12.

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- Donc tu es ... déçue ? On peut utiliser ce mot ?
- Je ne suis pas déçue Anna. C'était sans importance, éphémère si tu préfères, soufflais-je en portant mon mug de café à mes lèvres.
- Rachel Nestia, vous cachez très mal votre déception, pouffa Anna. Tu es déçue car tu pensais, intérieurement, qu'il n'allait pas lâcher aussi facilement l'affaire.
- Nous ne sommes pas du même monde, dis-je en espérant clore le sujet. Il est avec quelqu'un, j'étais juste une distraction. Elle devait surement être malade ou quelque chose comme ça, je n'en sais rien, les parisiens sont assez fragiles lorsqu'il fait froid.
- Donc si tu n'es pas déçue, tu es peut-être triste ?
Anna me fixa pendant de longues secondes pour sonder mes émotions que je tentais de cacher du mieux que je pouvais.
J'avais dû me résoudre à la rejoindre boire un café, car le fait que je reste cloitré chez mois plusieurs jours d'affilés, alors que j'avais passé la plupart de mon temps dehors juste avant, devenait assez louche. Et je devais me convaincre moi-même que tout ça ne me touchait pas.
Si Anna réalisait que je souffrais de la situation elle m'harcèlerait de question jusqu'à ma mort en me rappelant qu'il ne fallait pas que je tombe amoureuse trop vite blablabla.
Après ma rupture avec Maxime j'avais trainé mes états d'âmes pendant plusieurs mois et je redoutais qu'il en soit de même avec William, que je connaissais depuis 3 jours seulement, contre 5 ans avec Maxime.
Je n'en voulais pas à Anna non plus d'être protectrice avec moi. C'est elle qui m'avait obligé à sortir pour me remettre de ma rupture. Elle se sentait donc entièrement responsable de ma situation.
- Il te manque, affirma-t-elle
- Pourquoi un mec que j'ai croisé deux fois me manquerait-il ?
- Parce qu'il te plait.
D'un point de vue extérieur je n'avais effectivement aucune raison que William me manque et que je sois triste à l'idée que je ne le reverrai peut-être jamais. En théorie, ça aurait dû se passer comme ça. En pratique, je ne m'étais jamais aussi vivante que les quelques heures que j'avais passées en sa compagnie, et je ne parlais pas des bisous. En fait si, les bisous y étaient aussi pour beaucoup, ses lèvres étaient douces, fermes et magiques et avait atteint mon cœur.
Je fuyais le regard inquisiteur d'Anna autant que mes pensées débordantes.
J'étais triste parce qu'il me manquait. Il me manquait parce que j'aimais passer du temps avec lui. Et J'aimais passer du temps avec lui parce qu'il m'écoutait parler, il me faisait rire et surtout, il me bousculait du cocon que j'avais formé autour de moi et mon ventre arrondi.
- Non il ne me plait pas tant que ça, mentis-je en plongeant une nouvelle fois mon visage dans ma tasse de café.
- Bon sang, j'aurai préféré que tu sois déçue, c'était beaucoup plus facile à gérer, renchérit Anna. Ça aurait disparu en quelques jours. Là ça va être beaucoup plus long, surtout connaissant ton penchant pour les histoires chevaleresque combinées aux bons téléfilms de Noël. Je ne peux même pas t'offrir du chocolat puisque ce souvenir te rappellera à lui.
- Anna, soufflais-je
- Bon je résume : les toilettes, deux verres, un ex et il t'as raccompagné ? Juste ça ?
J'avais volontairement tuts le passage « baiser dans le cou à la patinoire », pour éviter qu'Anna ne s'inquiète trop de mon état de désir. Et éviter aussi que la rumeur s'étende jusqu'aux oreilles de mon frère, à qui elle racontait tout, et qui aurait été capable de forcer William à creuser sa propre tombe sous la neige.
- Et pas de nouvelle depuis ?
- Il a une copine Anna. Pourquoi tu ne m'écoutes pas.
- Il a peut-être été occupé, avec ses trucs de DJ. Que fais un DJ d'ailleurs ? m'ignora Anna. Peut-être qu'il n'ose tout simplement pas ?
- Je l'ai vu rentrer dans sa voiture avec une jolie brune avant-hier. Il n'avait ni l'air malheureux, ni l'air timide, lui assénais-je tout en ouvrant mon ordinateur portable. Et pourquoi tu tiens temps à ce que nous passions du temps ensemble ?
- Peut-être parce qu'il te fait du bien Rach.
J'ignorais la remarque de mon amie et ouvrait le fichier word où j'avais entamé mon nouveau roman, qui, bien qu'il n'avance pas très vite, avait déjà 2 chapitres d'écrits.
- Tu as entendus ce que je t'ai dit ?
- Avant ou après les bêtises que tu déblatères depuis une demi-heure
- Tu as fait l'effort de sortir de chez toi. Tu as accepté de sortir avec lui, vous êtes allés à la patinoire. Tu n'es jamais autant sortie de chez toi enceinte que depuis qu'il est là chérie. Et tu es radieuse.
- Je suis radieuse parce que j'ai les hormones de grossesse en folie Anna.
- Tu t'es remise à écrire Rachel. Alors que ça fait 6 mois que tu planche sur ce foutue bouquin.
A nouveau, je me murais dans le silence. Tout cela m'étouffait. J'avais l'impression d'être enfouis dans du sable mouvants, qui m'engloutissait toujours un peu plus dès que le prénom de William était prononcé. Il me manquait à en crever, c'était un fait.
Sauf qu'à lui, je ne lui manquais pas. Absolument pas d'ailleurs.
J'étais plus triste de ressentir ça, plutôt que ce ne soit pas réciproque. Parce que je m'y attendais.
- Je dois y aller Rachel, ton frère à un goût immodéré pour les réunions de dernière minute ces derniers temps. Je te raccompagne ?
- Non je vais rester un peu ici. Il y a du monde, ça m'inspirera pour le chapitre 3.
Anna me souri chaleureusement.
- Pizza à la maison ce soir ? Après on se matte un bon film de noël, le chef m'a donné mon week-end
- On verra, le bébé bouge beaucoup, je suis un peu fatiguée.
Anna m'embrassa sur la joue avant de quitter le café où elle m'avait invité.
Je commandais un thé aux senteurs de noël et une pâtisserie à la cannelle, pour me mettre dans le mood de l'écriture. Après avoir scruté les alentours et les clients du café, je me plongeais dans la relecture des pages déjà écrites pour pouvoir entamer la suite. Mon éditeur allait être content.
C'est lorsque la nuit commençait à recouvrir le ciel que la serveuse me demanda de me déplacer vers le coin salon de thé, puisqu'ils devaient installer la salle pour le service du soir. Je me plaçais sur une banquette dodue recouverte de tissus montagnard lorsque la clochette de l'entrée retentit à l'annonce de nouveaux clients.
- Rachel ?
Je relevais le nez de mon ordinateur dans lequel j'étais plongé depuis le début d'après-midi pour tomber nez à nez avec ... Maxime. Tout sourire, un caban bleu marine sur le dos. Des flocons constellant ses épaules. La providence m'en voulait vraiment, je n'avais pourtant pas autant pêché dans ma vie.
- Je voulais te présenter Karine, dit-il en tendant la main vers Barbie derrière lui. Rachel, voici Karine. Karine, c'est Rachel, une vieille amie.
Une vieille amie ? Il m'avait présenté comme une vieille amie ? Je me contentai d'un hochement de tête plutôt sec et évitait de lui planter ma main dans la figure. Donc une relation de 5 ans, pour laquelle j'avais été dévouée corps et âmes, jusqu'à me mettre mes parents à dos était balayée en 10 secondes par « un vieil ami ». Est-ce qu'on couchait avec ses amis ? Même aussi mal soit-il. Je ne pense pas.
Je tournai mon regard vers Maxime, en essayant de coller un sourire de façade sur mon visage. Elle lui sourit et se planta à côté de lui en me regardant avec son regard trop bienveillant pour être honnête.
- Tu es toute seule ? Ton ami n'est pas là ?
- Non il ... il est partie skier aujourd'hui. Et je ne suis pas trop en état.
- Oh, oui c'est vrai. C'est prévu pour quand déjà ?
- Février, repondis-je sèchement.
- Tu sais si tu viens à l'inauguration du coup ? m'interrogea t-il pour changer de sujet.
- Je ne sais pas trop, j'ai beaucoup de chose à faire, ris-je faussement.
- Ce n'est qu'une soirée. Tu pourras venir avec ton copain, comment s'appelle t-il déjà ?
- William. Lui aussi a beaucoup de chose à faire.
Maxime eu un rictus de gêne et se carra dans le fond de sa chaise. Je me fustigeais d'être tombée dans le panneau aussi facilement. Je venais de lui faire comprendre en une phrase que nous n'étions pas si proche moi et mon « copain ». En tout cas pas aussi proche que d'accompagner sa compagne à une simple soirée dans l'hôtel du père de son ex.
- S'il n'a pas de temps à t'accorder il faudrait peut être te poser des questions.
Je le fusillais du regard. Il pouvait parler lui qui m'avait laissé seule des journées entières trop occupés à faire des randonnés en montagne.
- On est un couple libre, répliquais-je.
C'est lorsque je vis un sourire en coin s'afficher sur ke visage de Maxime que je me rendis compte de ma bourde. Je venais de lui dire que j'autorisais mon faux mec à me tromper ouvertement.
- Enfin, je veux dire qu'on a nos trucs ensembles, et aussi chacun nos activités, nous ne sommes pas obligés d'être collés toute la journée, me justifiais je en coulant un regard vers Karine qui caressait l'avant bras de Maxime.
- Vous êtes ensemble depuis longtemps ? m'interrogea Maxime
- Quelques temps, oui. C'était ... le coup de foudre, je dirais.
- C'est allé vite en tout cas, me répliqua-t-il du tac au tac en jetant un regard sur mon ventre arrondi.
Instinctivement, je mis ma main sur mon ventre pour protéger le bébé. Je ne voulais pas qu'il soit éclaboussé par quoique ce soit qui provenait de Maxime et sa blonde qui commençait à enrouler son bras autour de lui, comme Tarzan autour de sa liane. Je la remerciai intérieurement de ne toujours pas avoir ouvert la bouche, rendant ce moment un peu moins genant.
- Toi qui ne voulait pas d'enfants, reprit-il
- L'amour nous fait parfois faire des folies, répliquais-je en essayant de conserver le semblant de dignité qu'il me restait.
- Comme nous mon amour, nous nous sommes retrouvés coincés dans un ascenseur. Ça été le coup de foudre. On se marie le mois prochain, trouva bon d'ajouter Karine qui m'agita sa main gauche sertie d'un diamant aussi gros que mon œil, sur l'annulaire.
- Toi qui ne voulait pas te marier, dis-je jalousement à Maxime
- L'amour ...
C'était injuste. Injuste qu'ils se pavanent tous les deux devant moi. Injuste qu'elle ait un diamant à son doigt alors qu'ils ne se connaissaient que depuis quelques mois alors que lui n'avait jamais voulu entendre parler d'union officielle. Injuste que je sois enceinte.
Je suis certaine qu'ils m'avaient vu à travers la devanture et qu'il était venu exprès m'exposer son bonheur ultime au visage.
- Tu veux boire un café avant le diner, proposa-t-il à sa compagne en m'ignorant.
Ils n'allaient tout de même pas rester là ? Mon sang se glaça quand je les vis s'asseoir plus confortablement en face de moi. Ils allaient rester là. Je fis claquer mon écran d'ordinateur en guise de protestation. Je ne pouvais pas partir, ça aurait été trop louche.

La Magie de Noel ~ Dj Snake  Où les histoires vivent. Découvrez maintenant