Petite amie

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Et quoi qu'il en soit entre nous, à partir de ce moment, je deviens officiellement la petite amie de Sean.

À ce titre-là, se rapportent des obligations que je n'avais pas vu venir. L'ensemble de ma classe s'attend à ce que je sache toujours où Sean se trouve, ce qu'il fait, et inversement. Il y a aussi une forte pression sociale pour qu'on passe la récréation ensemble et qu'on s'embrasse devant tout le monde afin de prouver qu'on est bel et bien en couple.

– Un bisou, un bisou, un bisou !

Sean et moi sommes entourés par une vingtaine d'yeux brillants et de mains qui tapent en cadence pour nous encourager.

J'aimerais pouvoir m'échapper, mais je suis cernée, littéralement.

À côté de moi, Sean semble plus à l'aise. Le plus naturellement du monde, il m'attire dans ses bras, et m'embrasse furtivement sur les lèvres.

Et pendant un instant, entre lui et moi, on dirait que c'est vrai.

Puis il me relâche.

Autour de nous, la petite foule lance des exclamations ravies, et stupidement, je me sens fière. Je m'apprête à m'éloigner, mais Rayan me bloque le passage.

– Il ne faut jamais partir après avoir embrassé !

– C'est toi qui as inventé cette règle débile ?

Il est catégorique :

– Non, sinon, ça veut dire que t'as pas aimé !

Ah bon ? Je ne dis rien, mais je reste. C'est plus prudent, je ne connais pas trop les règles non écrites de la petite amie au lycée.

Je me retourne vers Sean, et capte au passage les regards mauvais que me lancent un groupe de filles qui ne s'est pas joint aux demandeurs de bisous.

Parce qu'avec mon nouveau statut vient aussi son lot de méchanceté et de jalousie. Pour les filles qui avaient une vue sur Sean, et il y en avait beaucoup, la raison pour laquelle on est ensemble c'est parce qu'il veut profiter de ma notoriété. Le fait qu'il aurait pu choisir Julie avec laquelle il était ami depuis longtemps semble n'avoir effleuré la conscience de personne. Et comme je suis moi-même incertaine sur la question, je suis d'autant plus mal à l'aise.

Finalement, toute cette pression pèse beaucoup plus lourd sur mes épaules que la présence des caméras. À plusieurs reprises, je suis sur le point de rompre juste pour que cessent les bavardages à notre sujet.

Mais s'il y en a bien une dont la réaction m'intrigue, c'est Julie. Elle n'a fait aucun commentaire sur le sujet et ne semble pas disposée à en parler de quelques manières que ce soit. Elle continue à être sympa avec Sean et aussi désagréable que d'habitude avec moi.

Un autre qui ne se pas gêne pour faire des réflexions par contre, c'est Sirius. Pendant nos leçons de conduite, il enchaine les petites blagues à ce sujet. Je n'ai pas encore tranché à savoir s'il est lourd ou drôle :

– Maintenant il faut que je t'appelle Mme Sean, ou tu es une féministe qui préfère garder son nom de jeune fille ?

– Appelle-moi comme tu veux. Mais pour moi, tu es officiellement Mr.Lourd.

Sirius éclate de rire, il n'est pas très susceptible.

– Pour moi tu resteras toujours « ma petite marathonienne chérie »...

– De QUOI tu parles ?! Tu m'as jamais appelé comme ça !

– Tu te souviens pas de notre première rencontre ? Tu me fais beaucoup de peine, dit-il en mimant une moue tristounette. Je t'ai couru derrière pendant 15 minutes... T'avais perdu un papier.

À l'évocation de ce souvenir, je ne peux m'empêcher de sourire.

Encouragé, Sirius continue le plus naturellement du monde :

– Dire que déjà à l'époque je te courrais derrière...

Mon sourire se bloque, mais mon cœur s'affole...

Je regarde fixement la route devant moi. À un des feux rouge factices, je m'arrête.

Sirius me regarde de façon évidente. Alors je me tourne vers lui.

Il ne dit rien, moi non plus.

Puis, juste avant que le feu ne repasse au vert, il m'enlève une mèche de cheveux qui tombait mon front.

Les papillons dans mon ventre sont de retour.

Je n'ai même pas besoin de regarder mon visage dans le rétroviseur, je sens que je rougis. Je sais que je rougis.

Quelques minutes plus tard, dans le silence, le cours s'achève et je coupe le moteur. Je claque la porte de la voiture, et Sirius fait de même.

Et alors qu'on s'apprête à rejoindre les autres, il me glisse à l'oreille:

-Ça te va très bien le rose au joue.

Et il me fait un bisou sur la joue et s'en va.

Immobile, je touche ma joue à l'endroit où il m'a embrassé.

Pourquoi, mais pourquoi?

Sur le chemin du retour de mon cours de conduite, je me repasse la scène, dix fois, vingt fois. Jusqu'à ce que mon téléphone vibre.

C'est un texto de Sean :

Ça te dit qu'on change de place pour les cours de maths. C'est un peu glauque le lycée, je trouve.

Je suis surprise. Et contente.

C'est vrai que ce serait plus agréable se rencontrer chez moi ou chez lui.

Je n'ose pas dire chez lui. J'aimerais beaucoup y aller, mais en même temps, je ne me sens pas prête... Je pourrais aussi l'inviter chez moi. Sauf que je sais que samedi aprèm, ma mère ne sera pas là. Et l'inviter pour la première fois, dans un appart' sans adulte, ça m'a l'air encore plus compromettant qu'aller chez lui.

Alors, un peu fébrile, j'écris très vite.

''Bonne idée! Si tu veux viens chez moi dimanche en début d'aprèm!''

Et je l'envoie.

Malin! J'ai décalé notre rendez-vous du samedi au dimanche, comme ça, ma mère sera là et je n'ai pas à aller chez lui.

La réponse de Sean arrive vite, et me mortifie:

''Je pensais plutôt à un Starbucks, mais c'est parfait comme ça. Chez toi dimanche 14h00.''

Oh purée! Je vais devoir me taper les sourires en coin de ma mère ET le nettoyage de fond en comble quand j'aurais simplement pu aller dans un Starbucks! Des fois, je me déteste. 

version alpha : Rejouer la scène du baiserOù les histoires vivent. Découvrez maintenant