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Deux bonnes heures que je me prelassai dans mon bain. J'avais delaissé mon ordinateur et le roman a écrire pour une serie. Il neigeotait dehors et ce fut l'excuse pour ne pas sortir aujourd'hui. Encore. Et c'etait pareil depuis presque quinze jours.
Je somnolais dans l'eau chaude lorsqu'un coup un peu plus fort me fit sursauter. Mon ventre grogna dangereusement ensuite.
- T'as faim ? Interrogeai-je mon ventre.
Il avait tapé une fois, ce que je prenais pour un oui. Apres m'etre motivé pour sortir de l'eau puis emitouflée dans une combinaison doudou, je me trainais jusqu'à la cuisine à la recherche de douceurs chocolatées, qui étaient un peu mon péché mignon depuis le début de ma grossesse. Mais aussi, la cause au 8kg que j'avais déjà pris.
Le fond de mon placard à cochonnerie raisonna lorsque je l'ouvrit. Ce fut pareil pour le placard à nourriture raisonnable, et encore pire dans le frigo où il restait une demi pomme que je jetai directement à la poubelle.
Je regardais par la fenêtre. Il neigeait doucement. Il fallait que je sorte au risque de mourir de faim dans les prochaines heures.
J'étais bonne pour sortir, et cette fois je n'avais aucune excuse.

C'est en rejoignant ma voiture garée sur le parking principale du village que je l'aperçus. J'en fis tomber mes clés par terre tout en manquant de trebucher sur une plaque de verglas.
De l'autre cote de la rue, Maxime, l'ex futur homme de ma vie que j'avais quitté sur un coup de tête. C'etait il y a presque un an maintenant et je ne l'avais pas revu depuis.
Ma nervosité s'accentua quand je remarquais son bras enroulé autour de la taille d'une blonde d'au moins 1m80. Plus enamourés que jamais. Il déposait un baiser sur sa tempe, alors que je savais que Maxime détestait les effusions d'amour en public.
Je pensais l'avoir oublié apres une bonne douzaine de pot de glace engloutis et l'achat de part dans la boite Kleenex. En vrai, j'étais persuadé qu'il allait revenir en pleurnichant que je lui manquais. J'avais attendu, encore et encore... et voilà où j'en étais 10 mois après : enceinte, seule et irrémédiablement honteuse qu'il me voit dans cet état.
Je ramassais tant bien que mal mes clés en essayant de ne pas basculer en avant ce qui me vaudrait le video gag de l'année. J'accélèrais le pas en priant pour qu'ils ne me remarquent pas.
- He, Rach !
Ne te retourne pas. Ne le regarde pas. Ignore-les. Rien qu'à entendre mon surnom dans sa bouche me fis hérisser le poil. Mon sang se glaçat. Je mis une main sur mon ventre pour protéger mon poussin. Meme si cela ne servait strictement à rien.
- Rachel, c'est toi ?
Trop tard. Je sentis l'emprise sur mon bras et un petit coup sec pour m'aider à me retourner.
- Rach. Tu vas bien ?
- Maxime, qu'elle surprise, feignais-je. Qu'est-ce que tu fais là ?
- Je suis venu aider pour la saison. Comme d'habitude.
Maxime était le fils du concurrent direct de l'hôtel de mes parents, et accessoirement moniteur de ski l'hiver. Voici pourquoi mes parents m'en voulaient surement encore plus à ce jour.
- Je vois que tu te portes ... je vois que tout roule pour toi, se reprit-il.
Le coup d'oeil furtif qu'il jeta sur mon ventre d'une proéminence exacerbé à cause de cette doudoune argentée me fis monter le rouge aux joues. Il n'avait pas l'air au courant, bien que c'était le sujet principal du village ces 6 derniers mois.
- Tout roule. Tu m'excuses mais il faut que j'y aille. Avant la neige. A plus.
« A plus » mais qu'elle imbécile. Je ne voulais jamais le revoir. Jamais. Je me retournai vivement pour monter dans ma voiture en claquant la portière. Il me lançat un regard interrogé avant de tourner les talons.

Le magasin était presque vide. Ce qui n'était pas rare à une heure de la fermeture, et une tempête de neige annoncée. Les gens n'étaient pas comme moi : ceux qui habitaient ici à l'année avaient prévus avant, les plus riches se faisaient livrer des denrées par des services spécialisés.
Je flânai dans les rayons en essayant de me connecter avec bébé afin de savoir ce qu'il voulait manger. A mon grand désespoir, mon panier fut vite rempli de chips, bonbons et sodas. Un peu de fromage et du pain de mie, histoire de ...
Puis j'arrivai devant le rayon tant convoité ... presque vide, à mon grand désespoir. J'avais entendu Anna se plaindre sur des livraisons qui n'avaient pas pu avoir lieu, les camions bloqués dans la vallée suite à de violente chute de neige le week-end dernier.
Le rayon confiserie était, bien évidemment, vide, puisque je suppose que tout le monde avait fait du stock pour Noël. J'avançai doucement dans ce rayon désertique et, providence de mon côté, il restait seulement 2 paquets de Kinder Bueno. Ironie du sort : il s'agissait d'un reste de stock, disposé sur l'étagère la plus haute. J'essayai de grimper, mais mon ventre m'empêcher d'accéder à l'objet de mes convoitises. Je regardai à droite, puis à gauche. Personne. Aucune âme charitable pouvant me sortir de cette torpeur. Être enfermée seule dans un supermarché pouvait aussi être un bon sujet de roman, pensai-je en partant à la recherche d'un client ou d'un membre du personnel pouvant résoudre l'équation la plus difficile du moment.
Après une bonne dizaine de minute, je trouvai un jeune homme assez grand, pouvant m'aider à attraper les fameux paquets, que même bébé était tout excité de déguster. Ou plutôt je transposai mon excitation et il devait surement le ressentir.
- Voilà, c'est ici. C'était ici !
La grossesse décuplait mes sentiments. Je n'étais plus tellement maitre de moi-même mais j'arrivai tout de même à gérer. Mais aujourd'hui, la faim et la fatigue mêlées, j'aurai pu me rouler par terre au milieu du rayon chocolats lorsque j'aperçut que les paquets n'existaient plus.
Le jeune homme souleva ses épaules nonchalamment pour s'excuser de rien, me laissant les larmes aux yeux, plantée au milieu du rayon.
Mon regard fut attiré par le jeune homme qui ruminait sur ma gauche. Il ne pouvait pas faire ça en silence sérieusement ? Il y avait des choses grave dans ma vie : comme être en rupture de chocolat, enceinte de 6 mois, et sous une tempête de neige. Comment allais-je survire ?
Je détaillai l'homme. Grand, engoncé dans une doudoune mi-longue à la capuche bordée d'une fourrure aussi grosse qu'un ragondin entier. Un bonnet noir cachant ses cheveux. Il regardait son téléphone en cherchant dans le rayon. Son caddie était rempli à ras bord de bouteilles de lait, pâtes et alcool en tout genre. Et des paquets de kinder buno. Mes kinder bueno !
- Excusez-moi, ça va vous paraitre bizarre mais euh, je crois que, je crois que vous avez mes chocolats, dis-je en rigolant légèrement en pointant son chariot du doigt.
De le dire était encore plus curieux que de le penser. Mais j'avais vraiment envie de ces confiseries.
Il me jeta un coup d'œil en me détaillant de la tête. Ses yeux se plantèrent dans les miens et son regard noisette me scruta trop profondément, ce qui me fit rougir malgré moi.
- C'est la première fois qu'on m'aborde comme ça. T'es mignonne.
- Oh, je ne vous aborde pas. Vous avez pris les deux derniers paquets de Kinder Bueno, que j'avais vu.
Il arqua un sourcil avant de réprimer un rictus. J'avais mon visage sérieux.
- C'est une blague ? Enfin je veux dire, il y a une caméra quelque part ? C'est pour la télé ?
Je ne saisissais vraiment pas sons sens de l'humour. Il m'éclate de rire au nez.
- Tu n'es pas obligé de me parler de Kinder si tu veux une photo.
