𝐄𝐏𝐈𝐋𝐎𝐆𝐔𝐄

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-Tu vois cette photo ?, me dit Taylor. On rentrait de la piscine. Letitia venait de finir son cours de natation.

Nous sommes dans la chambre de Taylor, assises sur des poufs bleus foncés, emmitouflées dans nos combinaisons pyjama assorties ayant Noël pour thème. Sur son téléphone, ma cousine fait progressivement défiler les photos représentant elle-même, sa cousine et leur père, Robbie Young. La joie se lit sur chacun de leur visage, et il est dur de penser qu'ils ont vécu des épisodes aussi tragiques. À un moment donné, Taylor me montre une vidéo dans laquelle Letitia et elle sont en train de préparer des biscuits pour Noël.

-Elle aimait beaucoup cuisiner, dit Taylor, nostalgique. Son truc à elle, c'était la pâtisserie. Elle disait qu'elle deviendrait la plus grande pâtissière du monde.

Je l'observe attentivement alors qu'elle me raconte tout ça. Son visage attristé montre qu'elle éprouve toujours de la peine d'avoir perdu sa petite sœur. Toutefois, le fait qu'elle puisse m'en parler aussi ouvertement prouve qu'elle a su faire face à son deuil. Tout comme ma tante d'ailleurs, lorsqu'elle et Taylor ont mis les choses au clair. Et en ce qui me concerne, ces révélations qui m'ont fait tant de peine m'ont permis de mieux comprendre ce que traversait ma famille, aussi bien du côté maternel que du côté paternel.

Finalement, c'est comme ça que j'ai compris à quel point ma famille s'est toujours souciée de moi, peu importent les circonstances. Et je suis persuadée que c'est loin d'être fini.

-Ça te dirait qu'on fasse des biscuits pour Noël ?, je demande à Taylor. Par contre je te préviens, il y a de fortes chances que je lèche la pâte pendant la préparation.

Cette remarque lui arrache un rire.

-Je pensais qu'avec tes compétences culinaires, tu penserais plutôt à préparer une bonne dinde aux marrons !

-Oula, tu m'en demandes trop, là ! Repasse me voir quand j'aurais obtenu dix-huit brevets professionnels d'arts de la cuisine.

Nouvel éclat de rire de la part de Taylor, alors qu'elle entoure mes épaules de son bras.

-T'es vraiment pas possible.

Là-dessus, elle me plaque un baiser sonore sur la joue.

-Ma Joyce.

En guise de réponse, je pose doucement ma tête contre la sienne.

***

C'est de loin le meilleur dîner que j'ai passé avec ma tante et ma cousine depuis que je suis arrivée ici. J'ignore si l'ambiance festive de Noël qui règne y est pour quelque chose, mais c'est franchement agréable de parler sans avoir à se crier dessus.

Aussi, alors que nous évoquons notre passage au studio dans lequel Rosa tourne son prochain film tout en dégustant la dinde farcie, je suis agréablement surprise de voir le visage de ma tante et de ma cousine rayonnant de sérénité. Les voir toutes deux à ce point détendues et contentes d'être ensemble me comble. Vraiment, il n'y a rien de plus beau que de voir des gens heureux. Surtout quand on pense aux orages émotionnels que nous avons pu vivre.

Le processus de guérison a été long, mais il en a valu la peine.

L'aboiement de Pégase à côté de moi me fait sortir de ma rêverie.

-Hé mon grand, t'as encore faim ?

En disant cela, je me saisis de ma fourchette pour lui tendre un morceau de viande. Mon ami canin s'en saisit aussitôt avant d'engloutir le bout de dinde.

-Tu devrais faire laver ta fourchette, me recommande ma tante Rosa.

-Oh, c'est pas la peine. Je compte pas me resservir. Je suis déjà pleine comme un œuf.

𝐉𝐎𝐘𝐂𝐄 𝐌𝐀𝐑𝐓𝐈𝐍𝐄𝐙Où les histoires vivent. Découvrez maintenant