CHAPITRE 26

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Roxanne

20 h 45, Maison de Victor, Monaco

Assise sur les marches d'entrée, je vérifie l'heure sur mon téléphone pour la énième fois. Victor n'a toujours pas répondu à mon message écrit et réécrit à maintes et maintes reprises il y a de ça plus de quatre heures. J'ai épuisé toutes les raisons possibles et inimaginables pour justifier son silence. De la plus ridicule à la plus sensée, j'ai finalement essayé de me convaincre que c'était la surcharge de travail qui l'avait rendu indisponible. Je me décide à patienter un petit quart d'heure supplémentaire avant d'abandonner mon poste devant chez lui. Poireauter, c'est OK, mais pas pendant dix ans. Peut-être est-ce simplement le destin qui me fait comprendre que c'est une mauvaise idée. En mon for intérieur, j'espère tout de même qu'il décide d'apparaître. La situation est stupide, ou plutôt, je suis stupide, j'attends un homme qui m'a blessé volontairement devant chez lui, comme dit Ela, je me suis entiché d'un de mes bourreaux. Dans un livre ou même dans la vraie vie, on appelle ça le syndrome de Stockholm. Je suppose qu'on aurait tous besoin de se faire suivre. Je secoue la tête, je fais n'importe quoi et les raisons pour lesquelles j'agis de cette manière ne sont même pas valables. D'un côté, j'éprouve l'envie d'être dans les bras de Victor peu importe les erreurs qu'il a commises et de l'autre je persiste à rester à ses côtés parce qu'il peut m'aider à sauver Ela d'elle-même. Sauver... c'est peut-être un peu extrême, du moins, la protéger.

Je sursaute quand le crissement de pneus sur l'allée gravillonnée m'extirpe de mes pensées. Sa portière claque et il court vers moi. Je me redresse, droite comme un piquet, ma peau se hérisse dans l'instantané lorsque ses mains entourent mon visage.

— Qu'est-ce que tu fais là ? Tout va bien ? Quelqu'un t'a fait du mal ?

Sa réaction m'extorque un léger sourire. Mes doigts s'enroulent autour de l'un de ses poignets et j'abaisse sa main de mon visage. Mes yeux se rivent sur la petite entaille sur sa lèvre, je grimace et murmure :

— De toute évidence tu n'as pas reçu mon message.

— Disons que j'ai eu une petite dispute avec Simon et que mon portable a morflé.

«Victor Rivaux, ne t'aime pas. Il est amoureux de Simon et uniquement de lui.»

Je m'écarte de lui quand la voix d'Ela résonne sous mon crâne. Je me mords la lèvre et soupire.

— Veux-tu... rentrer ?

Je hoche la tête tout en évitant son regard. Il tourne les talons, récupère ses affaires dans la voiture et nous fait entrer. Dans un silence de mort, nous gagnons le salon. Il s'installe dans le canapé tandis que je reste debout pour garder un peu de contenance. Ma poitrine se soulève pour trouver suffisamment d'oxygène.

— Es-tu amoureux de Simon ? chuchoté-je, mal à l'aise.

Aucune réponse. Juste le silence.

— Ela pense que vous êtes... ensemble.

Rien. Il reste mutique.

— Si elle a raison, pourquoi autant insister avec moi ? Je veux dire, le sexe c'est une chose, mais... tu m'as dit que... enfin... peut-être que j'ai mal interprété tes mots... enfin, je ne sais pas...

Je me maudis, secoue la tête et tourne les talons. C'était une erreur, je n'aurais jamais dû venir. Je voulais égoïstement donner tort à Ela, de toute évidence, elle a raison, je suis naïve ET stupide.

Oui, réplique-t-il alors que j'avais presque atteint la porte d'entrée. Oui, j'aime Simon.

Aïe. C'est donc ça la sensation d'un cœur fissuré? C'est plutôt douloureux.

Sous Le Masque Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant