Cela fait maintenant cinq jours. Cinq jours que Lina me fait la tête. Et le pire, c'est qu'elle tient bon. Elle ne m'a plus adressé la parole depuis le jour de la rentrée. Autant dire, une éternité.
Je suis plus affectée que je ne l'aurais imaginé. En arrivant à l'école le vendredi matin à 9 heures, j'ai le cœur lourd. Sans Lina, l'école n'a plus aucun intérêt. Et quand la journée commence avec Macard, le cours n'est plus un pur ennui, mais une véritable torture.
– Lou-Ella au tableau ! Vous me résoudrez l'exercice 11 de la page 135 pour vos petits camarades. De préférence sans l'aide de Sean.
Je me lève le cœur battant et les oreilles bourdonnantes. Alors que je m'approche du tableau, mon regard et celui de Lina se croisent une fraction de seconde. On détourne les yeux en même temps, et je reçois un coup au cœur.
Une fois seule face au tableau noir, je regarde mon livre sans vraiment comprendre ce qui est écrit. Je sens une sorte de boule grandir dans ma gorge. J'essaie de me concentrer, mais sans résultat. Les chiffres et les lettres se brouillent au fur et à mesure que les larmes me montent aux yeux.
Je prends une grande respiration pour essayer de me reprendre, mais c'est peine perdue, un sanglot s'échappe de mes lèvres. J'abandonne mon livre sur le bureau de la prof et sors de la salle presque en courant, le visage entre les mains.
Une fois hors de la salle, je laisse libre au cours à ma peine. Je glisse lentement, le dos collé au mur. Les genoux ramenés contre la poitrine, tête baissée, je pleure, à gros sanglots. La téléréalité, les amours, le bac, c'est compliqué. Mais sans Lina à mes côtés c'est juste impossible.
La porte de sa salle s'ouvre doucement. Je me retourne déjà prête à prendre Lina dans mes bras. Mais c'est Sean qui sort le visage inquiet. Il s'assoit à côté de moi¸ en silence et commence à me caresser les cheveux.
Au lieu de me calmer, ça ne fait que renforcer mes pleurs. Je sens sa main passer et repasser en douceur. Ça me fait du bien. Peu à peu, mes sanglots s'espacent et laissent place à un petit hoquet comme celui des enfants. Je pose ma tête contre son épaule et ferme les yeux. J'ai l'impression que je pourrais m'endormir là dans le couloir un peu glauque de son lycée, appuyé contre Sean.
L'inconfort de mes fesses posées sur le carrelage finit par me rattraper et je commence à gigoter. Sean brise le silence :
– On devrait peut-être y retourner, non ?
Je secoue la tête.
– Pas envie. Pas maintenant.
Sean est un peu embêté. Il sait qu'il devrait retourner en classe et en même temps il n'a pas envie de me laisser toute seule.
– Euh... tu veux faire quoi ?
Je n'en ai aucune idée. La seule chose que je sais c'est que pour moi aujourd'hui les maths, c'est fini.
– Bon, je vais dire à la prof que t'es à l'infirmerie et je te ramène tes affaires de cours. Toi tu devrais aller voir la vie scolaire et leur dire que tu te sens pas bien et que ta mère va venir te chercher. On se retrouve ce soir ?
Il prend la main et la serre prestement. C'est à la fois banal et terriblement intime.
Je lui jette un regard reconnaissant. Sean a vraiment tout bon.
À la récréation de 10 heures, j'ai enfin réussi à convaincre les surveillants que non je ne feins pas d'être malade et que oui, ma maman va bien venir la chercher.
Alors que je m'apprête à passer les portes du lycée, j'entends quelqu'un courir derrière moi.
– Ça te dit qu'on marche un peu ensemble, dit Lina. Comme d'habitude, elle enroule ses cheveux autour de son index. Non, peut-être un peu plus nerveusement qu'à l'habitude.
– O.K.
On avance côte à côte en silence, sac sur le dos, nos épaules se heurtant de temps en temps.
Pour briser la glace, je demande :
– Toi aussi t'as dit que t'étais malade ?
– Non, je sèche les cours, tout simplement !
On échange un regard espiègle et on éclate de rire.
La tension redescend.
Lina pointe du doigt le café dans lequel j'ai eu rendez-vous avec Rachel pour mettre au point notre plan action.
– On y va ?
– Allez ! C'est parti !
On pousse la porte du café et la clochette annonçant notre arrivée carillonne. Immédiatement, l'odeur des croissants et du café fraichement moulu me réconforte. On va s'asseoir à une petite table un peu excentrée de sorte à pouvoir observer les gens sans être vus.
Derrière son comptoir, la serveuse nous demande :
– Vous prenez quoi les filles ?
Lina commande immédiatement :
– Deux cafés, deux verres d'eau !
Puis se tournant vers moi :
– Bon on commence par quoi ?
Dans un même élan, on prononce à toute vitesse la phrase magique :
– Chuis désolée !
À nouveau, on pouffe de rire et je me sens bien. Trop contente de notre complicité retrouvée.
Puis Lina se met à parler d'un coup, comme un livre ouvert :
– Je me sens quand même mal de t'avoir dit les choses comme ça, mais j'avais envie que tu réagisses un peu ! Ça m'énervait de te voir empêtrer avec cette histoire ridicule entre Sirius et Sean.
J'essaye de la faire taire en balayant ses arguments d'une main. J'ai juste envie d'oublier la dispute et de passer à autre chose. Mais Lina a besoin de vider son sac :
– Puis entre ses deux mecs et la téléréalité, tu vois, ça se peut que... bon... j'aie été un peu jalouse, quoi...
J'ai envie d'éclater de rire tellement je suis surprise :
– Jalouse de quoi ! D'être surveillée 24 h/24 par des caméras ou d'être instable émotionnellement et complètement immature ?
On se sourit et on se prend dans les bras. Quand je relâche le cou de mon amie, je vois son sourire se crisper. Je n'ai pas le temps de demander ce qui se passe que j'entends une voix reconnaissable entre toutes :
– Bah alors les filles ! On sèche les cours ?
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version alpha : Rejouer la scène du baiser
Ficção AdolescenteLou-Ella est en classe de terminale et apprend le jour de la rentrée qu'une émission de téléréalité va suivre 4 élèves de son lycée du début de l'année jusqu'aux résultats du bac. C'est un peu contre son grès qu'elle se retrouve embarquée dans l'ave...