Voyage au centre du soleil

Chapitre 44 - Les dangers de l'océan

Et dire qu'elle avait détesté ça jusqu'à maintenant, mais le voyage en bateau était vraiment quelque chose d'exceptionnel !

Grâce aux potions, Yona ne ressentait plus le mal de mer. Ainsi, lorsque le navire avait quitté Liggewig, elle avait pu profiter au maximum du trajet. Ils prirent plusieurs jours pour s'éloigner de la capitale du sud, où la rivière n'était pas très large. Dans ce type d'environnement, aucune voile n'était tirée, les membres d'équipages forcés de ramer du matin au soir. Elle put s'entraîner sans problème sur le pont principal puisqu'il était vide et que le bateau taguait peu. Gereg se joignait à elle sans surprise, et tous les deux répétaient les mêmes exercices qu'au palais — du moins autant que possible dans cette espace réduit.

Ils n'oubliaient pas la magie non plus, même si le chasseur de primes se montrait plus réticent que la jeune femme, n'ayant plus rien à apprendre. Il servait malgré tout de professeur et partenaire à la garde du corps. Leurs combats amicaux s'avéraient bien plus farouches, poussant le vieil homme de plus en plus dans ses retranchements. Sa blessure n'était pas encore bien guérie, et il ne bougeait pas aussi bien son bras gauche qu'avant et surtout beaucoup moins longtemps. Après quelques passes d'armes, il stoppait le combat, son bras le lançant vivement. Yona l'aidait ensuite à appliquer la pommade que leur avaient fournie les soigneurs du palais. À chaque fois qu'elle voyait l'affreuse plaie pas tout à fait cicatrisée, la jeune femme éprouvait de la culpabilité. Et malheureusement, il n'y avait pas grand-chose à faire hormis le soutenir du mieux qu'elle pouvait. La pause des bandages sonnait généralement la fin de l'entraînement.

Cette petite routine leur prenait facilement la matinée, et débordait même souvent sur l'après-midi. Ils déjeunaient ensemble, Ries se joignant à eux, et en compagnie des derniers matelots. Certains juste en retard, d'autres ayant eu un début de journée chargée, ou alors une faible partie qui ne désirait tout simplement pas repartir trimer. Mais la maîtresse du navire avait l'œil vif et l'instinct affuté, et elle les repérait souvent très vite.

La capitaine Sean était une solide matrone d'une tête de moins que Yona, et pour autant plus large. Comme tous les autres membres d'équipages, elle avait le teint bronzé par le Soleil et les cheveux éclaircis par ce dernier. En pantalon souple remonté jusqu'aux genoux et chemisier léger qui ne dépassait pas les coudes et laissait entrevoir une poitrine plus que fournie, elle ne venait sûrement pas de terres plus au nord. Quelques cicatrices décoraient ses bras et ses jambes, et une toute petite garnissait le côté de son menton. Loin de garder sa langue dans sa poche, elle dirigeait le vaisseau d'une main de fer. Mais ce que la garde du corps préférait chez elle, c'était son amour pour son métier.

La capitaine respirait la mer de la tête au pied. Elle l'avait trouvé froide et tyrannique sur les quais, beuglant des ordres pour motiver ses troupes et s'assurer que le départ ne prendrait pas de retard. Mais une fois loin du port, certes son comportement n'avait pas changé, mais la manière de le faire n'était plus du tout la même. Un sourire ne quittait pas ses lèvres, et ses yeux pétillaient d'une lueur nouvelle.

Leur voyage s'accéléra lorsque, deux jours plus tard, le cours s'élargit considérablement, permettant à la deuxième plus grande voile d'être déployé. Le bateau allait légèrement plus vite, et ne nécessitait plus autant de matelots. Yona fut ravie de les voir souffler un peu, mais déplora tout de même la disparition de son terrain d'entraînement.

Elle se rabattit sur le pont arrière, large de moins de dix pieds. Ainsi, elle exécutait sa routine seule et uniquement une partie. À chaque fois qu'elle perdait son équilibre, elle se disait que ce terrain instable aurait été parfait pour quelques joutes avec Gereg. Mais ça ne serait sûrement plus possible d'ici la fin du voyage.