Chapitre 2

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J'ai passé ma première semaine enfermé à commander des plats sur Uber Eat. Puis j'ai finalement trouvé ça plus amusant d'envoyer les boniches, qui sont sensés m'aider en cas de problème, faire mes courses parfois douze fois sur une journée. Ces imbéciles m'écoutent sans broncher parce qu'ils ne veulent pas que j'accapare le temps du numéro deux inutilement. Ma vie se résume à présent à faire chier des agents. C'est palpitant.

On toque à la porte. Je suis surpris d'y trouver Hawks derrière, un sachet de course en main. Je lève un sourcil interrogateur.

-Qu'est ce que tu fous là?

-Je m'invite pour manger, ça ne se voit pas?

Je pouffe de rire en lui barrant le passage.

-Dans tes rêves, ouais.

Il se faufile à toute vitesse dans le recoin que mon corps n'obstruait pas. C'est un faucon ou une souris? J'ai à peine le temps de me retourner qu'il est déjà à table. Il déballe un poulet rôti. Je soupire et le rejoins en trainant les pieds. Je mange en l'écoutant faire un monologue, jusqu'à ce qu'il désigne mon torse nu du doigt.

-T'as pas fait acheter de vêtements aux pauvres agents qui courent dans tous les sens depuis quelques jours?

-Je supporte mal la chaleur. Dis-je simplement en haussant les épaules.

-Ça se voit. Répond-il en zieutant mes cicatrices.

Je grince des dents, pour qui il se prend. Je lui lance un os à la gueule, mais une plume l'empêche d'atteindre sa cible.

-Tu peux bien parler. Pointant à mon tours la marque qu'il a sur la joue et dans sa nuque.

-Tu aimes? C'est un ami qui me l'a offert.

Je sers les dents. Il me donne envie de le carboniser sur place.

-On est pas pote.

Il fait mine d'être blessé, main sur la poitrine.

-Aïe, mon coeur saigne. On s'entendait bien pourtant, avant.

-Avant quoi? Quand tout était faux tu veux dire?

-C'est pas toi qui m'a dit que tu t'en moquais?

Je perds patience. Je ne peux me plus voir sa tronche d'imbécile heureux une seconde de plus.

-Sors de chez moi.

-Déjà? On vient à peine de finir de manger. Je pensais faire une soirée pyjamas!

-Dégage.

-Comme tu voudras le rabat joie. Dit il en haussant les épaules. Il s'arrête devant la porte. Demain soit dans l'entrée à 10h.

Il s'en va sans un mot de plus. Je balance une assiette à travers la pièce. Elle s'écrase contre le mur avant de tomber en miette.

-Fait chier.

J'arrive pile à l'heure dans le hall d'entrée de l'immeuble. Hawks m'y attend déjà, il est tout joyeux. Lorsque nous sortons, je suis surpris de ne pas voir de voiture garée.

-On y va pas en volant, hein?

-Pourquoi, t'as le vertige? Réplique-t-il amusé.

-Non, je ne veux juste pas être collé à toi pendant le trajet.

Il fait une moue triste. Je lève les yeux au ciel.

-Ta psychologue vient en ville pour les rendez-vous. Le cabinet n'est pas loin, on peut marcher.

-Mais c'est super loin du pénitencier.

-Je ne peux pas me permettre 9h de route juste pour que tu puisses aller à ton rendez-vous toutes les deux semaines, j'ai une agence à faire tourner. Elle ne voulait pas que tu sois contraint de changer de psy. Apparement tu es encore trop instable pour subir une nouvelle trahison.

Cette femme est définitivement bien trop gentille.

-Et je ne suis pas trop instable pour que tu me le dises?

-Non. Je pense que je peux te parler ouvertement, tu es plus solide psychologiquement que ce que tu en as l'air. Sinon tu m'aurais arracher la face hier soir.

-C'était un test? Je demande en ricanant.

-Pour voir si tu avais encore de l'humour? Oui, et tu as totalement échoué. Dommage.

-Putain tu sais vraiment pas être sérieux plus de trois phrases.

Il y a du monde dans les rues. Je me fais dévisager par les passants, tout autant que le héros qui se tient à ma gauche. Les gens ont d'abord une mine heureuse en l'apercevant, prêts à l'aborder pour un autographe, puis ils se ravisent en me voyant à ses côtés. Hawks ne calcule pas les regards désapprobateurs et signe chaque demande qu'on lui tend. Une de ses plumes vole jusqu'à une petite fille, l'empêchant de tomber de ses rollers. Un vrai sauveur dans l'âme.

Le cabinet est à une vingtaine de minutes à pied de l'appartement. Je ne suis pas mécontent d'arriver pour échapper à cette foule. Je me dirige vers l'accueil qui me demande de patienter dans la salle prévue à cet effet. Une femme en blouse blanche y entre quelques instants plus tard.

-Monsieur Toya Todoroki?

Je grimace. Elle en déduit que c'est bien moi.

-Je suis à vous dans 5 minutes, le temps de préparer la perfusion.

Il a été conclut que je recevrai mon traitement en même temps que mes rendez-vous psy. Théoriquement l'inhibiteur d'alter fonctionne un mois, mais ils ont trop peur que ça foire, alors j'y ai droit toutes les deux semaines.

-Tu n'aimes pas qu'on t'appelle par ce nom? Demande Hawks.

-Non. Et toi Keigo?

-Je comprends. Tu préfères Crématorium? Questionne-t-il les sourcils pincés.

Je grimace encore. Toya est mort il y a des années, et Créma je pense qu'il est mort aussi il y a 6 mois. Il ne reste plus que moi, enfin une coquille vide d'un espèce de moi.

-Appelle-moi Dabi.

Il me sourit sincèrement. Je ne l'avais jamais vu afficher cette expression. Je le dévisage perplexe.

L'infirmière revient avec la perfusion. Je soulève ma manche et elle désinfecte le pli de mon coude.

-L'aiguille est un peu grosse. Ça risque de piquer.

Comme si je ne l'avais pas eu dans le bras déjà une centaine de fois.

-Vous pouvez y aller, je ne suis pas douillet.

Hawks attrape ma main de la sienne, toutes les deux posées sur ma cuisses. Je les observe intrigué par ce geste, ne comprenant pas pourquoi il fait ça.

-Je suis sure que c'est ce qu'ils disent tous.

L'infirmière rit niaisement. Je récupère ma main devant cette scène gênante. Les deux tourtereaux continuent de roucouler jusqu'à ce que Odaiji Ni me délivre enfin de ce supplice.

-Alors comment se passe ces deux premières semaines?

-Le piaf m'exaspère, sinon tout roule.

-Je n'étais pas pour ce choix à la base. Mais finalement, peut-être qu'il pourrait t'apporter ce dont tu as besoin.

-Je vous aimais bien jusqu'à aujourd'hui.

Elle rit. Depuis le début de nos séances, j'ai plus l'impression de parler à une amie qu'à une professionnelle de la santé. Cette proximité me dérangeait au début, mais plus maintenant.

La séance s'écoule rapidement. À la fin de celle-ci, Odaiji Ni me donne son numéro. Au cas où j'aurais besoin de parler entre nos rencontres. Je peux la contacter à n'importe quelle heure, n'importe quel jour de la semaine. C'est c'air que je suis son chouchou parmi ses patients.

En sortant du cabinet Hawks m'attend toujours sur le même siège, mais l'infirmière a disparu. Je m'approche pour lui signaler que j'ai fini et que nous pouvons rentrer. Sur le chemin du retour, il y a toujours autant de groupies à son cul, c'est aberrant.

Les ailes de la réinsertion [ DabiHawks ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant