version alpha : Rejouer la scène du baiser

Sirius

En retournant à l'école le lendemain, je prends conscience de deux choses. Deux choses désagréables :

1) C'est la deuxième fois que je serais en retard en deux jours.

2) Il y a un mec bizarre qui est en train de me suivre.

J'accélère. Le mec bizarre » allonge le pas lui aussi. Quand j'aperçois les grilles du lycée, je n'hésite plus et me mets à courir. Derrière moi, les pas se rapprochent encore. Encore. Il n'y a plus aucun doute possible. Quelqu'un en a après moi, et ce quelqu'un risque de me rattraper. La panique est sur le point de m'envahir. Les poumons en feu, je cours aussi vite que possible, sans même jeter un coup d'œil derrière moi. Je commence à avoir un point de côté, non, même deux. Je savais pas qu'on pouvait en avoir deux en même temps !

À quelques pas de moi, la grille du lycée ! D'un bond, je la franchis. J'ai l'impression d'avoir remporté la victoire au Championnat du monde du 100 mètres. Si j'étais un peu plus audacieuse, je pourrais faire un V de la victoire ou encore le « dab » d'Usain Bolt.

Mais toutes ces images de poses victorieuses disparaissent instantanément quand je vois le mec qui courrait derrière moi franchir à son tour les portes du lycée. Un élève ?

La boulette ! Un élève en retard comme moi.

Toute seule, je me mets à ricaner de ma méprise en cachant ma bouche derrière ma main. Manquerait plus qu'on me voit rire toute seule pour qu'on me prenne complètement pour une folle.

J'avance d'un pas rapide sous le préau, tout en tentant de reprendre mon souffle.

Le garçon m'interpelle :

– Hé ! Hé !

Je me retourne.

– Hé ! J'ai cru que j'arriverai jamais à te rattraper. Ton sac est ouvert, et y a ça qui est tombé.

Entre ses doigts, il tient une feuille un peu froissée. C'est celle donnée par Miss XXL, la veille. Cette fois-ci, je ne peux m'empêcher d'éclater de rire devant le quiproquo.

Je la glisse dans mon sac qui est effectivement entrouvert.

Le garçon me regarde toujours. Il est un peu essoufflé, mais a le sourire aux lèvres.

J'essaie de maitriser le fou rire qui me gagne :

– Sinon, moi c'est pas Hé. En vrai, je m'appelle Lou-Ella.

– Enchanté !

Enchanté ? Ça se dit encore ce mot-là ! Qui c'est qui dans un lycée peut prononcer le mot « enchanté » ? Il est sérieux là, ou bien...

– Moi, c'est Sirius ! Sisi ou Sisi l'Impératrice pour les intimes.

Je le regarde de plus en plus perplexe. OK... j'imagine qu'il n'y a que Sisi l'impératrice qui puisse dire « enchanté » avec autant de naturel dans la cours d'un lycée.

Lui me fixe droit dans les yeux. Des yeux très noirs, avec un regard mi-espiègle, mi-sauvage. Des yeux qu'on a du mal à lâcher. Des yeux qui t'envoient des papillons dans le ventre.

Il a l'air de s'amuser.

– Mais tu m'appelles comme tu veux, tu sais. Je suis pas très difficile !

Je souris timidement.

– T'inquiète ! Ça te va très bien comme surnom Sisi l'Impératrice.

Le sourire du garçon s'élargit :

– Tu me fais vraiment plaisir ! Merci.

Je lui souris encore.

Bizarrement, j'ai envie de rester un peu plus, mais en même temps, il y a un cours d'anglais qui m'attend. Et je n'ai plus rien d'intelligent à lui dire.

Au moment où je m'apprête à repartir, il ajoute :

– Par contre, la prochaine fois, cours moins vite Lou-Ella, je suis asthmatique !

Puis Sirius fait volte-face et s'en va vers sa classe.