kastheory - Pétales closesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant