Le lendemain, l'idée que cette danse n'aurait été qu'une hallucination ou bien un rêve me traversa l'esprit quand je franchis les portes du bureau du Général Stone. Ici, le silence régnait et seul le crépitement du feu dans la cheminée illuminait un temps soit peu la pièce. Plus de belle robe mais simplement une armure. Nous étions bien loin du cadre mystique du bal d'hier soir. Un retour brusque à la vie réelle.
Droite comme un piquet, je fis mon rapport de la soirée sous le regard attentif de mon supérieur. Bien évidemment, il n'y avait pas grand chose à dire au début mais très vite, j'arrivais au moment où je devais expliquer pourquoi j'avais entraîné le prince sur la piste de danse devant toute la cour.
Le Général Stone réprimandait mais sanctionnait ses chevaliers que lors de faute grave mais l'idée qu'il fasse une exception pour moi me noua les entrailles. Et s'il ne comprenait pas mes intentions et les jugeait futiles ? S'il prenait ma tentative de protection comme un simple moyen détourné de m'amuser ?
C'est avec une boule au ventre croissante que je lui racontai l'apparition de l'homme mystérieux en espérant être assez convaincante. Le Général m'écouta sans m'interrompre hochant simplement de la tête, le regard dans le vide jusqu'à ce que je termine. Je ne savais pas si je devais prendre ce comportement comme un signe positif ou la preuve imminente d'une sanction à venir.
« Un autre de mes hommes m'a fait une description similaire, m'annonça-t-il songeur. Il allait réagir mais vous l'avez devancé puis il s'est volatilisé. »
Volatilisé ? me répétai-je à moi-même. Comment était-ce possible ? J'étais pourtant persuadée que quelqu'un me fixait durant le reste de la soirée. Etait-ce le fruit de mon imagination ?
La question continuait de trotter dans ma tête alors que je me rendais aux appartements princiers mais elle fut vite remplacée par un autre sujet tout aussi... agréable. Lorsque j'avais regagné ma chambre hier, j'étais bien trop épuisée pour réfléchir correctement. La musique jouait en boucle dans ma tête et je me voyais encore danser d'un bout à l'autre de la piste dans les bras du prince sans que cela me pose problème parce que ce que j'avais ressenti à ce moment là était bien présent : la liberté.
Or, nous étions dans le vrai monde et aucun sentiment de cette ampleur ne perdurait dans le temps. Tout ce que j'avais laissé derrière moi l'espace de quelques heures m'avaient rattrapé en quelques secondes. Mais le plus dur dans cette histoire, c'était que je me sentais coupable.
Coupable d'avoir agi sans réfléchir, coupable de m'être laissée emportée et coupable d'avoir ressenti.
Je pouvais avoir l'allure d'une dame l'espace d'une soirée mais avant tout, j'étais chevalier.
Ne l'oublie pas, souffla ma conscience
Je ne devais pas l'oublier quoique je fasse, quoique je ressente, je suis chevalier.
🜲🜲🜲
Deux semaines étaient passées, mais c'était comme si il ne s'était jamais rien passé. Un rêve. Une hallucination.
Le prince Saeros m'adressait à peine la parole et lorsqu'il le faisait, c'était juste pour m'informer du déroulé de la journée. Son regard s'attardait à peine sur moi comme si le simple fait de me regarder le brûlait. J'étais de nouveau invisible à ses yeux mais parfois, un bref instant, lorsque mon attention était ailleurs, je le sentais m'observer à la dérobée l'espace de quelques secondes. Mon coeur s'affolait dans ma poitrine comme une alarme à chaque fois que cela arrivait mais ma raison me rappelait aussi à l'ordre.
Il est prince, je suis son chevalier.
Cette réalité me hante encore tandis que je dîne avec mes camarades avant leur service. Je levai la tête de mon ragoût que je fixais depuis tout à l'heure sans pour autant le manger pour croiser le regard interrogateur d'Ulysse.
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The bewitched crown
Romansa⚠️ TW : sexisme, sang, cadavres, meurtres, pendaison, tentative de viol ⚠️ Nouveau chapitre tous les week-end. Narissa vient tout juste d'intégrer la garde royale d'Eldred, un royaume qui autrefois brillait par sa richesse et qui dorénavant doir sub...