- Une photo ? Non, j'aimerai juste récupérer un paquet. Je suis allée chercher un vendeur parce que j'étais trop petite et vous avez pris les deux restants. Ils annoncent une tempête ce week-end et ...
- Donc tu es sérieuse ? pouffa-t-il en me dévisageant. Pour des Kinder?
Je le regardais plus attentivement. J'avais comme une impression de déjà-vu. Ou peut-être était ce mon imagination débordante que me jouait des tours. Parfois j'étais capable de confondre romance et réalité, ne sachant plus si j'avais vécu ou écrit une situation précise.
Je n'avais pas bougé d'un iota. Il se stoppa net en comprenant que je ne partirai pas sans mes chocolats. Non mais !
- Écoute ma belle, premier arrivé, premier servi.
- J'allais les acheter, insistai-je. J'étais juste trop petite.
- Ce n'est pas mon problème, répondit-il en reportant son attention sur le rayon des condiments.
- Ecoutez, il y a deux paquets. Je pensais qu'on pourrait partager. Un pour vous, un pour moi. Et on est quittes.
- Tu as de la marge, tu t'en remettras. Et il doit bien rester des M&M's ou quelques chose du genre.
- Vous insinuez que je suis grosse ?
Il posa une nouvelle fois ses yeux sur moi, en soufflant excédé. Moi aussi j'étais atterrée par tant de grossièreté. Ces Kinder étaient à moi. Un point c'est tout.
- J'étais là avant vous, me justifiais-je confuse d'avoir une répartie aussi touffue qu'un enfant de CP.
- Je crois que je vais les garder, malgré cet argument imparable.
Il dégaina un sourire à faire pâlir les marques de dentifrice avant de tourner les talons et changer de rayon. Je n'allais pas me laisser faire, je lui emboitais le pas, pour plaider ma cause. Je l'avais déjà vu quelque part. Il n'était pas du coin, c'est sûr. Il retira son bonnet dans le rayon fromage. Une fausse coloration blonde balayait les pointes de ses cheveux court, les côtés étaient rasés de près. Et tout d'un coup, ça me sauta aux yeux.
- Vous êtes le gars de la pub McDonald ?
- Démasqué !
Je n'aurais pas pu être plus embarrassée qu'à cet instant. Je sentis le rouge recouvrir mon corps et s'insinuer jusqu'à la racine de mes cheveux. Le mot « honte » n'était pas assez puissant pour décrire mon état à l'instant présent.
Le mec de Mcdonald, j'avais son nom au bout de la langue, il avait fait quelques chansons connues. Je suis même certaine qu'il avait déjà séjourné ici. En tout cas, c'était le genre de clientèle qui avait pour habitude de séjourner ici.
Je le regardai scruter les rayons à la recherche d'un article inscrit sur sa liste. Il était grand et imposait par sa prestance naturelle. Même habillé en pyjama il n'était pas mal. Et personne de normalement constituée n'était « pas mal » en pyjama. Je fus tout à coup gênée de ma tenue négligée. Je couvrais mon ventre par ma doudoune, juste pour le cacher, et un peu à cause de sa précédente remarque.
- J'étais sérieuse pour les Kinder, repris-je.
- Moi aussi.
- Ce n'est pas parce que vous êtes célèbre que tout est permis. Il y a beaucoup de gens bien plus riche que vous ici.
- C'est vrai.
Il haussa les épaules avant de s'éloigner toujours plus loin de moi. Je ne lâcherai pas l'affaire.
- Je suis enceinte, je pense que vous pouvez le comprendre, même si l'altruisme n'est certainement pas une de vos qualités.
Je posai ma main sur le paquet qui trônait fièrement sur le dessus de son caddie. Il abaissa son regard sur moi. Je me serai cru dans un mauvais film western, prête à dégainer pour ces chocolats tant convoités, denrée rare en temps de famine impromptue, pensai-je.
- Et moi j'ai très envie de ces Kinder. Alors enlève ta main de ce paquet. Tu seras gentille.
- Les femmes et les enfants d'abord ça ne vous dit rien ?
- Si, mais je crois que nous ne sommes pas assez intimes pour ça bébé.

La Magie de Noel ~ Dj Snake  Où les histoires vivent. Découvrez maintenant